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Le journal de l’ONU se ridiculise

L’ONU est prompte à défendre l’égalité des droits, mais le magazine UN-Special, distribué aux employés de nombreuses organisations internationales, refuse de publier une petite annonce destinée à faire connaître l’existence d’un groupe de rencontre pour les homos internationaux.

Depuis quelques mois déjà, le pôle social de l’association 360 compte un groupe réunissant des gays et des lesbiennes pour la plupart anglophones et employés dans des organisations internationales. Pas facile en effet quand on est homo, qu’on débarque à Genève en ne parlant pas ou peu le français, de s’intégrer et de rencontrer des semblables. Le GIG (Gay International Group), créé il y a sept ans déjà et qui compte 160 membres, et le LIG (Lesbian International Group) leur permettent de se retrouver. Sous l’impulsion de Yves de Matteis, ils ont rejoint voici quelques mois le pôle social de l’association 360.

C’est donc de façon logique que cette double entité avait décidé de faire connaître davantage encore son existence dans les milieux internationaux. Pour cela, Yves de Matteis faisait parvenir début septembre à «UN Special», le journal des fonctionnaires de l’ONU, une annonce en anglais, libellée comme suit:

Gay International Group
Lesbian International Group

• French isn’t your mother tongue and you find it difficult to make friends in Geneva?

• You speak some French and would enjoy meeting gay or lesbian compatriots or friends from all over the world

• You’re French speaking and wish to meet people from all over the world

• You’d like to make more friends or… for any other reason

Then join the gay or the lesbian international group (200 members from more than 80 countries)!
The members of these informal groups meet once or twice a month for brunches, barbecues, dinners, parties, etc.

For any information
gig@360.ch or lig@360.ch

L’annonce était destinée à paraître dans le numéro d’octobre et, selon Yves de Matteis qui s’était assuré que le journal avait bien reçu le matériel nécessaire, tout semblait en ordre. Première étonnement lorsque le responsable du GIG découvre dans le numéro d’octobre que la petite pub n’y figure pas. Et il n’est pas au bout de ses surprises: si l’annonce n’a pas passé, lui explique l’entreprise responsable de la publicité pour «UN Special», c’est parce que le comité de rédaction – dont la tâche semble surtout proche d’un comité de censure – a décidé qu’elle n’était tout simplement pas publiable! Motifs: «les mots «gays» et «lesbiens» ne sont pas assez discrets, il n’y a pas de numéro de téléphone et la formulation “ainsi que toutes personnes intéressées” est ambigüe». Au sujet du troisième point, Yves de Matteis affirme que l’entreprise en charge de la publicité lui a aussi laissé entendre qu’«on pouvait penser à d’éventuelles «orgies» ou autres contacts sexuels qui pourraient avoir lieu dans ce cadre». On croit rêver!

«Pour faire preuve de bonne volonté, poursuit Yves de Matteis, j’ai donc revu le texte, apporté des modifications dans le sens désiré (sauf le numéro de téléphone pour ne pas être harcelé par des appels homophobes) en mentionnant même que le groupe était ouvert à tout le monde et l’ai renvoyé à la rédactrice en cheffe déléguée de UN Special. Cette dernière, il faut le préciser, était dès le départ tout à fait disposée à difuser l’annonce. Ce sont certains membres du comité de rédaction, l’organe chargé de contrôler les contenus, qui font barrage. Et bien, cela ne s’est pas arrangé puisque celui-ci campe sur ses positions, malgré les modifications.»

Et l’affaire, pour le moins cocasse, n’est pas terminée: voilà que la petite annonce mobilise maintenant un staff de juristes de l’ONU et de l’OMS, ceux-ci étant chargés d’examiner à la loupe les statuts du journal et de rendre un verdict quant à la conformité de la décision prise par le comité de rédaction! Une chose est d’ores et déjà certaine: la position du comité de rédaction ridiculise l’ONU à l’heure où ses agences, dans de multiples domaines des droits humains, se battent désormais également contre les discriminations des homosexuels. Peut-être devrait-on songer à éduquer aussi certains de leurs fonctionnaires…