La virtualité, le terrain de jeu des ados homos?
Les homos émergent toujours plus jeunes sur la scène communautaire. Entre 15 et 18 ans, n’ayant pas accès au monde des adultes, ils tissent leurs propres réseaux par Net interposé.
Aujourd’hui, avoir 15 ans et découvrir son homosexualité s’avère une situation bien différente de celle que connurent les adolescents il y a dix ans. En premier lieu, notons que les jeunes homos sont davantage à faire leur coming out, et ce dès 14 ou 15 ans – des situations encore marginales naguère. Il faut percevoir dans ce phénomène une répercussion directe de l’accroissement de la visibilité des minorités sexuelles et la plus grande tolérance des sociétés occidentales à leur égard. En Suisse romande, l’association Vogay a récemment vécu la dissolution de son groupe Jeunes (18-25 ans) et presque simultanément, la création d’un groupe Ados (16-18 ans). En effet, les jeunes adultes assumant leur orientation homosexuelle sont mieux armés qu’auparavant, s’aventurent sans états d’âme dans leurs vies sociale et amoureuse et surtout, ne trouvent plus forcément leur compte au sein des structures militantes. Il n’en va pas de même chez les16-18 ans.
Entre réalité et virtualité
Autour d’une bouteille de Denner Citro, nous avons rencontré quelques membres du groupe Ados de Vogay. Mathieu, 17 ans, apprenti aux CFF, explique son intérêt pour ce groupe: «Ici, on se retrouve entre jeunes du même âge. On a les mêmes sujets de conversation.» Nous évoquons avec Loïc, Damien et Yanick, en l’absence regrettée des deux filles du groupe, les sujets qui leur tiennent à cœur: le coming out (pour chacun une expérience positive), leurs parents chez qui ils vivent, l’école, la minorité et bien sûr l’amour. Au cours de cette conversation, force est de reconnaître qu’Internet est le moyen de communication par excellence chez les jeunes homos et qu’il jalonne leur parcours de manière primordiale. Mathieu: «J’ai rencontré mon ex-copain sur le site «sortirensemble.com» qui est réservé aux moins de 18 ans. Et c’est comme ça que j’ai connu le groupe Ados.» Et chacun de narrer ses anecdotes liées au Net. Les chats et autres forums sont des médias assidûment fréquentés, même si d’aucuns déplorent leurs dangers, comme Yanick: «J’avais fait une rencontre et lors du rendez-vous, je me suis retrouvé avec un mec de 35 ans. Il avait menti sur son âge.». Damien, apprenti droguiste, corrige: «Il y a des pervers partout.»
Internet est aussi le royaume du jeu en réseau, auquel les ados s’adonnent frénétiquement. Chacun assis face à son écran interprète un personnage figurant dans un jeu de société en direct sur le Web. Si le «gender bending» (le fait de prétendre être d’un autre sexe lors de partie en réseau) est un phénomène répertorié et bien connu, on sait moins que certains ados homos se croisent au détour de jeux tels que Quake 4, Battlefield 2, Half life 2, Doom 3. Parmi eux un Fribourgeois, Sylvain, 16 ans, qui ne décolle pas de son ordinateur et qui n’a jamais entendu parler du groupe de Vogay, mais qui se déclare «éventuellement intéressé par une visite». Entre rencontres réelles et virtuelles, les ados homos sont ni plus, ni moins que les autres le reflet de leur époque, mais à quoi aspirent-ils? «Il faut du romantisme, c’est pour ça que la vie est belle.», conclut Loïc chez Vogay. Dans le fond, quelque chose a-t-il vraiment changé?
Lire aussi l’article «Coming out la galère des ados»
www.vogay.ch/jeunes
www.sortirensemble.com