Buck Angel: un sexy bad-boy sur le déclin
Acteur porno, producteur de films pour adultes, militant pour les droits trans*… Malgré ses multiples casquettes réjouissantes, Buck Angel reste un personnage controversé. C’est l’heure de faire son Quotient Queer.
Lorsqu’on prononce son nom, les réactions ne se font pas attendre. Entre la moue pleine de désir pour cet homme aux muscles saillants et au regard profond, et les grimaces tirées face à ses prises de position critiquées, une chose est sûre: Buck Angel ne laisse personne indifférent·e·x.
Un militant sur tous les fronts
Apparu pour la première fois dans le film Cirque Noir (2005) du studio Titan, Buck Angel a lancé un véritable pavé dans la mare du porn. En incarnant une représentation encore jamais vue d’un homme trans* ultra-masculin qui n’a rien à envier à ses homologues cisgenres, Buck Angel a activement contribué à briser l’omerta qui étouffait jusque-là les parcours trans*.
Après sa percée dans le paysage porn, il commence également une carrière de conférencier en éducation sexuelle. Son but? Démystifier les poncifs autour des sexualités des hommes trans*. Dans la même veine, il crée un site de rencontres spécialement dédié aux hommes trans* «afin de répondre à leurs besoins spécifiques».
10/10
Un documentariste important
Si Buck Angel a su provoquer un impact tonitruant au sein de sa génération, c’est spécifiquement parce qu’il a tout fait pour enrichir la perception des hommes trans* au sein de la société états-unienne des années 2000. Buck Angel n’a pas été un simple fantasme sexuel, il s’est affairé à documenter la transition des personnes trans* dans un espace médiatique où l’on n’en parlait pas. Et si on en parlait, c’était à des fins sensationnalistes, des talk-shows moqueurs où l’on s’amusait à décortiquer en direct la vie d’une personne trans* dans les moindres détails.
C’est dans ce contexte que Buck se lance dans la réalisation de documentaires. En 2011, il réalise Sexing the Transman, dans lequel il approfondit la question de sa sexualité en tant qu’homme trans*. Il parle des changements qui se sont produits au cours de sa transition, ainsi que de la façon dont lui et ses partenaires s’y sont adaptés. En 2013, il réalise Mr Angel, un documentaire autobiographique et intime sur son parcours, qui aborde notamment les grandes difficultés qu’il a traversées dans sa vie pour pouvoir se faire accepter de sa famille et du reste du monde. Dépression, tentatives de suicide, addiction… Une manière d’aborder frontalement et sans chichi les conséquences de la transphobie.
10/10
Des saillies transphobes dont on se serait passé
Malgré son militantisme, il multiplie les dérapages, que ce soit ses propos sur les réseaux sociaux ou les personnalités controversées dont il s’entoure. L’accusation principale faite à son encontre: une approche très pathologisante de la transidentité, qu’il considère lui-même comme une maladie à guérir. Issu de la branche transmédicaliste, il défend ainsi la surmédicalisation des parcours trans*, et se rallie même de plus en plus aux mouvements anti-trans*, notamment lorsqu’il s’agit de détruire la légitimité des femmes trans*.
En 2021, il co-écrit une lettre intitulée Les hommes trans* contre-attaquent, qui contient une liste d’arguments transmisogynes tous plus sidérants les uns que les autres, mégenrant les femmes trans*, les présentant comme des «pervers sexuels», et encourageant les thérapies de conversion pour les personnes trans* (entre autres). Une roue libre qui ne semble pas sur le point de s’arrêter à l’heure où j’écris ces lignes.
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Résultat : 4/10
Buck Angel a beaucoup fait avancer les représentations des transmasculinités au sein des espaces médiatiques mainstream, et a ouvert la voie à nombre de performers trans*. Il est finalement le produit d’une société au gatekeeping transphobe [ndlr: le gatekeeping signifie la limitation d’accès à des droits, des espaces, des conditions de vie dignes pour un groupe minorisé] beaucoup plus violent qu’aujourd’hui, ce qui permet d’expliquer en partie ce qui semble relever d’une profonde transphobie intériorisée. Mais l’aliénation face aux violences cisnormées ne permet pas d’excuser un tel niveau de violence médiatique à l’encontre de ses adelphes.
Barème du QQ
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