Chronique d’une cartographie du désir au Whole 2025

Chaque scène a son peuple, chaque loop sa charge. Whole Festival 2025: un campement stratégique, un Pokédex de drogues, des baisers somptueux, et un “ra pa, ra pa pa” qui devient langue secrète. Cartographie intime d’un festival queer vu de l’intérieur. Je te raconte tout ça dans trois chroniques, voici la deuxième.
Nous montons le campement dans un endroit stratégique, entre les douches et l’entrée du festival. À peine la tente montée, un homme passe avec un catalogue de cartes Pokémon qui est en fait le menu des drogues qu’il propose. Nous achetons juste pour saluer l’effort. Ton donné: quirky, cracky, fun. Évidemment il y a du retard, mais tout aussi évidemment une camionnette remplie de drag queens menace de faire une émeute pour que les portes s’ouvrent. Et les portes s’ouvrent.
Beach, Arena, Forest, Crane, TRINA: géographie express
Géographie express. À la Beach le jour et à l’Arena la nuit: muscle gays, cis, blancs, suants, trois fois ton volume avec quatre fois moins de tissu. Collés les unx aux autres dans un essaim qui fait monter la température de 5 degrés à cause du GHB qui donne chaud. Forest: les cool kids, enfants des collectifs queers. Crane: freaks, non-européen·ne·x·s, les plus politisé·e·x·s. TRINA tent (par et pour les personnes queer racisées): je n’y suis pas tant allé cette année. Des généralités, oui, mais de la beauté partout.
Trois baisers pour raconter une édition
Le premier était SOMPTUEUX, sur la Crane, tout premier set, premier jour vers 17h, la DJ sort un drapeau de la Palestine. Musiques latinos et moyen-orientales, lui brun, bouclé. Ce baiser a un goût de baptême, l’ouverture de l’opéra.
Le deuxième, politico-sexuel: atelier de Dabke (la danse traditionnelle de libération palestinienne), plein soleil, sueur, main qui glisse. Il m’embrasse à pleine bouche. Communion. Puis on se perd.
Le troisième, fin: aux douches, brossage de dents, réconfort, câlin. Deux heures plus tard, on se recroise, c’est le baiser doux de la reconnaissance.
Ce qu’on n’a pas fait (et pourquoi ça compte)
Et puis les absents. Le voisin de tente J., magnifique en slip. L’autre, regard bienveillant, dévoré des yeux trois jours. Bref, je n’ai mangé aucune fesse. Peut-être ne suis-je pas si porté sur le sexe que la norme le voudrait. Mais s’il y a bien UNE chose que Whole apprend, c’est la vacuité des normes.
Entre deux scènes, un code: avec un crush, chanter le rythme en dansant: “Ra pa, ra pa pa.” C’est idiot, c’est intime, c’est exact: nos oreilles n’entendent pas les mêmes fréquences. Quand elles s’alignent, on parle la même langue.
