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La mode sera sans genre ou ne sera pas

Il y a dix ans, le Jordano-Canadien Rad Hourani organisait son premier défilé dans une galerie parisienne, lançant une carrière fulgurante.

Avant de lancer sa marque, le parcours professionnelle de Rad Hourani se limitait à quelques expériences comme styliste de studio pour des shootings photos, d’abord à Montréal, puis à Paris. A cette époque, il naviguait entre les sections homme et femme des boutiques et des grands magasins pour trouver des vêtements qui puissent le satisfaire en matière de coupe, de qualité de tissu ou d’originalité. C’est de là que lui vient l’idée de concevoir des pièces pour compléter sa garde-robe personnelle, jusqu’au jour où il a l’occasion d’organiser son premier défilé fin 2007. Six ans après, en 2013, Rad Hourani franchit la porte de la haute couture parisienne en tant que membre invité, devenant ainsi le premier designer à présenter une collection unisexe.

La rapidité de son ascension impressionne d’autant plus que Rad Hourani n’a pas suivi de formation académique en stylisme. Avant de lancer sa première collection, il a pendant une année étudié et comparé les principes anatomiques masculins et féminins, qu’il a synthétisé sur un modèle qui lui sert de canevas pour ses créations. Il n’utilise donc pas des patrons, mais travaille à partir de cette base pour dessiner des modèles directement sur le tissu final, à l’instar d’un sculpteur de l’étoffe. La dimension sculpturale se traduit par des coupes strictes et verticales qui élancent davantage la silhouette. Son magnifique trench à revers multiples, sa blouse transformable en corset ou encore ses vestes façon origami révèlent son sens aiguisé des proportions. Pour le couturier autodidacte d’origine jordano-canadienne, jouer avec les différentes couches de tissu s’apparente à un exercice de mathématique.

No Moodboard
Ce qui fascine, et parfois agace, réside dans son approche autocentrée de la mode. Il déclare qu’encore aujourd’hui il crée avant tout pour lui-même et que cela lui permet non seulement de rester focalisé sur une esthétique originale, mais aussi de s’engager pour la portabilité et le confort de ce qu’il produit. Pour sonder ces aspects, le designer dit toujours vérifier la sensation du tissu sur son corps et à travers le mouvement. Il explique n’avoir jamais utilisé de moodboard dans son travail et ne cite jamais des noms de la mode comme influence externe, refusant de s’inscrire dans une lignée ou dans une école de pensée. Pour fonder sa position refusant les compromissions et les limites, il cite volontiers l’individualisme radical ou égoïsme rationnel prôné par l’écrivaine athée Ayn Rand, auteure du célèbre roman «La source vive». Et c’est dans le statut d’artiste visuel dans son entier que Rad Hourani ambitionne de s’inscrire en s’attaquant aussi, avec des résultats remarquables, à la photographie et à la vidéo.

Lors de ses différentes expositions il ne lésine pas à satisfaire ses envies de touche-à-tout, incluant également la peinture parmi ses intérêts, avec des résultats plutôt décevants pour le coup. Peut-on être à la fois réservé et mégalomane, compétent et touche-à-tout, individualiste tout en rêvant d’un monde meilleur? Sans vouloir sonder les recoins sombres de l’ego de l’artiste, on doit lui reconnaître d’avoir agi en précurseur, avant l’actuel courant de la mode sans genre qui, à ses yeux, n’est pas parfaitement égalitaire. En effet, pour la plupart des marques concernées, il se dégage toujours cette impression de vouloir habiller un homme un peu plus comme une femme et vice-versa.

Géométrie
La formule Rad Hourani se base, elle, sur la neutralité. Ses pièces minimalistes, austères et pour la plupart monochromes s’adaptent facilement à n’importe quelle garde-robe, leur complexité réside dans les détails, dans la façon de cacher les coutures ou de révéler leur géométrie grâce au mouvement comme avec ses superbes plissés. Son but étant d’élaborer des pièces fortes qui puissent donner assurance et confort à celle ou celui qui les porte, telle la sensation d’une armure délicate et légère. Pour le couturier aller au-delà du genre signifie aussi dépasser d’autres barrières et rejeter ainsi les clivages de religion, de nationalité et d’âge. «J’ai toujours voulu faire des vêtements pour l’humain, en dehors de tout effet de mode, d’âge ou de sexe.» Dans un monde de la mode volage, au lieu de partir dans une nouvelle direction à chaque saison, il mise sur une continuité, comme une longue partition.

» radhourani.com