Neuchâtel

Rainbow Warriors Tour

ven 3 mai, 22:00
La Chaux-de-Fonds

Bang! Bang!

mer 15 mai - sam 25 mai
Lausanne
#Musique

Ventura Profana

ven 3 mai, 20:30
Genève
#Installation

La Maison de Dorothy

jeu 25 avril - sam 4 mai

Séropos: amalgames douteux à l’hôpital

L’Hôpital Cantonal de Genève aurait-il tendance à assimiler les séropositifs à des toxicomanes? C’est ce qu’a découvert avec stupéfaction un patient dans son dossier médical.

C’est une étrange surprise que l’Hôpital Cantonal de Genève a réservé à Philippe (prénom fictif) cet été. Au mois de juin, le jeune homme se rend aux urgences pour une plaie infectée à la main. Au moment de son admission, il signale qu’il est séropositif. Un médecin lui demande alors si son infection est consécutive à une injection. Philippe répond par la négative. Il précise même – puisqu’on lui a posé la question – que sa séropositivité n’est pas due à la toxicomanie et qu’il a contracté le virus lors de rapports sexuels. Il passe ensuite une semaine au service de chirurgie, puis rentre chez lui. Quelques jours plus tard, Philippe retourne à l’hôpital pour y faire changer son pansement. C’est alors qu’il fait une stupéfiante découverte: en attendant tranquillement son tour, il feuillette son dossier médical, laissé en sa présence. Il constate alors, effaré, qu’on l’a catalogué d’office comme toxicomane…

Aussitôt, Philippe demande à l’infirmier présent de modifier cette mention. «Il a refusé. Alors j’ai insisté auprès du chirurgien qui m’avait opéré pour qu’il s’en charge. L’infirmier a finalement corrigé le tir», raconte aujourd’hui Philippe, qui n’a toujours pas digéré cette histoire. «Ce qui est frappant, c’est que le médecin n’avait même pas l’air de comprendre pourquoi cela pouvait m’énerver autant! Je suis ensuite allé faire la même remarque aux infirmières qui m’avaient traité. L’une d’elles m’a répondu qu’il lui avait semblé, après deux jours, que je n’étais pas toxicomane. J’aurais vraiment apprécié qu’elle me fasse part de ses pensées à ce moment-là!»

Pour Philippe, les explications fournies par les médecins et infirmières restent bien légères. «Il est déjà pesant de déclarer sa séropositivité à un inconnu, même à l’hôpital. Si en plus de cela on doit passer pour un junk auprès de tout le personnel soignant et parfois affronter des regards méprisants, ça devient insupportable».

L’affaire est d’autant plus surprenante que Philippe a appris qu’un de ses copains avait eu la même mésaventure. Porte-parole de la direction de l’Hôpital Cantonal de Genève, Mme Hutin affirme n’avoir «jamais été informée de ce problème d’assimilation». Elle reconnaît qu’il doit être très «pénible de le subir», mais ajoute que les médecins ne font «ni amalgame, ni discrimination». Selon ses explications, on comprend qu’il est possible d’admettre quelqu’un à l’hôpital avec la mention «toxicomane», même si celui-ci soutient le contraire. Et la porte-parole d’expliquer que les toxicomanes nécessitent «une attention particulière, notamment pour éviter les vols de médicaments»… Bref, en cas de doute, le médecin n’hésite pas à estampiller un patient «toxicomane» dans le but d’éviter tout problème.

Neutre dans cette affaire, Vincent Grelloz, médecin à l’hôpital de Morges, arrive à comprendre d’où peut survenir le bug: «Le personnel d’un établissement, spécialement lorsqu’il s’agit d’un «navire» de la taille de l’Hôpital Cantonal, n’échappe pas aux idées reçues et autres raccourcis maladroits. Il est certain que la répétition de semaines de soixante heures n’est pas favorable à une approche psychologique. Cependant, un malade, quel qu’il soit, ne devrait pas avoir à en pâtir».

Les explications de l’Hôpital Cantonal de Genève suffisent-elles à expliquer – et surtout excuser – que l’on fasse l’amalgame entre séropositivité et toxicomanie? Philippe n’en est pas convaincu. Il se demande même si le manque de psychologie à l’égard des séropos n’est pas une maladie chronique à l’hôpital: «On m’a demandé à voix haute et devant d’autres patients si j’étais séropositif! Cela fait plus de dix ans que je sais être atteint par cette maladie et j’ai fini par l’assumer. Mais je n’ose pas imaginer la réaction d’un jeune pour qui tout cela serait aussi nouveau qu’effrayant. Approché de manière aussi brutale, aurait-il le courage d’annoncer spontanément sa maladie? S’il y a danger, c’est peut-être bien là qu’il réside.»

Mme Hutin rappelle que n’importe quel patient, muni d’une pièce d’identité, a le droit de consulter son dossier médical. Au vu du témoignage de Philippe, cela peut en effet s’avérer fort utile…