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Intersexualité: Lausanne montre la voie

Intersexualité: Lausanne montre la voie

Le cours sur l’intersexualité de l’UNIL affiche complet. Un succès qui montre l’intérêt pour cette question complexe, que les autorités politiques et médicales commencent tout juste à prendre en compte.

«La question des intersexes intéresse beaucoup les étudiants en médecine», constate le professeur Ansermet, chef de service de pédopsychiatrie aux Hôpitaux universitaires de Genève, professeur à l’Université de Lausanne (UNIL). Depuis qu’un cours à option sur ce sujet a été créé en 2010 à l’UNIL, ce ne sont pas moins de 150 étudiants qui y ont été sensibilisés au travers des années. Avec seulement 20 places disponibles, il faut s’y prendre vite puisque le cours affiche toujours complet.

Un véritable engouement qui atteste du désir d’aborder cette question. Il faut dire que dans le cursus de médecine obligatoire, la question des intersexes n’est qu’évoquée. Cet enseignement optionnel apporte donc un éclairage nécessaire à l’heure où l’ONU ne cesse de condamner partout des interventions non-consenties visant à déterminer le sexe de l’enfant. Et la Suisse ne fait pas exception. Si à Lausanne on s’est décidé à agir, à Genève par exemple, il n’existe pas de cours spécifiquement lié à l’intersexualité. Une disparité qui est à l’image des différences de traitements en Suisse.

«Il n’y a toujours pas d’évidence médicale et il y a de très grandes différences d’un médecin à l’autre.» Daniela

«Tous les traitements des personnes intersexes sont arbitraires en Suisse, s’indigne Daniela Truffer, membre fondatrice de l’ONG StopIGM.org. Il n’y a toujours pas d’évidence médicale et il y a de très grandes différences d’un médecin à l’autre.» Une indignation d’autant plus vive que cette valaisanne a été elle-même victime de mutilations dès son enfance. «Quand j’étais toute petite les médecins m’ont ouvert le ventre et m’ont enlevé mes testicules saines, sans informer mes parents. Les médecins ont décidé de faire de moi une fille, entre autre parce que mon pénis était trop petit. Encore aujourd’hui la castration me cause des problèmes de santé», raconte la militante. Une réalité vivement condamnée par l’ONU qui a notamment qualifié ces interventions de «pratiques préjudiciables» et de «traitements inhumains».

Encadrement des pratiques
En Suisse, Commission nationale d’éthique pour la médecine humaine (CNE) a publié en 2012 une prise de position concernant «l’attitude à adopter face aux variations du développement du sexe». Il encourage à ne pas avoir recours à une intervention sans le consentement de la personne concernée. Ces mises en garde n’ont néanmoins pas changé la pratique partout. «On n’attend rien des médecins. Quelques-uns d’entre eux sont disposés à changer leurs pratiques, mais la plupart arrêteront seulement de mutiler quand ils y seront contraints», ajoute Daniela Truffer.

A la faculté de médecine de Lausanne, des mesures ont tout de même été prises. Preuve s’il en est, ce cours à option à l’attention notamment des futurs médecins. «Nous avons créé ce cours en 2010 suite à la commission des sciences humaines, explique le Dr Meyrat, chirurgien en pédiatrie au Centre hospitalier universitaire vaudois. Il s’agit d’une plateforme entre médecine et sciences humaines qui regroupe une quinzaine de professeurs». Généticien, chirurgien plastique, gynécologue, pédopsychiatre, avocat ou encore associations et patients se relaient pour parler de cette question riche en problématiques.

«À chacun de construire sa propre solution»
«Entre le sexe chromosomique, génétique, endocrinien, cérébral, social, lié au genre, il n’y a pas de marqueur clair de la différence des sexes, indique le professeur Ansermet. Au delà de ces repères, à chacun de construire sa propre solution». Une pluralité des pistes de réflexions qui fait entrevoir toute la complexité de l’intersexualité, dont la seule terminologie pose problème. «Historiquement, les terminologies ont varié, explique le pédopsychiatre. On a parlé de pseudo-hermaphrodisme, d’ambiguïté génitale, puis d’intersexualité, de DSD (désordre du développement sexuel), maintenant de variation du développement sexuel.» Les questions se bousculent et démontrent l’importance d’une telle réflexion que le professeur qualifie de «problème sociétal majeur».

Si à l’Université de Lausanne, on en prend toute la mesure, à Genève la question est abordée en surface. «La problématique est abordé de façon obligatoire dans l’apprentissage par problèmes de l’unité de reproduction. Cela permet aux étudiants de développer un problème réel et discuter les différentes prises en charge possibles mais nous n’avons pas de cours ou de séminaire pour discuter des problèmes éthiques». Un enseignement qui n’intègre donc pas de réflexion de fond. Pour unifier les pratiques, Daniela Truffer est claire: «Il faudrait une loi qui interdise les mutilations génitales intersexes, mais qui facilite aussi les traitements consentis aux personnes majeures.»

Progrès et lacunes

Dans un communiqué publié hier mercredi, le Conseil fédéral s’est félicité des progrès intervenus depuis le rapport du CNE en 2012: «La Confédération a déjà mis en œuvre la majeure partie des recommandations la concernant ou est en passe de le faire, notamment la simplification des démarches pour modifier la mention du sexe dans le registre d’état-civil ou l’amendement des termes discriminants dans les lois ou les ordonnances.»

En revanche, la proposition d’un accompagnement psychosocial gratuit pour les personnes intersexes est rejetée comme irréalisable par l’Exécutif. Interviewée par «Le Temps», la membre de la CNE Maya Shaha déplore ce refus. «Cela a été fait à l’étranger. Quand les enfants grandissent, même avant l’adolescence, ils passent par des phases de vie où le sexe est très important: on se compare, on se pose des questions… c’est une situation très délicate à gérer émotionnellement.»

La spécialiste soulève une autre lacune importante, lorsque l’ambiguïté de genre n’est pas directement identifiable à la naissance. «A ce moment-là, la question de la prise en charge financière se pose: les caisses maladie et l’AI se renvoient alors la balle, car aucune règle légale n’encadre ce cas de figure. Si bien que personne ne veut assurer ces enfants.» F.T.