Et si l’amitié était notre plus grand amour?

Et si aimer, c’était aussi célébrer nos amitiés? Dans les communautés queer, l’amitié ne se vit pas comme un lien secondaire, mais comme une forme d’amour à part entière. Dépassant les hiérarchies affectives imposées par l’hétéronormativité, elle devient un espace de résistance, de soin et de réinvention collective.
Dans nos sociétés, la hiérarchie est claire: le couple romantique – souvent hétéro, marié et parental – trône au sommet. L’amitié, elle, est reléguée à l’arrière-plan, perçue comme un lien de passage ou de soutien périphérique.
Mais pour de nombreuses personnes queer, cette hiérarchie n’a jamais eu de sens. L’amitié devient alors un pilier central, une manière de bâtir une famille choisie quand la famille biologique exclut, ou simplement quand le modèle dominant n’attire pas.
La famille choisie comme survie et comme soin
Depuis les débuts des luttes LGBTQ+, les communautés queer ont inventé d’autres façons d’aimer. Des maisons ballroom aux collectifs militants, l’amitié a été le moteur d’un care radical: prendre soin des un·e·x·s des autres face au rejet, aux violences, aux crises sanitaires comme le VIH ou la pandémie.
Ici, l’amitié n’est pas un à-côté, mais une condition de survie. Elle se vit dans le quotidien – partager un loyer, cuisiner ensemble, s’épauler dans les moments d’angoisse – autant que dans les moments festifs et créatifs.
L’amitié comme espace de liberté queer
Considérer nos ami·e·x·s comme nos grand·e·x·s amours, c’est aussi refuser que l’amour soit enfermé dans le modèle romantique et sexuel. L’amitié queer ouvre des espaces de liberté: aimer sans jalousie, inventer des rituels intimes (vacances, anniversaires, cérémonies DIY), célébrer le lien sans obligation contractuelle.
C’est une manière radicale de dire: nos vies ne doivent pas se conformer au script hétéronormatif. Nous pouvons donner du prestige à nos amitiés, les traiter comme des amours à part entière.
Et si on célébrait nos ami·e·x·s comme nos amours?
Dans une époque où l’isolement et la précarité pèsent lourd, repenser l’amitié comme amour queer radical n’est pas seulement une idée romantique, mais un geste politique.
Et si, au lieu d’attendre “le grand amour”, on reconnaissait que nos grand·e·x·s amours sont peut-être déjà là, autour de nous, dans ces ami·e·x·s qui nous portent et nous célèbrent au quotidien?
bell hooks – All About Love: un classique qui repense l’amour sous toutes ses formes.
José Esteban Muñoz – Cruising Utopia: une utopie queer où l’amitié et le collectif ouvrent de nouveaux horizons.
Fanny Britt – Les maisons: un roman sensible sur les liens intimes, familiaux et amicaux.
Sara Ahmed – Living a Feminist Life: le féminisme vécu au quotidien, avec l’amitié comme espace de care.
Paul B. Preciado – Un appartement sur Uranus: fragments d’une vie queer où l’affection et l’amitié sont centrales.
Geoffroy de Lagasnerie – 3. Une aspiration au dehors: un éloge de l’amitié comme cœur de vie, vécu aussi comme un geste politique.
