A Letter To Myself
Alors que Greta Gratos et Abdellah Taïa font partie du paysage artistique francophone depuis de nombreuses années, iels seront rejoint·e·s par Omar Gabriel lors des Rencontres Orient Occident de Sierre.
Rencontre en visio avec Omar Gabriel, qui nous parle depuis la capitale libanaise. Le jeune artiste a grandi au Liban et a entrepris des études à l’Institut d’études scéniques audiovisuelles et cinématographiques de Beyrouth. Il explique avoir suivi ce cursus par «curiosité pour l’humain et la profonde complexité des gens». Il développe à travers la caméra une forme de «poésie visuelle, un moyen d’expression, de fuir et de confronter le réel pour mieux l’accepter et le comprendre», confie-t-il d’emblée. Très jeune, il souhaite «faire exister la différence», loin des «boîtes religieuses, sociales, des dogmes familiaux».
Profondément marqué par les conditions socio-économiques de son pays, le jeune artiste explique avoir développé le projet visuel A Letter To Myself, une série de vidéos poétiques, après le drame du port de Beyrouth survenu en août 2020. «Qu’aurais-je regretté si j’étais mort dans cette tragédie?» se demande-t-il, et de répondre: «De ne pas avoir dit les choses sans avoir peur.»
De ce constat émerge le besoin de raconter le vécu forcément complexe de ses compatriotes queers et de leur entourage, de montrer leurs visages dans un pays arabe où ces identités sont généralement réduites au silence. Son objectif: être loyal à ce qu’elles sont et les afficher ouvertement. Un appel est lancé via les réseaux sociaux, mais la recherche des protagonistes s’avère compliquée, tant la peur habite la communauté queer libanaise, qui ne peut se montrer librement. Malgré tout, six personnes répondent à l’appel et acceptent le processus artistique d’Omar: iels s’adressent une lettre.
Valerie, Isabella, Domina et les autres
Dans ces six court-métrages (le septième montre la lettre qu’Omar s’est écrite à lui-même, comme si parler des autres lui avait permis de se tendre un miroir pour s’exprimer), on découvre notamment l’amour bouleversant de Valerie pour son fils, le chemin d’Isabella pour se construire une maison loin des siens ou encore l’apaisement atteint par Domina. On croise également Leah, Moe et Soha, autant de personnages, parfois membres de diasporas, qui font résonner des vécus qui traversent les frontières de l’Orient et de l’Occident, entre le Liban, l’Allemagne et la Suisse.