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GeneVegas a changé le drag romand pour toujours

GeneVegas a changé le drag romand pour toujours
avec l'aimable autorisation de ©GeneVegas

Pendant dix ans, GENEVEGAS a fissuré la nuit genevoise, bousculé les codes du drag suisse et inventé un espace où l’indiscipline devenait une manière d’exister. À l’occasion de COUP DE GRRRÂCE – The Last GeneVegas on Earth, le collectif offre une dernière célébration de son héritage: un geste festif, politique et indiscipliné qui continuera d’habiter la scène queer bien après cette nuit finale à la Comédie de Genève.

Il y a dix ans, Genève ressemblait à une ville sage qui se croyait complète. Les institutions culturelles vibraient poliment, le clubbing suivait son rythme, et la scène queer tenait à peine dans quelques interstices. C’est dans cet espace étroit que GENEVEGAS est apparue, non pas comme une soirée, mais comme une faille, une anomalie volontaire.

«Une anomalie nécessaire. Le bug qui empêche la matrice genevoise de se croire parfaite», résume aujourd’hui La Zizanyx, co-fondatricex du collectif. Iel se souvient d’un paysage où «il manquait un endroit où on ne devait pas négocier notre exisTRANS avant de commander un verre». Trop peu d’espaces, trop de conditions, trop de limitations. Alors, dit-iel, «on a arrêté de demander ET ON A ORGANISÉ».

C’est dans ce refus de l’autorisation que naît Genevegas, une soirée qui découpe une brèche dans la nuit, et qui y installe un espace où l’excès devient respiration, où le drag cesse d’être imitation pour devenir transformation.

L’Écurie: le laboratoire

Les premières soirées prennent forme à l’Écurie, un lieu trop petit pour contenir ce qui est en train de naître, mais assez libre pour le laisser pousser. C’est là que Balkanika Trauma, alors jeune performeuse entrant presque par hasard dans cette aventure, comprend la singularité du geste et raconte «À l’Écurie, nous avions une liberté totale. On pouvait créer, improviser, expérimenter et exister selon nos propres règles.»

Cette liberté devient méthode. Le collectif se construit à mains nues, sans roadmap ni stratégie, juste une intuition nette: faire exister un drag qui n’avait pas encore de scène. Un drag queer, club, hybride. Un drag qui emprunte au punk, à la rave, à la techno et qui refuse la respectabilité.

«Si ça ne dérange personne, c’est que c’est pas encore assez queer.»

Lady HD résume très bien l’esprit du collectif «Genevegas s’est toujours distinguée par son identité profondément queer. Noux sommes les art punks de la scène drag suisse.» Et La Zizanyx ajoute que «si ça ne dérange personne, c’est que c’est pas encore assez queer.»

Au cœur de ces premières années, tout est improvisation, débrouille, bagarre mais aussi soin. Une communauté se cristallise et la culture naît.

Muées, mutations, mues encore

Genevegas ne reste jamais lae même. Iel mue. Iel abandonne des peaux, en gagne d’autres. Iel se structure autour d’un noyau mouvant, avec jusqu’à douze membres qui, chacun·e·x, y déposent leur manière d’habiter la nuit… mais pas que.

Pour La Zizanyx, c’est organique: «Comme toute bonne créature: on a mué plusieurs fois, perdu des peaux, gagné des nouvelles, et on s’est découvert des organes qu’on ne savait même pas avoir.»

Le passage à la Fonderie Kugler marque un tournant: soudain, un espace vaste, plus de technique, plus de public. Une dimension nouvelle. «Ce changement nous a permis d’accéder à du matériel professionnel et d’inviter des performeureusexs de plus grande envergure. C’était un avant/après.» dit Balkanika Trauma.

«On devait rééduquer la fête, imposer nos exigences de sécurité et de respect.»

