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«L’ouverture d’esprit, ça s’apprend»

A la veille des prochaines Assises contre l'homophobie à Genève, interview de Marie Houzeau, directrice générale du Groupe de Recherche et d'Intervention Sociale du Québec. Un modèle.

En Septembre 2009 la Fédération Genevoise des Associations LGBT, en partenariat avec l’État, la Ville de Genève et l’Université de Genève a organisé les premières Assises contre l’homophobie. Leur but: réunir les membres de la communauté LGBT, les professionnels de la jeunesses et de la justice et des politiques pour réfléchir à des moyens de lutter contre l’homophobie.
Un des grands débats de ces premières Assises, centrées sur l’homophobie dans l’éducation, a été de sensibiliser les jeunes en milieu scolaire par des témoignages de gays et lesbiennes suivant un modèle québécois. Mais, malgré le succès de ces interventions outre-Atlantique, les résistances sont nombreuses et ce principe est loin d’être acquis en terre genevoise. Présentation de ce modèle avec Marie Houzeau, directrice générale du Groupe de Recherche et d’Intervention Sociale.

Marie Houzeau, vous êtes directrice générale du Groupe de Recherche et d’Intervention Sociale (GRIS). De quoi s’agit-il?
Le GRIS est né d’une association de jeunes d’entraide entre pairs. Ses bénévoles ont constaté que les 14 – 25 ans qu’ils recevaient souffraient beaucoup d’homophobie en milieu scolaire. En 1988, ils ont donc proposé à des enseignants de faire appel à eux s’ils avaient besoin de témoignages dans leurs classes pour répondre à toutes les questions que les jeunes pouvaient avoir sur l’homosexualité. Le but principal du GRIS est de démystifier l’homosexualité et la bisexualité. En 1994, le GRIS est officiellement né comme organisme indépendant.

Depuis quand y a-t-il des gays et lesbiennes qui vont témoigner dans les écoles?
Depuis 1988. Depuis que cette association de jeunes a proposé ses services aux enseignants. Vu d’ici, ça paraît incroyable. Après cette proposition, un premier enseignant a fait appel à cette association. Le succès a été immédiat. Depuis, bien sûr ça a pris de l’ampleur. En 2011, 1163 interventions on déjà été réalisées.

Quel âge ont les jeunes que rencontre le GRIS?
On commence dans les classes de dernier cycle primaire, à 10 – 11 ans et ça va jusqu’à l’université et même plus puisqu’il nous arrive d’intervenir dans le milieu du travail.

Avez-vous rencontré des problèmes avec les politiques?
Non, pas vraiment. Au Québec, les écoles sont libres de recevoir qui elles veulent. Il n’y a pas besoin de passer par un ministère ou d’obtenir une autorisation. La direction de chaque école est assez libre. Comme nous intervenons à la demande des enseignants ou des infirmières scolaires par exemple, ce n’est pas nous qui nous confrontons aux éventuelles résistances, mais celui qui fait la demande auprès de sa direction. Il y avait certaines réticences au début dans certains milieux, notamment avec la Commission des écoles catholiques de Montréal, mais après sa laïcisation les choses se sont beaucoup simplifiées!

Vous collaborez donc sans problème avec l’Etat?
Avec l’Etat c’est un grand mot. Nous collaborons surtout avec les écoles. Mais récemment nous avons été épaulés par le ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles pour créer une brochure pour les immigrés, d’une part comme ressource pour les LGBT issus de l’immigration, d’autre part pour éduquer les nouveaux venus aux valeurs de leur terre d’accueil.

Le GRIS est actif depuis plus de 20 ans. Avez-vous pu en observer les résultats?
Oui. Comme notre nom l’indique, nous faisons aussi de la recherche. C’est-à-dire que nous faisons remplir des questionnaires aux jeunes avant et après les interventions. Ce sont des questions sur leur niveau de confort face à l’homosexualité dans diverses situations. Les résultats sont très positifs. Les jeunes sont nettement plus à l’aise après les interventions.

Lorsque les associations genevoises essaient de proposer une démarche similaire à celle du GRIS, elles se heurtent aux politiques qui craignent le prosélytisme à l’école…
C’est une totale incompréhension de ce qu’est l’homosexualité! C’est un argument homophobe en lui-même. On ne peut adhérer à l’homosexualité comme on adhère à une idéologie ou une religion… On ne peut tout simplement pas faire de prosélytisme homosexuel, l’homosexualité ne s’enseigne pas. Par contre l’ouverture d’esprit et l’acceptation des différences s’enseignent et l’école est le milieu idéal pour cela! Ce genre de réaction dénote bien l’urgence d’agir …

Au Québec les droits des personnes sont les mêmes quelle que soit leur sexualité. Cela constitue-t-il un terrain favorable pour le GRIS?
Effectivement, l’adoption a été légalisée en 2002 et le mariage en 2005. Légalement nous sommes donc tous égaux. Reste cependant à rendre cette égalité socialement… Ces avancées ne sont pourtant pas en cause dans l’acceptation des interventions du GRIS puisqu’il a commencé ses actions bien avant cette égalité juridique.

Vous êtes intervenue lors des Assises contre l’homophobie en 2009 et vous étiez présente pendant les deux jours. Quelle impression en gardez-vous?
J’ai eu une impression positive de ce qui a été fait. Il me semble que les pouvoirs publics ont véritablement pris conscience des problèmes qui ont été soulevés. Mais, à la sortie, il n’y a pas eu de projets concrets, pas de véritable engagement à faire quelque chose. D’autre part, j’avais l’impression que certains points qui posaient problème comme la validité du témoignage comme moyen éducatif et de transformation sociale sont des débats qui ont déjà été menés et validés ailleurs. Pourquoi ce qui est bon pour des jeunes Québécois ne serait pas bon pour des jeunes Suisse? Pourquoi vouloir à tout prix réinventer la roue et refaire ces éternels débats théoriques qui ne font que retarder l’action sur le terrain?

Journée de suivi des premières assises contre l’homophobie à Genève. «Avancées et perspective» Mercredi 5 ocotobre 2011 – Uni Dufour
Infos sur federationlgbt-geneve.ch

(Article paru dans le magazine 360° de septembre 2011)