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Pop music du Mésozoïque

L'Anglais T.E.E.D, pour Totally Enormous Extinct Dinosaurs, se place en nouvel emblème d'un répertoire électronique et rétro-futuriste. A découvrir lors d'une double étape en Suisse.

Poids plume, un pseudo de lézard géant, et des sonorités ovipares qui ont irrésistiblement envahi l’écosystème musical de 2012. T.E.E.D., alias Totally Enormous Extinct Dinosaurs, c’est un producteur et DJ anglais de 29 ans dont le premier album, «Trouble», renvoie au Paléolithique toutes les autres tentatives de métissage entre pop et techno. Ne manquez pas les deux prochaines haltes helvétiques du menu jeune homme, qui promène à la fin du mois ses taches de rousseur, ses parures d’Indien et ses écailles rétractables du côté de Zurich et Bâle.

Addictive mélancolie
«Trouble» s’écoute comme une collection de tubes acidulés, profondément synthétiques dans leur substance mais d’une immédiateté typiquement pop, inscrits dans les espaces d’une certaine avant-garde britannique inaugurée par les pionniers Hot Chip et Metronomy. Une musique qui séduit par la maîtrise affichée de sa propre archéologie: technoïde par la précision de sa frappe, disco au travers de son groove pailleté, et délicieusement nostalgique dans son traitement de la voix et du songwriting. «Cette tristesse, cette mélancolie, c’est un héritage de la dance music», confiait récemment T.E.E.D. à nos confrères du magazine «Tsugi». «Aller en club, ça signifie s’y préparer, s’y projeter, boire des coups … Que tu passes ou non du bon temps, il y aura toujours une descente. Même quand tu lèves les bras au ciel, tu penses ‘merde c’est bientôt lundi’ ou un autre truc moche. Nous sommes accros à cette mélancolie car au fond de nous, nous l’adorons.»

Formation classique
Derrière les instincts festifs et reptiliens, presque une démarche philosophique. C’est que le dinosaure junior n’a pas éclos dans n’importe quelle famille. fils d’un professeur de musique et chef de choeur à l’Université d’Oxford, Orlando Higginbottom de son vrai nom gravit patiemment les échelons d’une formation strictement classique. Il chante chez Papa, aborde le piano par les gammes et les arpèges, sculpte son oreille chez Mozart, Bach et Gerschwin.

Et puis, aux premières heures de l’adolescence, son grand frère l’initie aux musique électroniques. Orlando trempe dans les hypnoses de la «jungle», fricote avec l’indie rock, avant de se passionner pour le proto-hiphop de DJ Shadow ou Unkle. Comme un écho à son goût pour les multiples généalogies qui l’animent, il se choisit un nom préhistorique, «ridicule, ni cool, ni underground, quelque chose qui sonne à part des trucs que les journalistes peuvent mettre dans une case.»

Remixes pour Gaga et Katy Perry
Repéré par Joe Goddard, l’emblématique barbu de Hot Chip, Orlando ne tarde pas à se faire remarquer par les cadors de la BBC (Annie Mac et consort) lorsqu’il sort «Household Goods», single délicatement pulsé, habité par un brin de voix sucré et rafraîchissant comme un bonbon cassis- hibiscus. Viennent ensuite deux remixes pour Lady Gaga («Marry the night») et Katy Perry («fireworks») qui parviennent presque à redonner un semblant de crédit aux deux impératrices surmédiatisées du showbiz.

Depuis, T.E.E.D. parcourt le globe armé d’un live set modeste par les moyens mais flamboyant par l’énergie, customisé à coup de coiffes réfléchissantes, de costume de tricératops et de danseuses perruquées. De quoi garantir la survie et l’expansion de l’espèce, assurément.

» «Trouble», par T.E.E.D. (Polydor).
» T.E.E.D. en concert le 30 novembre au Härterei de Zurich, www.haertereiclub.ch, et le 1er décembre au Hinterhof de Bâle, hinterhof.ch