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Róisín, une diva en devenir

Avec «Ruby Blue», un premier album solo mystérieux et scintillant, Róisín Murphy parvient à s’affranchir avec bonheur de dix ans passés au sein du groupe Moloko. Attrapée au vol lors de son passage à Fribourg le mois dernier, elle nous parle de fugues nocturnes, de son complice Matthew Herbert, et des joies de ne pas être (tout à fait) une diva.

Affalée dans un sofa de troisième main, elle tient plus de l’ado boudeuse que de la diva volcanique. Il faut dire qu’à quelques heures de son concert au Fri-son, Róisín Murphy (prononcer «row-sheen», à l’irlandaise) dé-stresse. Elle évoque comment il y a quelques années, elle s’était retrouvée en armure, sur quelque cime helvétiquement enneigée, à traire une vache: «On l’avait fait venir de l’autre côté du pays, puis montée en ski-lift, c’était la préférée du paysan qui pour l’occasion avait amené un tonneau de whisky.» Des souvenirs doux-amers, car l’aventure de Moloko est bien loin, après la rupture – à la ville comme à la scène – du duo en 2003. La vie en solo a donc commencé pour Róisín avec un album foisonnant, aux allures de parcours initiatique, «Ruby Blue»: «Pour donner mon état d’esprit à l’époque, j’ai passé deux ans à Londres, très isolée, pour tenter de reconstruire ma vie et de m’en sortir par moi-même. En fait, une partie du disque s’est faite sans même m’en rendre compte – c’est quasiment à mi-chemin que je me suis dit que cela ferait un album.»
Musicalement parlant, le disque porte la patte de Matthew Herbert (Róisín charrie: «Oh, Matthew est une icône gay, maintenant?») qui a mis en place un véritable dispositif pour l’enregistrement: «Tout s’est fait dans une toute petite chambre – de la taille de cette loge. Ce n’est pas du tout le type de travail que j’avais fait jusque là, où l’on travaillait sur les instruments, puis on « transplantait » le tout dans un grand studio. Là, l’album tient dans cette petite pièce: toute l’ambiance, toute la personnalité de ces quatre murs … avec cette manière que Matthew a de travailler avec des bruits qu’il trouve dans la pièce. En cela, toute la chambre est dans l’album. C’est tout un monde.»

Un «album de nuit»
L’inventivité et l’éclectisme de Herbert l’a suivie pas à pas: «Matthew n’est pas seulement un pionnier ou un sorcier, mais c’est vraiment quelqu’un qui possède une culture et un savoir-faire musical extraordinairement vastes. Ce disque ne ressemble à aucun autre qu’il ait fait jusqu’à présent. Je crois qu’il m’a vraiment étudiée, il m’a beaucoup parlé pour savoir ce que je voulais, ce qui se passait dans ma tête et dans ma vie – bref, il l’a taillé à ma mesure.» Le résultat défie les genres musicaux: de la dance, du rock, de l’électro? «…de la nuit: un « album de nuit! » un club de jazz, une disco, des danses rituelles, un bar à deux heures du matin… des fugues nocturnes. Pour moi, c’est là que l’on est le plus soi-même, parce que le jour, bien sûr on « fonctionne », on est pris dans l’habitude. La nuit, on s’échappe, on disparaît – c’est de ça que parle le disque.»
Sur scène, Róisín alterne les numéros de furie, de clown et de diva: «J’exprime des extrêmes dans ce que je fais, mais j’essaie de maintenir un équilibre, comme un arrangement floral… Pour le glamour, c’est juste que j’adore ça.» Elle montre avec malice la penderie pleine à craquer de robes et costumes, tous plus improbables les uns que les autres. «Mon excuse est que quand je le fais, je le montre sous sa forme la plus extrême: les paillettes, tout ce qu’il y a de plus brillant, de plus scintillant, de plus nocturne, de plus… c’est la forme de représentation la plus honnête qui soit. Ça mène le public à se demander qui je suis, à gratter la surface. C’est tout le contraire d’une distance que je chercherais à instituer.» Et les fans, qui la suivent et dont elle s’émerveille qu’ils soient aussi nombreux et différents les uns des autres: «Ça me plaît, ça me prouve que finalement, la musique que je fais n’est pas ciblée, qu’elle n’est pas destinée à un « marché » particulier. Du coup, je fais ma Dolly Parton, je leur signe des autographes, je rencontre du monde après les concerts… il ne me manque plus qu’un grand jardin avec un auvent sous lequel je les inviterais à boire le thé et manger des scones…»

Roisin Murphy, Ruby Blue (distr. Musikvertrieb/PIAS)