Pour la Journée des droits de l’homme, l’évêque prêche l’exclusion

A la tête de l'un des plus grands diocèses de Suisse, Mgr Vitus Huonder célèbre la Journée mondiale des droits de l'homme en s'en prenant aux homosexuels et aux féministes.

Voilà quelques mois que l’on n’avait plus entendu les vitupérations de Mgr Vitus Huonder. Le bouillant évêque de Coire se faisait-il plus discret sous le règne de François que sous celui de son prédécesseur? Pas du tout. L’ecclésiastique de 71 ans vient de diffuser un texte que l’on croirait tout droit sorti des écrits de la Fraternité Saint Pie X ou des hurluberlus de la Manif pour tous. Il y attaque pêle-mêle les homosexuels, les familles homoparentales, le féminisme, le droit à l’avortement et l’éducation sexuelle, relève la «NZZ am Sonntag». Et tout ceci à l’occasion de… la Journée des droits de l’homme, ce mardi.

Intitulé «Le genre – la profonde fausseté d’une théorie», le texte s’en prend au «genrisme imposé par l’Etat». Un concept qui permettrait à tout être humain, selon l’évêque, de choisir son sexe ou son orientation sexuelle, d’être homme ou femme; de vivre en tant que hétéro, homo, bi ou transsexuelle. Pour lui, le corollaire de cette théorie est«le prétendu droit aux couples de même sexe de se marier et d’adopter des enfants, ou l'(homo)sexualisation (sic) des enfants à la crèche ou à l’école.»

«Les devoirs vitaux de la maternité»
«Livrer (sic) des enfants à des couples de même sexe», les prive, ajoute le prélat, «de la base d’un développement sain». Il continue en prophétisant des «perturbations psychiques» chez l’enfant causées à l’effacement des limites entre les sexes, avant d’argumenter sur les dangers de la «course à l’égalité» qui pourrait se retourner contre les femmes, alors que la société devrait, d’après l’évêque, «veiller à les protéger dans les devoirs vitaux de la maternité».

Dans ce méli-mélo episcopal, Mgr Huonder prend bien soin de prendre position (avant la Conférence des évêques) sur trois initiatives populaires au parfum puissamment réactionnaire, qui devraient bientôt aboutir dans les urnes: le texte contre l’éducation sexuelle précoce, celle contre la prise en charge par l’assurance maladie des interruptions volontaires de grossesse et enfin, l’initiative du PDC «Contre la pénalisation du mariage», qui propose d’inscrire le caractère strictement hétérosexuel du mariage dans la Constitution.

«Niveau café du commerce»
L’appel de Vitus Huonder sonne comme une nouvelle provocation de l’homme d’Eglise, connu pour son soutien aux fractions les plus réactionnaires, voire extrémistes, du catholicisme suisse et européen. Rolf Trechsel, membre du comité de l’association suisse des gays, Pink Cross, dénonce un écrit «niveau café du commerce», truffé d’insinuations, de clichés et de polémiques bon marché: «Lors d’une discussion avec des professionnels notre bon évêque ferait pâle figure. Qu’un tel populisme de bas étage émane du diocèse endommage l’image de l’Eglise.» A Amnesty international, on est estomaqué que le prélat ait pris la Journée internationale des droits de l’homme comme prétexte pour «appeler les croyants à discriminer les gays et les lesbiennes», note le «SonntagsBlick». Le porte-parole de Huonder a répliqué que c’était «l’Eglise catholique elle-même qui était discriminée» par les revendications du «lobby homosexuel».