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Pierre et Gilles, portraitistes enchanteurs

Pierre et Gilles, portraitistes enchanteurs
Nina Hagen, Collection Noirmontartproduction, Paris © Pierre et Gilles

À Paris, la Cité de la musique rend un hommage flashy-flashant, tout en musique, à l’imagerie iconique du couple d’artistes français Pierre et Gilles. À découvrir jusqu’au 23 février.

Une fois n’est pas coutume: jetez-vous sur les audioguides (gratuits) distribués à l’entrée! Car l’exposition que consacre la Cité de la musique au duo d’artistes gays Pierre et Gilles, qui ont tiré le portrait d’un nombre affolant de grands noms de la chanson française et de la pop internationale, se visite en musique, casque sur les oreilles. Chaque salle a sa propre playlist, chaque portrait, son propre morceau (140 chansons au total!). Admirer un portrait kitschissime d’une Lio grimée en «Madone au cœur blessé» tout en l’écoutant chanter «L’autre joue», c’est la voie royale pour pénétrer dans l’univers extravagant de Pierre et Gilles.

La bal(l)ade s’ouvre sur leurs débuts, une plongée nostalgique dans le Paris des «années Palace», du nom de ce club mythique aux nuits enchanteresses, où se côtoient rockstars, drag queens, punks et jeunesse dorée. Apparu en 1978, en pleine fièvre disco, il est rayé de la carte cinq ans plus tard sur fond d’épidémie du sida. Pierre et Gilles y ont leurs habitudes, comme toute une génération de gays fêtards. Le couple s’est d’ailleurs rencontré dans une fête, au mitan des années 1970, et y repère ses premiers modèles sur les dancefloors. À l’instar de toute la génération musicale de «jeunes gens mödernes» que Pierre et Gilles ont immortalisée dans les années 1980: de l’énigmatique Edwige au tendre Etienne Daho en marin, en passant par les icônes pop françaises de l’époque, telle la sulfureuse Bambou – un épatant nu sous la douche éclaté en triptyque encadré de vrai bambou!

Pierre fait les photos, Gilles les peint
Mi-photos, mi-tableaux, leurs portraits au style reconnaissable entre tous naissent dans le secret de leur atelier parisien. Ils réalisent euxmêmes leurs décors, tout comme leurs cadres – comme en peinture classique, ces derniers sont souvent aussi chargés de sens que l’est la toile. C’est Pierre qui fait les photos, puis Gilles qui peint sur les tirages, donnant à leurs portraits une touche surannée, souvent féérique (à grand renforts de paillettes), souvent doloriste (ah, les larmes étincelantes, presque obscènes, de Stromae!). Toujours kitchs, truffés de références à la culture populaire, l’underground gay, l’imagerie religieuse et la peinture classique, souvent très drôles, les portraits de Pierre et Gilles sont une invitation à oublier la froide banalité du réel et à plonger dans le merveilleux.

Sur ce couple d’artistes discrets, qui cultivent le mystère depuis près d’un demi-siècle, on apprend peu. Seule l’installation «L’autel de la musique», assemblage hétéroclite et croulant de reliques des idoles pop du couple, de Michael Jackson à Claude François, donne une idée de ce à quoi ressemble leur antre, et l’extrait du documentaire «Dans une photo de Pierre et Gilles» (le docu d’Élisabeth Couturier et Chantal Lasbats) projeté à l’issue de l’exposition, un aperçu de leur atelier et de leur travail en train de se faire.

Saintes
Le duo voue par ailleurs un véritable culte adulescent à Sylvie Vartan, dont les portraits altiers s’étalent autour d’une installation délicieusement nostalgique: la chambre, imaginaire, d’une jeune fan de «l’idole des jeunes». Mais c’est surtout l’iconographie catholique, source d’inspiration inépuisable des deux portraitistes, qui domine la centaine de peintures-photographies rassemblées à la Cité de la musique: l’actrice et chanteuse lyrique Arielle Dombasle pose en Sainte-Blandine, l’icône androgyne Leslie Winer en Sainte Lydwine de Schiedam, la chanteuse féministe française Clara Luciani avec larmes de sang et ex-voto, la prêtresse punk allemande Nina Hagen en Sainte Vierge… Un chemin de croix joyeux et glamour.

« «Pierre et Gilles – La Fabrique des idoles», jusqu’au 23 février à la Cité de la musique, Paris. www.philarmoniedeparis.fr

Et pour faire durer le plaisir…

La biennale suisse Images Vevey vient de publier un très beau «Dictionnaire illustré d’expériences visuelles» qui retrace dix ans d’exploration dans le domaine des arts visuels (2008-2018). On y trouve notamment trace de la participation de Pierre et Gilles au festival en 2016, dont un immense tirage (110 m2) du célèbre portrait de marin Dans le port du Havre s’affichait sur la façade de l’ancienne prison de Vevey.

«Pierre et Gilles – La Fabrique des idoles», François Piron, Anca Vasiliu et Maxime Boidy, 2019, 368 p., 37 euros Le catalogue de l’exposition, dont l’esthétique évoque un missel, rassemble portraits célèbres de Pierre et Gilles, analyses de leur œuvre ainsi que des photos inédites de l’atelier parisien des artistes.

«Pierre et Gilles», Eric Troncy, Flammarion, 2016, 400 p., 50 euros Un beau livre rassemblant les portraits emblématiques du duo. Pierre et Gilles – Sailors & Sea, Eric Troncy, Taschen, 2008, 192 p., épuisé. Un best-of des plus belles images de marins de Pierre et Gilles, un des motifs récurrents de leur œuvre. Le livre d’images, Stefano Stoll, Images Vevey/Koenig Books London, 2019, 400 p., 48 euros