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Plume quantique

Plume quantique

Récemment salué par le Prix Découverte du roman gay, «Désordres», le premier roman de Jonathan Gillot, est un thriller politique qui allie violence et sensualité homosexuelle.

Le 7 janvier, un comité international a remis, à l’occasion sa quatrième édition, un prix littéraire qu’il faudra surveiller, tant le dernier livre primé décoiffe et convainc. Les conditions pour y concourir sont assez limpides: toutes les œuvres romanesques en lice abordaient le thème de l’homosexualité, de façon frontale ou de manière plus discrète, comme dans «Désordres», premier roman commis par un jeune docteur en physique quantique né en 1986. On est facilement impitoyable, dans ce thriller qui n’épargne ni les médias, ni les politiques, la narration de Jonathan Gillot, ironisant sur leur influence et leurs pouvoirs tout relatifs. Il faut dire que l’intrigue a quelque chose d’inédit, surfant toutefois sur des thématiques à l’œuvre dans une France qui, ici, est assiégée d’une façon jusqu’au-boutiste et définitivement violente. En effet, «Désordres» est un petit condensé des menaces actuelles…

Regard percutant
Dès les premières pages, un attentat fait exploser l’hôtel de ville de Chaumont, petit bourgade de 20’000 habitants (l’auteur y est né, et ça se ressent). En pleine séance du conseil municipal, les tables volent en éclats, des têtes sont arrachées, et bientôt une certaine odeur de cendres tièdes, un peu rance mais surtout mystérieuse, se met à ramper dans les rues de la petite cité. Quentin Viessenthal, jeune journaliste sans envergure, est dépêché sur les lieux de drame. Assisté de son caméraman, Camille, il travaille dans l’ombre délétère de sa détestable collègue, Mélanie Pacquerin, dont le destin s’arrête net lorsque des hommes fort mal intentionnés, et qui ont certainement un lien avec le récent attentat, ne l’étranglent et la laissent pour morte. Ce meurtre, premier d’une longue série, ne fera pas les gros titres des journaux. Le superviseur de la chaîne d’info en continu qui emploie Quentin Viessenthal est très clair: «Malheureusement, des gens qui se font étrangler, ça arrive tous les jours. Si elle avait été tuée en Syrie, elle aurait eu le droit au bandeau défilant. Mais là…»

Regagner Paris semble la seule solution. L’étrange organisation qui peu à peu assiège la ville n’a pas froid aux yeux, et n’hésite pas à égorger policiers et responsables politiques. Quentin subira d’ailleurs une agression plutôt dissuasive. Un homme aux yeux cobalt, mandaté pour le supprimer, lui laissera finalement la vie sauve, le menaçant tout de même de quitter Chaumont au plus vite, sous peine de représailles. Enivrant, ce regard. Percutant. Il est le premier contact entre Quentin et Max, un jeune homme au passé trouble qui a rejoint les NS (Nationaux Souverainistes), organisation terroriste financée par une puissance étrangère, qui a pris possession du pouvoir à Chaumont.

Les forces de l’ordre ont été remplacées par la Force Civique, une bande musclée et inquisitrice, imposant à la ville une loi martiale très stricte. Exerçant ainsi une pression qui mettrait en branle le gouvernement, les NS ont des revendications plus que limpides. Désireux non pas de «déstabiliser la société, mais au contraire de la fortifier», ils demandent notamment l’arrêt de l’immigration, le renvoi de tous les étrangers musulmans ou juifs, et, surtout, une sortie immédiate de l’Union européenne. Espérant ici contaminer tout le pays et que la rébellion se propage, ces néo-nazis sont déterminés à semer la terreur sur la République française, et à ébranler ses valeurs. La suite du roman, où Quentin devra dépasser ses simples fonctions de reporter, conjuguera avec habileté le climat presque apocalyptique de ce polar avec une romance gay d’autant plus excitante qu’elle semble impossible.

» «Désordres», Jonathan Gillot. Editions Ex-Aequo, 250 pages