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La ville en trompe-l’œil de Robert Walker

Le Musée de l’Elysée fait le plein de lumière en accueillant les œuvres récentes du photographe canadien. Hauts en couleur, ses clichés dénoncent la publicité qui, à grande échelle, pollue toujours un peu plus l’espace urbain.

La dernière exposition de Robert Walker s’intitule Color is power. D’emblée, le ton est donné: chez Walker, la couleur est toujours éclatante, violente. Elle explose littéralement dans la trentaine de photographies qui ont investi le Musée de l’Elysée à Lausanne. Chacune d’entre elles est conçue comme un tableau et témoigne de la forte influence exercée sur l’artiste par la peinture. Les couleurs et la thématique des images rappellent le message critique des artistes du Pop art, leur caractère abstrait, celui des peintres du Colourfield. Walker aime d’ailleurs se référer à Ellsworth Kelly ou James Rosenquist lorsqu’il tente de définir son propre travail.
N’y voyez là aucune nostalgie. Point de romantisme chez Walker. L’homme ne fait pas dans la photographie d’art au sens traditionnel du terme. Fasciné par le paysage urbain, le photographe s’emploie à refléter une réalité en même temps qu’il la dénonce. L’infiltration de la publicité dans notre environnement va, selon lui, toujours croissant. L’ensemble de son travail est donc à considérer sous l’angle d’une critique de la société de consommation productrice «d’images publicitaires, symboles du pouvoir économique». Le phénomène est à ce point important qu’une confusion entre l’espace urbain et le fictif, entre le réel et l’espace médiatique, finit inévitablement par se créer.
Dans l’objectif de Walker, cette réalité se traduit par une totale négation de la perspective traditionnelle. Les différents plans se juxtaposent, s’obstruent les uns par rapport aux autres, le bleu du ciel prolonge celui des panneaux publicitaires, créant ainsi des images plates qui rendent difficile la distinction entre réalité et fiction.
Pourtant, selon Robert Walker, le danger ne réside pas tant dans l’échelle surdimensionnée des publicités actuelles que dans la véritable tyrannie de la couleur qu’elles nous imposent. C’est précisément dans cette optique que le titre de l’exposition Color is power, qui est aussi, soit dit en passant, le slogan d’une publicité pour les cosmétiques Avon, doit être interprété.
La couleur n’est-elle pas, en effet, le meilleur moyen commercial que l’on ait trouvé pour attirer l’attention des consommateurs potentiels que nous sommes? Finalement, le photographe ne fait que reprendre, en le détournant, un système utilisé à outrance par les multinationales.
Toujours dans cette même optique, Walker pratique une esthétique du patchwork avec les slogans publicitaires, sur lesquels il porte un regard ironique. Coupés, réassemblés non sans humour, les messages qui nous assaillent quotidiennement sont alors investis d’un sens nouveau.
Ce chasseur d’images est constamment à l’affût. Travaillant toujours en instantané, il immortalise des situations cocasses créées par les immenses panneaux publicitaires. Jamais recadrés, ses clichés dégagent une grande spontanéité en même temps qu’ils témoignent d’une formidable capacité à voir.
Personnage cosmopolite, Robert Walker a promené son œil de lynx dans de nombreuses métropoles telles Las Vegas, Paris ou Montréal. C’est néanmoins dans le célèbre quartier de Times Square, où il a résidé de 1978 à 1988, qu’il puise l’essentiel de son répertoire iconographique. Quel autre endroit au monde symbolise aussi bien le mythe de la puissance commerciale? Le quartier exerce sur lui une véritable fascination. «Ce qui m’attire, dit-il en riant, c’est le renouvellement constant de l’environnement. Le prix de l’emplacement est si élevé que même les plus grandes entreprises n’ont pas les moyens d’y rester longtemps!»
En trente ans de carrière, Robert Walker a réalisé des centaines de clichés. Formé à l’école des Beaux-Arts du Canada, il s’est très vite orienté vers la photo. Aujourd’hui internationalement reconnu pour sa maîtrise de la photographie et sa capacité à renouveler constamment son œuvre, il a été l’un des premiers à comprendre le potentiel de la couleur. Au cours d’un stage de photographie de rue avec Lee Friedlander en 1975, il a pris conscience que seule la couleur était désormais capable de rendre compte de la complexité du paysage urbain.

Jusqu’au 25 janvier 2004
Musée de l’Elysée, 18, avenue de l’Elysée, Lausanne