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Pas si sexe, drogue et rock’n’roll…

Une enquête menée par Dialogai avec l'Uni de Genève s’est intéressée à l'évolution de la consommation de psychotropes parmi les homosexuels suisses. Elle remet en cause quelques idées reçues.

C’est le sujet chaud du moment. Celui qui fait vendre. Celui qui revient sur le devant de la scène toutes les décennies: les homos, le sexe et leur consommation de drogue. Car les clichés ont la vie dure. Si l’on force le trait des idées reçues sur les gays: ces derniers font plus la fête, ont plus de relations sexuelles et se droguent davantage. Une enquête menée par Dialogai et des étudiants en médecine de l’UNIGE a tenté de tirer tout ça au clair. A l’heure où le chemsex défraie la chronique dans les grandes villes européennes, il était sans doute nécessaire de remettre l’église au milieu de notre village helvétique.

Si de nombreuses études existent quant à l’usage de telles substances par les hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes (HSH) dans les métropoles du continent (lire notre article sur le chemsex à Berlin), il n’en reste pas moins que de telles données manquent cruellement dans nos régions. Rentrons tout de suite dans le vif du sujet. L’enquête s’est tenue dans le cadre des consultations à Checkpoint Genève avec un nombre de 107 répondants dont l’âge médian est de 37 ans. Dans ce cadre, le profil type du sondé est celui d’un homme bien portant ayant plutôt un niveau d’étude au moins universitaire. Près de 85% d’entre eux estiment en outre ne pas avoir de problèmes financiers. Autant dire que la représentativité de la communauté gay dans son ensemble n’est que très limitée dans cette étude. Toutefois, de cette situation prototypique, on peut aisément envisager l’ampleur du phénomène.

Depuis 2002
D’abord, cassons une idée reçue. Non! Même si les gays on plus recourt aux drogues que la population en générale, tous les gays ne se droguent pas pour autant. L’étude a établi que seuls 28% des répondants avaient consommé des drogues et/ou de l’alcool avant ou pendant des rapports sexuels durant les trois derniers mois. Sachez, en outre, que cette étude a été faite en été. Une saison où l’humain a sans doute tendance à se lâcher davantage.

L’objectif de cette nouvelle étude était surtout de savoir si ces chiffres avaient évolués depuis l’enquête Santé Gaie menée par Dialogai en 2002. Et il semblerait bien que non. Prenez, par exemple, la question de la dépendance aux drogues. La proportion de la population gay concernée par cette problématique s’établissait déjà à 7 % au début des années 2000 comme c’est le cas dans cette dernière étude (11 % de dépendants à l’alcool uniquement).

Il n’y a pas de grosses différences dans la consommation de drogues entre hommes gays et bisexuels et la population générale durant la jeunesse. Les jeunes consomment en général beaucoup. C’est plus tard que les choses changent. «Les gays continuent à consommer un niveau élevé de drogues jusqu’à un âge avancé alors que dans la population générale, la consommation diminue après 30 ans. Or, c’est le nombre d’années de consommation comme la qualité des produits qui posent les plus grands risques pour la santé. Rarement en relation de couple et encore plus rarement parents, les hommes gays ont peut-être moins d’obligation de rester sobre pour assurer», suggère Michael Häusermann de l’association Dialogai.

Si le constat à 14 ans d’écart reste le même, les conclusions sous forme de questions tirées en 2002 restent, elles aussi, identiques pour l’association genevoise: «Est-ce que tout ce tabac, cet alcool et ces drogues sont consommés avant tout pour le plaisir? Dans ce cas, cette consommation beaucoup plus importante que dans la population générale est la démonstration d’une maîtrise exemplaire de la situation. Sert-elle au contraire surtout à fuir la réalité, à supporter des situations de stress? C’est alors une toute autre histoire.» Des questions auxquelles personne ne semble avoir de réponses actuellement; si ce n’est que ces aspects doivent être traités dans une approche holistique de la santé des HSH lors des consultations à Checkpoint, incluant notamment les aspects de santé psychique.

Vision tabloïd
A ce stade-ci, une campagne de prévention dédiée à la consommation de drogues illégales ne semble pas à l’ordre du jour. Comme l’affirme Michael Häusermann, «après des décennies d’injonction à la prévention du sida, il est fort vraisemblable qu’une nouvelle campagne de prévention sur les psychotropes ne serait pas bien accueillie dans la communauté. Cela viendrait conforter une vision tabloïd de la santé gaie (sexe, drogue et rock’n’roll) alors que ce ne sont de loin pas les problèmes de santé les plus importants des hommes gays et bisexuels. La consommation de tabac, bien supérieure chez les HSH que dans la population masculine générale, et les 11 % de dépendants à l’alcool posent des risques bien plus graves pour la santé des HSH que la consommation d’autres produits. Si l’on veut améliorer la santé des hommes gays et bisexuels, c’est sur ces deux produits légaux que des actions de prévention sont à réaliser en priorité. C’est dans cette direction que Dialogai veut s’engager en collaboration avec les organismes chargés de cette mission.»

Quoiqu’il en soit, les chiffres montrent tout de même une réalité inquiétante. L’École des sciences criminelles de l’Université de Lausanne, avec deux autres institutions, s’est penchée en 2015 sur les eaux usées de treize villes suisses pour y traquer des traces de stupéfiants consommés. 22 kilos de cocaïne sont consommés par jour en Suisse. Zurich est en haut du podium, Bâle second alors que Genève ferme la marche.

Autre source d’inquiétude: l’apparition et la popularisation de nouvelles molécules comme la méthamphétamine, plus connue sous le nom de crystal meth. Cette substance de synthèse psycho-stimulante figure dans les produits de prédilections de certaines parties fines. Avec un haut taux d’addictivité, un sentiment d’invincibilité et un effet qui peut durer jusqu’à 20 heures, il va de soi que l’usage de cette substance lors de rapports sexuels pose un certain nombre de questions en lien avec la prévention des infections sexuellement transmissibles.

Monitoring
En Suisse, c’est Neuchâtel qui détient le record de consommation avec, selon les autorités cantonales, entre 200 et 300 consommateurs de crystal. Zurich vient ensuite. Malgré le fait que la question d’une campagne de prévention en faveur des HSH consommant des drogues illégales ne semble pas privilégiée pour l’instant, il semble en revanche qu’un monitoring de la qualité des produits en circulation est indispensable. C’est en tous cas dans ce sens que les acteurs de la santé gaie de Zurich se sont investis. Car si la consommation de stupéfiants ne peut pas toujours être considérée comme problématique, la prise de produits mal dosés ou de mauvaise qualité peut avoir, pour sûr, un effet dévastateur sur les consommateurs et les pratiques qui en découlent.