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«On est réduits à l’état de gode noir: tu l’achètes, puis tu le caches sous ton lit»

«On est réduits à l’état de gode noir: tu l’achètes, puis tu le caches sous ton lit»

Le vaste mouvement actuel de dénonciation du racisme touche aussi le porno gay. Race Cooper, ancienne star des studios Raging Stallion, raconte une discrimination «constante et quotidienne».

En prenant sa retraite du X, en 2016, Race Cooper avait juré qu’il n’avait «aucun regret». La prise de conscience actuelle a apparemment fait changer d’avis le performeur afro-américain d’origine canadienne. Il a confié au site britannique PinkNews qu’il gardait un souvenir amer de sa carrière au sein des studios Raging Stallion, au début des années 2010. Il était alors l’unique employé noir de l’entreprise, en tant que directeur de casting, et l’unique acteur noir sous contrat exclusif. Aujourd’hui, à 46 ans, il considère que sa présence aura surtout servi à escamoter le racisme «constant et quotidien» dans le studio.

Cooper, qui avait de l’expérience dans l’univers de la télé et du cinéma mainstream, a été particulièrement choqué que l’on pose aux performeurs la question de savoir s’il y avait des catégories d’hommes avec lesquels ils ne souhaitaient pas travailler. «Ces questions étaient suivies d’encouragement des producteurs et réalisateurs à répondre sincèrement et précisément. Ce type de demande serait immédiatement bannie et reconnue comme raciste dans l’industrie de l’audiovisuel. Mais pas dans le porno, où c’était la routine.»

Moindre valeur
Les inégalités étaient criantes au niveau salarial. Cooper se souvient par exemple de l’embauche d’un jeune homme blanc. «Il avait 15 ans de moins que moi, aucune expérience, mais avait reçu d’emblée 200 dollars de plus par tournage. Même pour les scènes fetish, d’ordinaire un peu mieux payées, je touchais moins que n’importe lequel des acteurs blancs.» La conclusion était facile à tirer: «Les personnes noires valent moins.» Quand Raging Stallion a fusionné avec Falcon Studios, et que la nouvelle entreprise s’est retrouvée avec deux directeurs de casting, c’est naturellement lui qui a été remercié.

Dans les productions elles-mêmes, l’ancien acteur dénonce une fétichisation dégradante. Le plus souvent, les scénarios renvoyaient les acteurs noirs à des rôles stéréotypés, souvent celui de la brute ou du voyou… voire à l’acronyme «BBC», pour «big black cock». «L’humain doté d’une âme est réduit à l’état de gode noir: tu l’achètes, tu le possèdes, et tu le cache sous ton lit pour une fois où tu auras la trique et que tu te sentiras seul», résume Cooper. Au final, «cela a un impact sur les personnes, qui ne se sentent valorisés que dans la gratification sexuelle qu’elles apportent aux Blancs.»

Racisme décomplexé
L’indignation provoquée par la mort de George Floyd et l’élan du mouvement Black Lives Matter a donné lieu à de nombreux messages de solidarité, dans le porno gay comme ailleurs. Il n’empêche que ce milieu ne manque pas de personnalités revendiquant leur racisme (on pense aux tweets de la porn-star Billy Santoro) et leur soutien aux dérapages du président Trump.

«Il est temps de nettoyer la maison. Bien que Black Lives Matter se concentre sur la brutalité policière, la façon dont nous considérons et traitons les autres sexuellement et interagissons avec eux doit également être abordée», lance Cooper, qui appelle à un véritable engagement des studios pour la diversité et à la mise en place d’une politique de promotion des acteurs de couleur.

Perplexité
Publié il y a quelques jours, le témoignage de Cooper ne fait pas l’unanimité dans la communauté queer afro-américaine. D’autres prises de position d’acteurs non-blancs comme Armond Rizzo, Rogan Hardy ou Max Konnor ont été également critiquées. Sur les réseaux sociaux, certains internautes sont perplexes devant des prises de position jugées tardives ou opportunistes, après des années de participation à un système discriminatoire et alors que le racisme dans l’industrie du porno – homo comme hétéro – a fait l’objet de dénonciations régulières ces dernières années.

«Ces acteurs n’ont rien fait d’autre que de dresser les LGBTQ pro-black les uns contre les autres avec leur carrière», pouvait-on lire sur le compte @justxhenry.