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L’esthétique se fait low cost

Cliniques vantant des prix cassés, forfaits à l’étranger auxquels de plus en plus de Suisses recourent: la chirurgie esthétique se popularise. Louable démocratisation ou dangereuse banalisation de l’acte médical?

En avril dernier, la Clinique Rive Droite brisait un tabou en étant la première à se positionner aussi visiblement sur le marché suisse par le biais du marketing publicitaire. Le concept «Easylook», lancé par Tom Gyger et l’agence Label Communication faisait son apparition lors d’une campagne d’affichage à laquelle se prêtait TPG publicité. Son message? La promesse d’une esthétique à prix cassés, rendant la chirurgie plastique accessible à tous. «Il ne faut jamais critiquer l’histoire, dit Tom Gyger, mais il faut aussi être ouvert à l’évolution. La chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique est née et s’est développée pour une catégorie de personnes ayant beaucoup de moyens, mais tout le monde n’a pas ces moyens…».
Ce coup de marketing fait réagir la profession. «Je suis favorable à ce que la chirurgie plastique devienne accessible à tous. Mais il y a malheureusement un commerce qui s’exerce autour de notre profession. Il ne faut pas que les arguments de publicité deviennent les arguments de l’intervention. On ne pratique pas un acte de chirurgie plastique parce que ce n’est pas cher, mais parce qu’on le souhaite ou qu’on en a besoin», relève le Dr Pierre-Olivier Parvex, praticien à la Clinique de chirurgie plastique, reconstructive et esthétique des Grangettes, à Genève.
Sise à Montreux, la Société suisse de chirurgie plastique, reconstructive et esthétique, représentant 120 chirurgiens plasticiens en Suisse et agréée par la FMH (Fédération suisse des médecins), dénonce avec véhémence toute publicité faite pour des actes de chirurgie plastique. «En Suisse, c’est totalement contraire à la déontologie médicale. Il est inadmissible que l’on transforme la chirurgie plastique en un simple bien de consommation», tonne sa directrice Catherine Perrin.

Déposer ses valises au Brésil
En attendant, dans une société où les critères esthétiques sont vendus comme des éléments-clés de la réussite sociale, le marché de la chirurgie esthétique se popularise et l’argument du prix fait déjà mouche: les Suisses franchissent déjà le pas d’une intervention de chirurgie plastique à l’étranger, parce que moins onéreuse. Un fait qui n’échappe pas à Tom Gyger Selon lui, l’exode d’une partie de la population pour des destinations où l’offre est toujours plus compétitive est inévitable.
Jeanine*, retraitée pleine de vitalité, a fait le pas cette année. «Je souhaitais, dit-elle, poser les valises que je ne voulais plus porter.» Partie à Rio, elle est revenue 15 jours plus tard avec un nouveau regard et un lifting partiel en prime, le tout pour 1’000 francs suisses. «Avec le prix du billet, ça m’a coûté 2’500 francs suisses», ajoute-t-elle. «J’étais partie pour les paupières et c’est le chirurgien qui m’a proposé le mini-lifting en plus. J’ai accepté parce que j’étais en pleine confiance: ma meilleure amie brésilienne l’avait fait chez lui 7 ans auparavant. Tout a été très sérieux, j’ai fait un check up avant de partir et sur place je suis restée plusieurs heures en salle de repos. Ensuite, il a été très présent, il m’a téléphoné tous les jours après l’intervention.» L’autre avantage, dit-elle, c’est qu’«on passe sa convalescence loin des regards et on revient “propre en ordre” comme on dit.» Très contente du résultat, Jeanine avoue cependant qu’elle n’aurait probablement pas fait une telle dé-marche aux tarifs pratiqués en Suisse.
Autre cas, moins heureux, Laurence* 35 ans a entrepris une plas-tie mammaire en France voisine. «J’ai été convaincue par plusieurs amies qui étaient allées chez ce chirurgien, dont les tarifs sont moitié moins chers qu’en Suisse. Elles en étaient très satisfaites, mais pour moi ça a été un échec. J’ai vu pire, mais le résultat est tellement palpable que j’ai encore du mal à laisser un homme toucher ma poitrine.» Aujourd’hui, Laurence serait censée subir une seconde intervention correctrice à la charge du médecin, mais sa confiance entamée ne l’y engage pas et la même intervention chez un autre chirurgien en Suisse lui coûterait certainement le double du prix initial. «Si j’avais su, conclut-elle, j’aurais préféré mettre 10 ou 15’000 francs suisses dès le départ.»

