Gays soumis à des tests ADN en tant que délinquants sexuels
Des hommes condamnés pour homosexualité dans les années 1980 ont récemment été sollicités par la police britannique, qui cherche à compléter son fichier d'empreintes génétiques.
Sous Margaret Thatcher, le Royaume-Uni n’était pas tendre avec les gays. A cette époque, la police menait encore des raids musclés sur les lieux de drague. Les individus pris sur le fait pouvait terminer en prison pour «gross indecency», une sorte d’attentat à la pudeur. Ceci même si aucune victime ne se manifestait. Les restes de cet appareil répressif victorien, qui avait servi à faire condamner Oscar Wilde ou Alan Turing, ont été abrogés depuis belle lurette. Mais ses effets se font encore sentir aujourd’hui. Ainsi le militant gay britannique Peter Tatchell rapporte-t-il que des gays de différentes régions du pays ont reçu la visite de policiers, ces dernières semaines. On les a sommés de se prêter à un prélèvement d’ADN destiné au fichier des délinquants sexuels. Ceux qui refusent de s’y soumettre risquent tout bonnement une arrestation.
Souvenirs d’abus policiers
Des hommes dont le seul «crime» est d’avoir eu des rapports homosexuels consentis, rangés aux côté des abuseurs d’enfants et des violeurs? Le choc est rude. Un homme d’affaires de Newcastle, arrêté il y a presque trente ans dans des WC publics, alors qu’il n’avait que 17 ans, résume son état d’esprit: «C’est comme si on avait mis une bombe sous ma chaise.» Pour lui, comme pour beaucoup de ces anciens condamnés, la démarche ranime en outre des souvenirs douloureux de mauvais traitements par les autorités policières, militaires ou carcérales.
La campagne de prélèvements s’inscrit dans une vaste opération destinée à compléter le fichier d’empreintes génétique avec les données d’anciens délinquants condamnés après 1995, date de mise en place de la base de données. Interrogée par Peter Tatchell, la Police de Manchester a nié solliciter les auteurs de «gross indecency» dans sa récolte d’échantillons. Les personnes contactées auraient été également condamnées pour d’autres faits, avancent les forces de l’ordre. Le Home Office, le ministère de l’Intérieur britannique, a toutefois admis implicitement des dérapages locaux dans la récolte d’échantillons ADN. Il rappelle que les lois aujourd’hui abrogées sur l’ «indécence» ne devaient pas être intégrées dans l’opération.