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MindGeek, le grand prédateur du X

MindGeek, le grand prédateur du X

En flirtant avec l'illégalité, une firme très opaque a établi sa domination sur l'industrie du porno, hétéro comme gay, à travers une multitude de «tubes» comme PornHub.

Google, Amazon, Facebook… on connaît tous les géants d’internet. Pourtant, un acteur très discret et dont les résultats financiers sont un secret bien gardé se taille une place de choix sur la Toile. Son nom ne vous dit sans doute rien: MindGeek a été créé en 2013 (après s’être longtemps appelé Manwin). Et si cette discrète société basée à Luxembourg figure parmi les 10 plus gros consommateur de bande passante du monde, c’est parce qu’elle est devenue l’acteur incontournable de l’industrie pornographique.

Profits colossaux
XTube c’est MindGeek – comme RedTube, YouPorn, Tube8 et un nombre impressionnant de «tube» déversant des clips classés X «gratuits». Navire amiral, PornHub revendique près de 80 milliards de vidéos vues et 100 millions de visiteurs par jour. Avec un tel trafic, MindGeek tire des profits colossaux de la publicité en ligne. Créateur de Manwin et de MindGeek (dont il a été écarté), l’Allemand Fabian Thylmann en était un des pionniers dès les années 1990. Au tournant de 2010, l’investisseur s’est engagé dans une course aux rachats de «tubes» à grands renforts de montages financiers. Résultat: un quasi monopole, qui lui a permis au passage de mettre la main sur une bonne partie des studios de la San Fernando Valley, la mecque californienne du X. Le porno gay n’échappe à la fringale de l’empire MindGeek, qui a absorbé plusieurs sites destinés à ce public, comme GayTube dès 2011.

Mais plus que l’argent de Wall Street, ce sont les contenus qui font la fortune des «tubes». Or ceux-ci sont en grande partie piratés par des particuliers, avant d’être téléchargés sur de multiples plateformes de visionnement. Pour un petit studio ou une producteur indépendant, la détection et le signalement des vidéos volées (et souvent renommées et modifiées) en vue de leur suppression deviennent une mission impossible. Pour ne rien arranger, ce qui reste de l’industrie du porno, éclatée et stigmatisée, semble incapable d’actionner les lois antitrust capable de brider l’hégémonie d’un acteur comme MindGeek.

Collaboration à contrecoeur
La situation a toutefois évolué ces dernières années, alors que MindGeek achevait de dominer le marché. Les studios, quand ils n’ont pas été rachetés par l’«hydre» du porno, ont fini par collaborer à contrecœur. Ils sont nombreux à utiliser les «tubes» pour promouvoir leurs sites payants, avec à la clé un partage des bénéfices sur les abonnements. MindGeek en capterait jusqu’à 50%, selon «The Economist».

Cet «écosystème vampirique» a des conséquences sur l’industrie du porno, qui voit ses perspectives de bénéfices s’effondrer. Une situation qui touche en premier lieu les acteurs et techniciens, forcés de tourner davantage pour des salaires en chute libre.

Déni
Quant à l’internaute amateur de X, il peut croire qu’il est le bénéficiaire de ce système, qui lui apporte une quantité illimitée de films pour pas un rond. A condition qu’il ne soit pas découragé par les popups intempestifs et les logiciels malveillants, et qu’il se satisfasse d’une pornographie de piètre qualité, réalisée dans des conditions douteuses, voire purement et simplement volée. Des chercheurs américains ont aussi relevé que les «tubes», à travers leurs algorithmes et mots-clés, canalisent une avalanche de stéréotypes sexistes, racistes et homophobes. Comme le résumait Shira Tarrant, professeure de l’Université Cal State dans «The Atlantic», «dès que les gens sont excités sexuellement, ils entrent dans une sorte de déni politique et économique sur ce qu’ils sont en train de faire».