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Le vagin au naturel

Faut-il avoir un vagin garanti naturel pour être une femme? Une bite d’origine pour être un homme? Les problèmes rencontrés par les personnes transsexuelles soulèvent la question.

Nous avons récemment reçu à la rédaction de 360 une copie d’un échange épistolaire entre le gérant d’un sauna gay romand, qui organise à l’occasion des soirées mixtes, et une cliente insatisfaite. Le litige portait sur le fait que la personne en question, ainsi qu’une amie qui l’accompagnait, se sont vues refuser l’entrée à prix réduit, pourtant promis à la gent féminine qui fréquente l’établissement. La raison invoquée par le responsable du lieu est simple: Pascale et Claude* ne sont pas des «vraies» femmes, du moins «…pour l’instant». Plus loin on peut lire: «Nous vous considérons comme des hommes transsexuels…». Arguments venant justifier le fait d’appliquer le tarif homme à ces clientEs. En effet, bien que Claude et Pascale vivent depuis des années leur identité féminine au quotidien, elles n’ont pas subi une ablation de leur membre viril. Au-delà de tout jugement quant au fond de l’affaire, cette anecdote met le doigt sur des problèmes souvent rencontrés par les personnes transsexuelles, que ce soit à l’entrée de saunas, de boîtes ou d’associations: faut-il avoir un vagin naturel pour être considérée comme une femme? Une bite garantie 100% d’origine pour être reconnu comme un homme?

Il est peut-être utile de rappeler que plusieurs transsexuels des deux sexes ne vont pas jusqu’au bout des interventions requises pour les rendre à cent pour cent conformes au sexe revendiqué. Parce qu’il leur en coûte trop, à tout point de vue, mais aussi parce qu’il n’est pas évident que d’aller «jusqu’au bout» soit dans tous les cas nécessaire ou recommandé. Les individus à demi transsexués constituent dès lors un sexe intermédiaire, en marge des sexes que l’on pourrait dire conventionnels. Il semble que pour ce tenancier de lieu de plaisirs, le fait d’être une femme se résume à avoir un vagin entre les jambes! Or, notre genre, qui contrairement à notre sexe biologique est d’ordre psychologique (un sentiment d’appartenance), culturel et social (les attentes et le regard des autres), précise et confirme qui nous sommes en tant qu’être sexué. Ce qui frappe dans la réponse adressée à Pascale, ce n’est pas tant qu’on lui refuse une réduction du prix d’entrée, mais plutôt qu’on lui assigne une identité dans laquelle elle ne se reconnaît pas.

Au-delà de son caractère anecdotique, l’histoire de Claude et Pascale rappelle également à quel point nous vivons dans un régime d’apartheid sexuel: les femmes sont comme ceci, les hommes, comme cela; les hétéros comme ci, les homos comme ça; on se doit d’être masculin ou d’être féminin, toujours en conformité avec notre sexe biologique. Les catégories de sexe, de genre et d’érotisme apparaissent encore aujourd’hui à ce point évidentes et indiscutables que la plupart d’entre nous se font un devoir de correspondre aux identités qui leur ont été assignées selon notre biologie, notre apparence ou nos attirances. Nous offrons généralement peu de résistances aux grands découpages de l’humanité résultant des classifications binaires et simplistes que l’on suppose incontournables. Alors bravo et merci à tous les mutants et dissidents de l’intégrisme identitaire qui offrent un exemple de résistance aux grands découpages de l’humanité résultant des classifications binaires et simplistes que l’on suppose incontournables.

*prénom fictif