D’un squat à un hangar, d’un hangar à un théâtre: chaque déplacement étend la portée du collectif. Et au-delà des clubs, Genevegas s’invite ailleurs, comme Montreux Jazz ou des grandes scènes et même sortant de la nuit au Musée d’ethnographie de Genève, bref dans des contextes où personne ne l’attend. «On arrivait avec notre univers, face à un public qui ne nous connaissait pas encore. On devait rééduquer la fête, imposer nos exigences de sécurité et de respect.» raconte Balkanika Trauma.

C’est ainsi que le drag Genevegas, d’abord refuge, devient force culturelle.

Cristal Couilles: entrer dans la légende

Le récit ne serait pas complet sans la nouvelle génération. Cristal Couilles arrive d’abord comme photographe. Puis il entre en scène — littéralement — et découvre ce que cela signifie d’être avalé par une histoire déjà en cours.

Il observe, apprend, se laisse absorber, et finit par imposer sa propre énergie.

«Au départ, j’étais impressionné, mais après les performances, c’est plutôt elleux qui avaient peur de moi je crois.» Ce que Genevegas lui apporte: une profondeur dans son art raconte Cristal Couille «Ce que je voyais de plus incroyable, c’était des personnalités entières. Hors drag, la personne garde son intégrité. C’est ça, le geste artistique le plus sincère.»

«Wahou, j’étais cet enfant il n’y a pas si longtemps.»

Son moment fondateur: une séance de lecture de contes pour enfants, où il se reconnaît de l’autre côté du regard. «Je me suis dit : “Wahou, j’étais cet enfant il n’y a pas si longtemps.” Là, j’ai compris que je faisais partie des anciens.»

La fête comme manifeste

Pour Balkanika, qui revient performer une dernière fois, l’essence du collectif n’a jamais été l’esthétique seule: «La fête a toujours été un espace de résistance. Même dans la célébration, il ne faut jamais oublier nos convictions et nos luttes.»

Lady HD ajoute une injonction lumineuse: «Lookez-vous. Le monde de la nuit est un experimental playground. N’attendez pas que les choses se créent autour de vous: donnez-leur naissance. Take up space.»

Les quatres disent la même chose, chacun·e·x à leur manière: Genevegas a existé pour créer un espace où l’on peut se déployer sans permission.

THE LAST GENEVEGAS ON EARTH: la dernière faille

Le 28 novembre 2025, au cœur de la Comédie de Genève, se refermera — ou s’ouvrira autrement — la dernière brèche. Thème: Physique CUNTique. Aliens. Reptilien·ne·x·s. Giger. Biohacking. SISSYBORG. Un dernier rituel, flamboyant et désobéissant, avant la fin.

La Zizanyx résume l’esprit de cette nuit finale: «La fin du monde est supportable… si t’as de bons faux cils et des gens qui crient ton nom.» Cristal Couilles, lui, prépare « un petit discours d’adieux pour mes dinosaures préférés».

Parce que c’est ça, Genevegas: des êtres monstrueux et tendres, des survivant·e·x·s, des inventeur·ice·x·s d’espaces, des créatures qui refusent d’être sages.

Et après?

«Même si la soirée ne se déroule plus avec le même rythme, Genevegas continue d’exister à travers celleux qui ont commencé avec nous», dit Balkanika.
Et pour une dernière nuit, Genève vibrera comme au premier jour: imparfaite, indisciplinée, traversée par des corps qui n’ont jamais demandé l’autorisation d’exister.

COUP DE GRRRÂCE – The Last GeneVegas on Earth
Vendredi 28 novembre 2025 – 20h à 02h
La Comédie de Genève

Pour célébrer dix ans de performances féroces et de création queer indomptée, Genevegas réunit une dernière fois les figures qui ont façonné son histoire et influencé toute une génération d’artistes: Moon, Chienne de Garde, Sabrina Oberlin, Cristal Couilles, Gigi Lou, Mutant Doll, Drue, Jaja Jadore, Balkanika Trauma, Luna La Nour, Hedera, BB Chance, ainsi que Lady HD, Dance Divine et La Zizanyx (DJx/live).

Billetterie: comedie.ch