L’IA, l’écologie et les luttes sociales: le grand paradoxe

En deux ans, l’IA s’est incrustée partout. Dans nos téléphones, nos mails, nos jobs, nos combats politiques. On l’utilise pour gagner du temps, structurer une pensée, écrire mieux, plus vite. L’IA est devenue banale. Presque invisible. Sauf qu’elle est tout sauf neutre.

D’un côté, c’est un outil puissant. De l’autre, un désastre écologique: centres de données ultra-énergivores, consommation d’eau massive, extraction de métaux rares, infrastructures numériques voraces. L’IA pollue énormément.

Quand l’IA devient une arme assumée

Aux dernières nouvelles: Israël aurait potentiellement signé un contrat de 6 millions de dollars avec l’entreprise américaine Clock Tower X pour influencer les réseaux sociaux, les algorithmes… dont les réponses de modèles d’IA comme ChatGPT.

L’objectif c’est de rendre les narratifs pro-Israël plus visibles, plus favorables, notamment auprès de la Gen Z. Production massive de contenus, SEO agressif, saturation informationnelle, influence indirecte sur les données qui nourrissent les IA. Le tout assumé comme une stratégie de guerre numérique.

Le piège de la pureté morale

Face à ça, beaucoup dans les milieux écolos, queer ou féministes se posent la question: faut-il continuer à utiliser l’IA, malgré son impact écologique et politique? Et si on arrêtait, par cohérence?

Le problème, c’est que se retirer individuellement ne fait pas disparaître l’IA. Ça laisse juste le terrain à ceux qui ont l’argent, le pouvoir et les stratégies. États, gouvernements autoritaires, milliardaires, industries de la propagande.

Abandonner l’IA “par principe”, sans réflexion collective, c’est souvent abandonner l’espace symbolique, discursif et algorithmique à l’extrême droite et aux pouvoirs en place.

Un faux dilemme soigneusement entretenu

On nous force à choisir: écologie ou luttes. Pureté ou efficacité. Comme si nos combats devaient être irréprochables pour exister. Pendant ce temps, les infrastructures les plus polluantes de l’IA tournent à plein régime pour l’armée, le capital et la communication d’État — sans que ça ne choque grand monde.

Le vrai problème n’est pas que des militant·e·xs utilisent l’IA pour écrire, traduire ou organiser. Le vrai problème, c’est que ces outils échappent totalement au contrôle démocratique.

Le risque du vide

L’histoire est claire: les vides politiques ne restent jamais vides. Si les luttes progressistes désertent l’IA, d’autres s’en chargeront. Et entraîneront les algorithmes à leur image.

La question n’est donc pas “faut-il utiliser l’IA ou non ?” Mais qui l’utilise, pour raconter quoi, et avec quels moyens. L’IA ne sauvera ni la planète ni nos luttes. Mais la laisser aux mains de ceux qui la considèrent déjà comme une arme, c’est risquer de perdre le récit. Et parfois, perdre le récit, c’est perdre bien plus.

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