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«Le putain de monde entier nous envie»

«Le putain de monde entier nous envie»

Le plus rentre-dedans de tous les fagzines ayant existé à ce jour arbore un nom jubilatoire: This is the Salivation Army.

Son nom annonce la couleur: impossible à traduire en français tant le jeu de mots fonctionne merveilleusement en V.O.; faisant la part belle à l’Armée du Salut (The Salvation Army) ainsi qu’à la précieuse salive, si utile dans beaucoup de circonstances qu’aucun queer digne de ce nom ne saurait nier sa toute-puissance en ce bas monde. This is the Salivation Army est un mythe épique contemporain par excellence. Réalisé selon les règles de l’art de tout fanzine qui se respecte, cet obscur petit bijou tout droit sorti d’une photocopieuse en noir et blanc est né au Canada en 1996, sous l’impulsion de Scott Treaven.

En seulement huit numéros étirés jusqu’en 1999, un joyeux freakshow a trouvé une tribune d’expression libre jonglant avec l’esthétique du queer, du punk, du goth, de la musique industrielle et d’une certaine littérature avant-gardiste à ne pas mettre entre toutes les mains. Parmi les illustres collaborateurs réguliers ou épisodiques de ce morceau d’anthologie underground, on trouve l’inénarrable Genesis P-Orridge de Psychic TV, dont la plume acerbe signe quelques éditoriaux bien envoyés. On y croise aussi AA Bronson, Kenneth Anger, Derek Jarman, William Burroughs et une quantité affolante d’autres stars ou d’intellectuels en devenir. Dénominateur commun de tout ce beau monde: ne pas marcher dans les rangs, et si possible le faire bruyamment.

Manifeste
Un extrait d’une lettre ouverte de Scott Trelaeven destinée aux New Queer Radicals en dit long sur son positionnement extrêmement lucide et sans détour quant aux travers retors de la classification sectaire à l’emporte-pièce du milieu queer alternatif: «Une fois pour toutes: il n’y a pas de scène, pas de membres en activité», déclare-t-il sans détour. Puis d’expliquer posément:«On s’est fait les tattoos, les coupes de cheveux, les cicatrices et les carapaces jusqu’à ce que tout le monde se ressemble, certifié underground tout ce que tu veux… Ce cirque est aussi vaste et varié que n’importe quel cabaret. Nous infiltrons tous les domaines. Nous allons et venons comme il nous plaît d’un cercle à l’autre, ne prenant que ce dont nous avons besoin. Charognards issus d’une école bien plus large que n’importe quel culte mesquin. Nous sommes des touche-à-tout, des dilettantes, des maîtres et des exemples, sans âge. Nous sommes le nouveau cirque. Le putain de monde entier nous envie», conclut-il stoïquement.

Synthèse simple et efficace à la façon d’un manifeste, uppercut servi de l’intérieur de la forteresse, cette lettre ouverte aux dogmatiques de l’underground en dit long sur la liberté de pensée dénuée de toute appartenance à la moindre caste sectaire qui caractérise ce fagzine. Bien plus qu’une simple publication polycopiée, il s’est d’ailleurs joliment vu couronner d’un court métrage éponyme parfaitement hallucinant, le faisant passer au rang de véritable légende urbaine. Présenté trois ans après la sortie du dernier numéro, il a rapidement enflammé tous les festivals de cinema «off» à travers le monde et peut être considéré comme le 9e opus de cette collection, suivi par le livre This is Salivation Army Black Book contenant la totalité des parutions, publié en 2006, pour le dixième anniversaire et qui compte pour sa part en tant que «Issue X». Le travail artistique de Scott Treleaven est encore régulièrement visible aujourd’hui, et la plupart de ses collaborateurs font eux aussi toujours autant parler d’eux sinon frémir le commun des mortels sans interruption depuis plus de deux décennies.

» this-is-the-salivation-army.tumblr.com