Lausanne

Bordello Chulo

dim 19 mai, 23:00
Fribourg

Queer Studies Week

lun 13 mai - ven 17 mai
Neuchâtel

Rainbow Warriors Tour

ven 3 mai, 22:00
Lausanne
#non mixte

Zeus

sam 4 mai, 21:00

Les deux visages de Rolf

Les deux visages de Rolf

Agriculteur dans le canton d’Argovie, Rolf partage sa vie entre champs argoviens et boîtes de nuit zurichoises. Il organise surtout ses propres soirées à Lucerne, là où le milieu gay est plus chaleureux.

Décidément, non, il n’a rien du paysan argovien tel qu’on pourrait se l’imaginer dans nos clichés les plus banals. Fin, le geste rapide, le regard vif, les cheveux blonds savamment gominés, Rolf est plutôt du genre coquet… Avec son petit air soigné, on le verrait plutôt occuper ses journées derrière un confortable bureau. Et pourtant, Rolf est bel et bien paysan. Il travaille la terre, laboure les champs, conduit des tracteurs. «Je vis dans une petite commune au bord du Rhin. Je gère l’exploitation agricole avec mon père. Nous employons un apprenti et quelques saisonniers. Il s’agit d’un simple domaine familial.»
Domaine qu’il est appelé à reprendre plus tard. Tant mieux, car Rolf «cultive» une véritable passion pour son métier. Et tant pis s’il faut faire quelques sacrifices. Car – soyons honnêtes – être gay dans la campagne argovienne n’a rien d’une sinécure. En effet, ici, ce sont les valeurs familiales, patriarcales, traditionnelles qui dominent. «D’une façon générale, le paysan reste très attaché à la famille, à la communauté. Il doit en outre veiller à la succession de ses biens. C’est vrai que la réalité homosexuelle n’englobe pas nécessairement ces valeurs.»
Bref, le secret est de mise. Un secret parfois difficile à garder dans ce microcosme où tout se sait: «Ici tout le monde se connaît. Les gens sont au courant de tout… On est toujours observé… Mais bon, je tiens à dire que je suis heureux.» Surtout que les échappatoires sont nombreuses, Rolf des champs quitte régulièrement la campagne pour la ville. «Heureusement que Zurich est juste à quelques kilomètres», dit-il dans un sourire.

Après la fourche, les stroboscopes
Car la ville, Rolf l’apprécie aussi. Extra dans une discothèque branchée zurichoise, il participe encore et surtout activement à l’organisation des soirées Menergy à Lucerne. Menergy, son bébé, sa fierté, la manifestation qu’il a mise sur pied lui-même. «L’idée me trottait dans la tête depuis environ trois ans. Avec Mike, mon meilleur ami et actuellement président du comité organisateur, nous voulions mettre en place des soirées gays qui nous ressembleraient, simples et accueillantes. Nous avons d’abord cherché une salle. Nous l’avons trouvée à Emmenbrücke, à quelques kilomètres de Lucerne.» Il ne manque alors plus qu’un nom et un logo. «Mike a eu un jour une illumination en voyant son produit de douche sur lequel était écrit «energy for men». Ça lui est venu, comme ça: Menergy… de l’énergie purement masculine.»

La première soirée a lieu dans la foulée, le 8 mai 2004. Toujours prêts aux jeux de mots, les deux amis la titrent Crème Fraîche en français dans le texte, histoire de rendre la chose un brin plus sexy (la langue de Molière décidément a encore de l’avenir pour exprimer les choses de l’amour). Le succès est au rendez-vous. Et deux autres soirées à thème suivent en août et en décembre.
Par le biais de Menergy, Rolf entend proposer aux gays une alternative aux soirées qui se déroulent sur les bords de la Limmat: «La scène zurichoise est saturée. Et puis nous voulions participer à la scène de Suisse centrale. Ici, à Lucerne, les choses bougent aussi.» En effet, une scène gay relativement importante, toujours plus active, existe dans cette ville. «Les gays sont nombreux et la ville montre des signes de tolérance et d’ouverture.»
Mais c’est surtout du côté ambiance que les fêtes proposées par Rolf se démarquent de ses consœurs zurichoises. «A Zurich, les gens adoptent un comportement hautain voire arrogant, tandis qu’à Lucerne l’atmosphère reste résolument décontractée.» Simplicité et convivialité sont les deux termes qui définissent Menergy: deux halles de fête communicantes sobrement décorées; un public composé d’habitués; une musique qui laisse une large place aux sons des années 70 et 80 afin de plaire au plus grand nombre, tandis que la pure techno est reléguée dans la seconde salle, par ailleurs moins fréquentée.

En moyenne, on compte 300 à 400 personnes par soirée. Et Rolf vise toujours plus haut: «Je souhaite attirer toujours plus de personnes et les fidéliser afin qu’elles puissent aussi participer à l’organisation de nos soirées.»

En attendant, l’agenda de l’agriculteur sera chargé dans les mois à venir: «La prochaine soirée Menergy aura lieu le 30 avril (sous réserve de modification), en vue de la votation sur le partenariat enregistré. Toujours pour la même occasion, une manifestation se tiendra dans le canton de Lucerne avec la participation de l’ancienne conseillère fédérale Ruth Metzler. Menergy se charge d’organiser l’événement.» Et au mois de juin, ne l’oublions pas, la Gay Pride aura lieu à Lucerne! Menergy tiendra bien évidemment son propre stand. L’opportunité de rencontrer Rolf et de faire causette avec lui, qui, n’ayez crainte, parle français.

Michaël Delorme et France Santi

Sur le Net:
www.menergy.ch
www.luzern.org