Nemo: la surdité des médias romands
Vu de l’étranger, ça a de quoi donner le vertige. Que ce soit le service public suisse ou la presse dite de référence, les médias romands n’hésitent pas à mégenrer Nemo, l’artiste queer qui représente la Suisse lors de l’Eurovision 2024.
Vu de l’étranger, ça a de quoi donner le vertige. Que ce soit le service public suisse ou la presse dite de référence, depuis plusieurs jours, les médias romands n’hésitent pas à mégenrer Nemo, l’artiste queer qui représente la Suisse lors de l’Eurovision 2024. À maintes reprises, Nemo a clairement exprimé son désir de s’identifier par des pronoms neutres ou, faute de mieux, d’utiliser son prénom. Qu’à cela ne tienne, les quotidiens romands emploient le masculin pour évoquer – comble de l’illogique – «le Biennois non binaire»!
Par quel cafouillage intellectuel ces plumes peuvent-elles parler d’un «voyage ferroviaire vers la non-binarité» tout en s’acharnant à attribuer un genre à l’interprète? N’ont-elles rien compris à sa chanson, The Code, qui dit précisément tout l’inverse? N’ont-elles pas vu sa performance sur scène qui montre, avec exubérance et simplicité, avoir «brisé le code» des genres?
Le privilège de définir l’autre
Manifestement, la signification même de la non-binarité n’a aucune portée dans ces articles. Pire, c’est bien le signe du privilège que de pouvoir définir l’autre. Bref, quel que soit le résultat de Nemo lors de la finale à Malmö, son existence incomprise au cœur de l’actualité romande a un avantage: Nemo indique le long chemin qu’il reste encore à parcourir afin que nous puissions tou·te·x·s être dit·e·x·s et représenté·e·x·s comme nous l’entendons.