Le sponsoring d’un marchand d’armes ternit le gala LGBT
L'organisation suisse des lesbiennes LOS s'est retirée des Swiss Diversity Awards après avoir appris le soutien de Ruag, leader helvétique de l'industrie de défense, et du cigarettier JTI à cette remise de trophées.
L’événement est passé quelque peu inaperçu en Suisse romande. Samedi le Kursaal de Berne a accueilli la deuxième édition des Swiss Diversity Awards. Ces récompenses décernées sous la houlette de l’association nationale des gays Pink Cross ont distingué des individus et des organisations engagées pour «la diversité et l’inclusion sous toutes ses formes, partout en Suisse».
Ce gala plutôt feutré et chic (smoking et robe du soir de rigueur) a notamment vu le Zurich Pride Festival, le service de soutien aux jeunes Du-Bist-Du ou encore la conseillère nationale bâloise Sibel Arslan recevoir un trophée.
La fête a toutefois été ternie par le retrait à la dernière minute d’une des organisations nominées dans la catégorie LGBT+. Comme le relèvent le magazine «Mannschaft» et le blog Stinknormal, l’Organisation suisse des lesbiennes LOS a décliné l’invitation dans une lettre intitulée «Une décision difficile». Le comité et la direction de la LOS pointent du doigt les deux principaux sponsors de la manifestation: le cigarettier Japan Tobacco International (JTI), dont le siège est à Genève, et surtout Ruag, leader helvétique de l’aérospatiale et de la défense.
Détourner l’attention
Cette dernière entreprise (propriété de la Confédération) est une nouvelle venue dans le club des sociétés s’affichant comme gay-friendly. Or, elle est régulièrement accusée d’exporter du matériel de guerre vers des zones de conflit et des pays hostiles aux droits des femmes et des LGBTQ+, à commencer par les monarchies du Golfe, comme le rappelle la LOS. Pour ce qui est de JTI, la lettre met en avant le fait que les lesbiennes sont particulièrement nombreuses à souffrir de la dépendance au tabac. Ces sociétés «se vantent d’être les amis des LGBT, et ce faisant détournent l’attention du fait qu’elles font des choses problématiques».
La question du pinkwashing – et en corollaire celle des ressources des groupes militants – agite de plus en plus la communauté LGBTQ+, en Suisse comme ailleurs en Europe. Côté romand, le débat ne s’est amorcé que l’an dernier, avec la présence remarquée de plusieurs grosses banques et sociétés internationales dans le défilé de la Geneva Pride, ainsi que parmi les sponsors de la manifestation, suscitant des critiques chez certain·e·s participant·e·s.
Félicitations à la LOS pour sa décision conséquente, et merci à 360 pour la diffusion. Cependant il faut corriger un peu les faits : la question du pinkwashing est bien thématisée en Suisse romande depuis bien plus longtemps que l’année dernière, comme le montre par exemple l’article suivant, relayé par 360 lui-même, en 2016:
https://360.ch/revue-de-web/38023-pinkwashing-quand-la-defense-des-lgbt-sert-la-xenophobie/