L’homosexualité, un «symptôme» à traiter, selon un homéopathe lausannois
Le Dr. Henry, inscrit au registre des médecins genevois, dispense de drôles de théories invitant à soigner les gays et lesbiennes. Le tollé est unanime.
«Du charabia», a résumé le médecin cantonal vaudois Karim Boubaker, sollicité par «20 minutes». Autorités sanitaires et associations étaient partagées entre amusement, consternation et indignation en consultant le site d’un praticien français établi à Lausanne et à Confignon (GE). Médecin généraliste, acupuncteur et homéopathe, le Dr. Jean-Yves Henry est aussi le coordinateur d’une mystérieuse «Faculté francophone de médecine intégrée».
Cette plateforme propose toute une série d’articles touffus sur la prise en charge de diverses conditions… dont l’homosexualité, que l’auteur définit comme «négation de la différence» ou «esquive par rapport à la différence des sexe», des concepts voisins de ceux utilisés par les mouvements chrétiens antigay, comme ceux du prêtre et psychanalyste controversé Tony Anatrella. Plus original, le Dr. Henry détaille ses remèdes homéopathiques pour ses patients gay et lesbiennes, accompagnés de recommandations ésotériques. Pour les garçons, Pulsatilla pour l’«immaturité et demande de dépendance (aime-moi deux fois moi, puisque moi et l’autre c’est pareil)», Platina pour les «problématique de séduction et de domination, NB. si travesti (cf. les drag queens): aspect hystérique surajouté.». Pour les filles, ce sera une bonne dose de sepia pour la «difficulté à rencontrer l’altérité» et de Natrum Muraticum «déteste qu’on la touche».
Nourrir l’homophobie
La mise en ligne de la page remonte à 2009, mais ce n’est que ces dernières semaines que ces élucubrations ont été exhumées du web par une association française, attirant l’attention des médias hexagonaux, notamment de Franceinfo. «Considérer l’homosexualité comme une maladie est une idée reçue encore très tenace, ancrée dans les mentalités. Ces stéréotypes doivent être combattus car ils nourrissent l’homophobie», réagit Joël Deumier, président de l’association SOS homophobie au micro de la radio publique. Quant au Dr. Charles Bentz, président du syndicat national français des médecins homéopathes, il n’est pas tendre avec son confrère: «Ce n’est pas parce qu’on est médecin, qu’on ne raconte pas d’inepties.»
Côté suisse, on s’inquiète surtout que l’homéopathe français – par ailleurs inscrit depuis 2004 comme généraliste dans le canton de Genève – puisse accueillir des jeunes. «Le pire, c’est que grâce à un vide juridique, il exerce la médecine complémentaire dans le canton de Vaud, y compris auprès de mineurs, sans avoir besoin d’autorisation», se désole Mehdi Künzle, président de Vogay.
«Comme le rhume des foins»
Contacté par «360°» la semaine dernière, Jean-Yves Henry s’était contenté de démentir toute velléité de guérir de l’homosexualité. Mais la nuance qu’il exprimait était assez floue: «L’homosexualité n’est pas une pathologie, mais un symptôme particulier (choix de vie) de patients border-line». Joint par téléphone par la RTS, le médecin a répété que «l’homosexualité est un symptôme comme un autre, comme peut l’être le mal à la tête ou le rhume des foins. Je ne comprends pas bien où est le problème.» En attendant, le Département de la santé genevois a indiqué avoir ouvert une enquête sur le praticien.
Du platine contre l’homosexualité
Les justification du médecin français n’est pas sans rappeler celle d’un de ses confrères allemands. En 2011, le Dr. Gero Winkelmann avait suscité un tollé dans son pays en prônant l’homéopathie pour les homosexuels. Il assurait que ceux-ci n’étaient pas malades, «mais en souffrance spirituelle et psychique», et leur prescrivait des microdoses de platine… ainsi que le retour à la prière et à la lecture de la bible.
Est-ce que l’association 360 va porter plainte ? Ce monsieur ne peut pas continuer à être médecin !