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Angel Haze, le ghetto à corps et à crocs

La rappeuse sort de son silence et renoue avec le hip-hop coup de poing qui a fait sa signature, entre énervées radicales, rythmiques sauvages et romantisme goth.

«Il n’y a plus rien de moi dans mon cerveau. Je suis dehors, je me plains pas trop. J’ai vu tant de choses qu’on ne peut pas contenir, encore moins transmettre, ni même décrire.» Paroles qui claquent, et beats à bloc. Rap qui frappe et verbe au top, l’Américaine Angel Haze, 23 ans, revient sur le devant de la scène hurler sa hargne en majuscules. Impossible, second single extrait de sa nouvelle mixtape, Back to the Woods, déploie ses énervées radicales sur des rythmiques sauvages et minimales. «Ce titre, c’est moi qui me mue en quelque chose qui échappe aux étiquettes, aux labels, aux catégories», lançait récemment Angel Haze aux journalistes. L’artiste se dit pansexuel.le et refuse l’inscription des pronoms genrés; ni «he», ni «she», qu’on l’appelle «they». En français, on pourrait dire «el», contraction de «il» et «elle».

Jeu de mots et présence primale: Angel Haze a de la rage au ventre et du spleen plein la tête, surtout quand les amphets l’empêchent de rester clean. Sur son fil Twitter, ses perles ont des formes d’uppercut: «Parfois, j’aimerais que mon corps soit un tableau blanc effaçable pour pouvoir m’écrire 100 fois dessus ‹ je ne serai pas un fuckboy ›». L’amour, la mort, l’amère: Angel Haze a parfois flirté avec le suicide, et ses paroles sentent la dope.

Ses cicatrices sont profondes et remontent à loin. Angel les montre, les exhibe, les revendique. Héritage terrible d’une enfance à Detroit, sous le joug d’une communauté pentecôtiste ultra-religieuse et sectaire, au sein de laquelle la musique était proscrite. Et puis, dès l’âge de 7 ans, il y a ces viols, répétés, impunis, qui seront exorcisés bien des années plus tard sur Cleanin’ out my Closet, confession brutale et cathartique dont on ne sort pas indemne. Angel devient alors cette jeune louve du rap dont les mixtapes intransigeantes résonnent comme des promesses. Hélas, son premier album, sorti fin 2013 dans le giron d’une major, pêche par excès de bling bling: Dirty Gold cède aux sirènes mercantiles d’une électronique boursouflée et d’un RnB de pacotille.

Trop chou
A cette époque-là surgissent aussi les blondeurs d’Ireland Baldwin, fille d’Alec et de Kim Basinger, promise au mannequinat, dont Angel Haze s’éprend passionnément. Etreintes, célébrité et subversion, les deux it-girls forment le couple du moment. Eté 2014: leur flirt fait la Une, les réseaux sociaux s’emballent. «Les médias disent: oh, trop chou, elles sont meilleures amies», lâche Angel en interview. «Un couple interracial, je veux dire, c’est encore un peu trop pour l’Amérique. Oui, on baise ensemble, et selon moi les ami.e.s ne baisent pas ensemble.» Pression. Séparation. Angel disparaît de la circulation.

Back in the Woods (2015), porté par le doute, les souvenirs qu’on esquive et les œdèmes qu’on médite, résonne comme un superbe retour aux sources et à ce hip-hop de meute dont étaient emprunts les premiers morceaux coup de poing d’Angel Haze. Se révèle, au fil de l’album, quelque chose de la virtuosité de Missy Elliott (The Wolves) et de la vocalité de Sia (The Eulogy), et puis surtout cet instinct des textes, hantés, violents ou suspendus, entre romantisme goth (Detox, Bruises) et échappées fulgurantes (Moonrise Kingdom).

Angel Haze, «Back in the Woods», paru sur Noisy Cricket