Un requérant très embarrassant
La Cour européenne des droits de l'homme invite la justice suisse à revoir sa copie sur le cas d'un demandeur d'asile gay, menacé d'expulsion vers la très homophobe Gambie. Même si cet homme a un parcours plutôt trouble.
Dans un arrêt publié aujourd’hui, la Cour européenne des droits de l’homme tape sur les doigts de la Suisse au sujet de la décision de renvoi d’un demandeur d’asile gambien. Ce quadragénaire gay occupe la justice fédérale et celle des cantons de Saint-Gall et de Lucerne depuis plusieurs années. Il a déposé trois demandes d’asile, toutes refusées. Après une première requête sous une fausse identité, en 2008, ce n’était qu’à la deuxième qu’il a invoqué son homosexualité, affirmant avoir fui son pays après une arrestation. Un récit jugé non crédible.
En outre, le Gambien a des antécédents pénaux: il a écopé de 18 mois de prison pour tentative de d’extorsion avec violence et dommages à la propriété, entre autres. Son comportement agressif a aussi été noté, y compris vis-à-vis de son partenaire, un homme âgé atteint d’un cancer. Ce dernier est décédé fin 2019.
«Intérêt public»
Conclusion des tribunaux suisses: il y a un «intérêt public à ce que l’homme quitte le pays», surtout dès lors que rien n’indique que les autorités gambiennes soient au courant de son homosexualité. C’est sur ce point que l’avis de Strasbourg diverge: il y a bien violation de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, car le recourant risque d’être exposé à des traitements inhumains et dégradants dans son pays, où l’homosexualité reste passible de la prison à perpétuité, mais aussi de lynchage. La Suisse devra lui payer 14’500 euros pour couvrir les frais de justice.