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Pour le mariage pour tous, on se hâte lentement

Pour le mariage pour tous, on se hâte lentement
C'est à Bernexpo que le mariage pour tous sera débattu lors de la prochaine session. Photo Twitter/@ParlCH

Si le grand oui du 9 février pour pénaliser l’homophobie a été une importante avancée, la Suisse traîne encore la patte sur la question des unions, à l'ordre du jour de la prochaine session parlementaire, le 3 juin.

Enfin. Sept ans après le dépôt de l’initiative de Mathias Reynard (PS/VS) pour étendre la norme pénale contre le racisme à la discrimination en raison de son orientation sexuelle, les citoyens suisses ont dit un oui massif, plus de 63% de votes favorables. Seuls trois cantons ont refusé, c’est dire le succès et le message envoyé aux personnes homosexuelles: «C’est un signal puissant», a déclaré le porte-drapeau de l’initiative. Un signal puissant, oui, mais pour quoi? Pour qui?

Il faut se pencher du côté du lendemain de ce 9 février 2020. En effet, deux sondages, l’un dévoilé par Pink Cross de gsf.zurich, l’autre par Tamedia, montrent que le peuple Suisse, a priori conservateur, est majoritairement en faveur d’un mariage qualifié de «complet», à savoir l’accès à la PMA pour les couples lesbiens et à la coparentalité (67% chez Pink Cross et 58% chez Tamedia). L’enquête de Pink Cross, où les sondés ont été par ailleurs questionnés sur leur orientation sexuelle, révèle que même les personnes votant principalement UDC se positionnent pour un mariage égalitaire à 67%.

Minute papillon
C’est dire si l’affaire est pliée non? Alors, qu’attendent les politiques pour avancer sur la question? Tout juste avant les résultats du 9 février, le Conseil fédéral s’est fendu d’un communiqué pour annoncer qu’il tient rapidement à ouvrir le mariage à tous les couples et soutient le projet que la Commission des affaires juridiques du Conseil national a élaboré en réponse à l’initiative parlementaire «Mariage civil pour tous».

Évidemment, il y a un mais: il ne s’agit là que de la version simple, c’est-à-dire que nos sept Sages veulent d’abord débattre de l’ouverture du mariage aux homosexuels, puis, dans un second temps, discuter de la PMA et de la coparentalité. Un art du saucissonnage typiquement suisse, qui choque Muriel Waeger, directrice romande de l’association Pink Cross et LOS (l’Organisation des lesbiennes): «Envisager seulement un mariage light en 2020 est révoltant et cela va prendre encore des années et des années avant que les LGBTI+ aient enfin les mêmes droits que le reste de la population.» Pour elle, la question du mariage pour toutes et tous, va tourner autour notamment du chapitre des enfants, sans aucun doute, que l’on débatte du mariage «light» ou du mariage dit «égalitaire». «Autant passer directement à la version complète du mariage avec les mêmes droits, plutôt que perdre du temps précieux pour le progrès des égalités», conseille-t-elle. «Il y a clairement un manque de courage politique, une peur du débat, alors que la population est prête.»

Pour Lise Bailat, correspondante à Berne pour la «Tribune de Genève», «Le Matin Dimanche» et «24 heures», la décision du Conseil fédéral de manière séquencée en deux temps, n’est effectivement pas non plus une avancée. «Lors du référendum sur le partenariat enregistré en 2005, les politiciens avaient fait la promesse de ne pas toucher à la filiation notamment. Ce qui peut expliquer aujourd’hui cette lenteur et cette marche à reculons», analyse-t-elle. Pas de précipitation donc, il n’y a pas le feu au lac…

L’épineuse question du sociétal
La question était à l’agenda du Conseil national pour sa session de mars. Elle a été reportée pour les raisons que l’on sait. Elle est dorénavant inscrite à l’ordre du jour de la session de juin, plus précisément du 3 juin*. Mais la partie n’est pas gagnée d’avance, comme l’explique la journaliste romande: «À part les Verts et les Vert’libéraux, les partis politiques ne se préoccupent que très peu des questions de société et de mœurs. C’est un peu dans l’ADN des parlementaires de tout temps.»

«En ce qui concerne toutes les questions LGBT, les politiques sont peu à l’écoute des citoyennes et des citoyens»

Qui plus est, souvenons-nous de Mathias Reynard qui a dû s’expliquer sur son orientation sexuelle et indiquer qu’il n’était pas homosexuel simplement parce qu’il défendait son initiative: «Certains politiques peuvent se montrer frileux sur ces questions et pensent qu’ils n’ont rien à y gagner. Et aussi, ce sont surtout les femmes et les hommes ouvertement gays qui mènent la bataille en public.» Une analyse que partage Muriel Waeger: «En politique suisse, pratiquement pas ou peu d’hommes hétérosexuels se battent pour ces problèmes, quel que soit le parti concerné.» Pour celle qui a porté la campagne contre l’homophobie, «en ce qui concerne toutes les questions LGBT, les politiques sont peu à l’écoute des citoyennes et des citoyens. De l’autre côté, ces mêmes citoyens élisent des personnalités au Conseil des États assez conservatrices qui ne sont pas dans les extrêmes, d’où un certain immobilisme.»

Nouvelle donne
Pourtant, les élections fédérales de fin 2019 ont grandement changé la donne au sein de la Chambre basse: une nouvelle génération de parlementaires, globalement plus ouverte aux questions de société et surtout «10% de femmes en plus, plus enclines à prendre les sujets LGBT en mains.» complète Muriel Waeger. Le paradigme a changé. Si le grand oui du 9 février est certes un bon signal pour le mariage égalitaire, il n’est pas déterminant pour Muriel Waeger. C’est bien cette nouvelle génération qui peut transmuer le mariage «light» en mariage «égalitaire» avec les mêmes droits. Et selon Lise Bailat, le PLR et le PDC seront les partis pivots.

La décision finale dépendra de l’attention que ces derniers prêteront ou non à leur base électorale, qui s’est dite prête pour une totale égalité des droits et des devoirs, mais aussi du travail des associations auprès des membres du Conseil des États qui pourraient se montrer plus conservateurs.

* Article mis à jour avec les nouvelles dates de débat au Conseil national.