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La carte postale d’Annabelle Georgen: Bons baisers de Berlin

La carte postale d’Annabelle Georgen: Bons baisers de Berlin

Chaque mois, notre correspondante à Berlin Annabelle Georgen nous envoie des nouvelles fraîches et acidulées de la capitale queer européenne. Sans traces de rouge à lèvres.

«Tout ce qui se passe au Berghain reste au Berghain.» Cette phrase, tous·tes·x celleux qui ont eu la chance de pénétrer dans l’enceinte du légendaire club techno berlinois l’ont déjà entendue. Cette phrase, c’est la promesse complice qu’en ces lieux plongés dans une obscurité enveloppante, propre à enhardir les plus timides, on peut être qui on veut, faire tout ce qu’on veut. Sans avoir à se soucier du lendemain et du regard d’autrui. Ni du potentiel de nuisance des smartphones inquisiteurs, puisque chaque clubbeur·se·x se retrouve avec les objectifs de son téléphone bardés de stickers dès la porte du club passée. Voilà à quoi tient le «safe space» promis par le temple de la techno berlinoise à ses adeptes: deux ou trois gommettes fluo apposées sur un smartphone.

Pour le reste: good luck! Le personnel en charge de la sécurité est à de rares exceptions près essentiellement masculin, blanc et cis, et en général aimable comme le sont les fonctionnaires de l’administration pénitentiaire. Malgré les dimensions monumentales du club – une ancienne centrale électrique – on ne trouve aucun stand de prévention et de réduction des risques au Berghain, comme c’est le cas dans la plupart des soirées queers de la capitale allemande. Plusieurs associations LGBTIQ+ ont pourtant maintes fois proposé leurs services bénévolement, afin de distribuer bouchons d’oreilles, capotes, gants en latex, cartes plastifiées et pailles individuelles… Sans succès. À croire que le Berghain se croit too cool pour s’abaisser à faire de la prévention.

En cas de problème – badtrip, malaise, agression, relations sexuelles non protégées – les clubbeur·se·x·s peuvent se tourner vers une awareness team maison. À en croire le témoignage sur Instagram de Zoe Zanias, une artiste berlinoise qui a été victime de needle spiking (une attaque à la seringue) lors d’une soirée au Berghain il y a quelques semaines, de même que les centaines de réactions d’autres habitué·e·x·s des lieux suscitées par son post, cette team a principalement pour mission de virer celleux qui sont en danger au lieu de leur venir en aide. Sur le mode «va mourir ailleurs!». Quand Zoe Zanias s’est soudainement effondrée sur l’un des dancefloors du club, frappée d’amnésie et de détresse respiratoire, elle a été mise à la porte du club dès qu’elle a repris connaissance. Alors non, le Berghain n’est pas un safe space. Et la réaction de la direction face à cette histoire, un silence de plomb, ne joue pas en sa faveur.

Le Berghain n’est pas non plus un lieu bienveillant et inclusif. Toute la mythologie du club est fondée sur la discrimination fièrement pratiquée à l’entrée par une poignée de videurs cis et blanc – hashtag #LaPorteLaPlusDureDeBerlin. Des gens viennent du monde entier pour faire la queue pendant des heures devant le Berghain, la boule au ventre durant les derniers mètres qui les mènent à la porte du club, parqués entre des rampes qui rappellent celles des abattoirs. Est-il encore justifiable, en 2022, de proposer une culture de la fête basée sur la peur, le jugement sur l’apparence physique et le look, l’humiliation collective et l’arbitraire? Fuck the Berghain.

One thought on “La carte postale d’Annabelle Georgen: Bons baisers de Berlin

  1. Merci pour cet article qui décrit parfaitement ce qu’est ce lieu et l’absence totale de valeur d’ouverture et de bienveillance qui le caractérise. Fuck the Berghain: on ne fait pas la queue, on se lève et on se barre de ce trou à rats. YGM

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