Poussés à la consommation?
Eric*, 27 ans, a eu recours à une rhinoplastie à Genève: «Je n’étais pas particulièrement complexé par mon nez, dit-il, mais je crois en quelque sorte que j’avais envie de retrouver les traits plus fins de mon visage d’enfant. L’opportunité s’est présentée par l’intermédiaire d’un ami qui avait prévu une liposuccion dans l’une des cliniques les plus réputées de Genève. Quand il m’a dit que la première consultation était gratuite, j’y suis allé. Ça s’est passé très vite et le médecin m’a parlé comme si ma décision était déjà prise. Il m’a tout de suite proposé une date pour l’intervention et j’avoue que lorsqu’il m’a annoncé le tarif de 7’000 francs suisses, je suis resté perplexe! Finalement je me suis décidé parce que j’avais peur d’y renoncer par la suite. C’était l’occasion ou jamais, je ne le regrette pas mais quand même sur le moment je me suis senti un peu trop poussé.»
C’est bien ce que craint Catherine Perrin, à la SSCPRE: «Le risque, avec toute la promotion qui est faite autour de la chirurgie plastique, c’est que l’acte chirurgical se banalise. Ce qui est plus grave encore, c’est que de nombreuses enseignes exercent en Suisse avec un personnel qui n’est pas reconnu par la FMH. Il y a des personnes qui n’ont tout simplement pas de formation de chirurgien! Les gens ne le savent pas, mais il y a eu des morts avec des liposuccions, par exemple… Il est urgent de mettre de l’ordre et sévir sur la publicité. Mais personne n’agit. Avec le système fédéral, tout le monde se renvoie la balle.»

Forfait-vacances
Certaines enseignes suisses prennent les devants de la concurrence étrangère en proposant elles-mêmes des services délocalisés. Ainsi cette clinique lausannoise, dénoncée par la SSCPRE, qui fait de la publicité sur Internet avec pour slogan «des prix abordables en Tunisie, avec le concept et la qualité suisses». Là, ce n’est plus une simple intervention chirurgicale qui est proposée, mais une sorte de forfait-vacances au soleil comme on part en thalasso. Tom Gyger a déjà vu passer dans sa clinique des patients qui ont eu recours à ce genre de forfaits:
«Une personne opérée chez nous récemment nous a raconté qu’on lui avait offert à Tunis une liposuccion à 3’200 euros, billets d’avion aller-retour et 5 nuits dans un hôtel 5 étoiles compris et pour 500 euros de plus, elle pouvait en profiter avec sa famille. C’est sûr, on pousse les gens à la surconsommation avec ce genre de forfaits!» A ces tarifs-là, Easylook est hors compétition, mais l’ambition de Tom Gyger est de proposer une alternative grâce à une formule simple, concentrée sur les interventions les plus populaires et avec des tarifs tout compris.
Tom Gyger se sait critiqué pour avoir fait de la publicité, mais il en est convaincu, le «low cost», tout en garantissant la qualité (ses praticiens sont tous au bénéfice du droit de pratique en Suisse), c’est l’avenir. Des enseignes comme la sienne feront forcément baisser les prix et démocratiseront le marché. Peut-on vraiment s’en plaindre? Selon Catherine Perrin à la SSCPRE, «le problème, ce ne sont pas les prix. La concurrence s’exerce déjà sainement entre les chirurgiens. Une intervention pour une augmentation mammaire, par exemple, peut varier en Suisse entre 5’000 et 20’000 francs. Non, le problème réside dans le fait que la publicité transforme l’acte médical en un service ordinaire, sans risque. Or il faut le savoir, une opération de chirurgie esthétique comporte toujours un risque, quelle que soit la renommée du médecin.»
(*) Les prénoms ont été modifiés

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Une liste officielle
La Société suisse de chirurgie plastique, reconstructive et esthétique recommande un questionnement approfondi avant toute intervention, bien en amont de la première prise de contact. Pour quelle raison veut-on «corriger» un «défaut» esthétique? Est-ce vraiment un défaut? «Une poitrine plate, ça permet aussi de d’être plus à l’aise quand on fait du sport. Il faut aussi essayer de positiver son corps», rappelle sa directrice Catherine Perrin. Une intervention esthétique transforme le physique, parfois avantageusement son mental, certainement pas une vie. Si l’on est convaincu du bien-fondé de sa décision, «à l’heure actuelle, il faut voir si le chirurgien plasticien auquel vous songez recourir a une formation ad hoc». La SSCPRE est la seule officiellement accréditée par Berne et elle dispose d’une liste de 120 chirurgiens membres. «Il faut néanmoins savoir qu’il y a toujours un risque dans ce type d’intervention, quelle que soit la formation ou la réputation du chirurgien. Ce qui est important, c’est qu’un très grand rapport de confiance s’établisse entre le patient et le chirurgien.»