Lausanne
#fetish

La SeXorcisto présente Lith Li

ven 26 avril, 21:00
Lausanne

Happy Birthday, GT’s!

sam 27 avril, 19:00
Genève
#Littérature

Vieille comme la rue? La prostitution hier et aujourd’hui

ven 19 avril, 17:30
©larissa_fuerderer
Lausanne
#Humour

Edwin Ramirez

ven 26 avril - dim 28 avril

Je suis séropositif, mais je ne me soigne pas

Par crainte des effets secondaires des traitements anti-VIH, Ruben a fait le choix inhabituel de ne pas suivre de trithérapie lorsqu’il a appris qu’il était atteint du virus du sida. Témoignage.

Ruben a un visage doux et avenant, éclairé par de grands yeux bleus rieurs. Un look soigné, une allure sportive. Ce jeune webdesigner suisse à l’enthousiasme communicatif fait partie des nombreux artistes et créatifs que Berlin attire comme un aimant ces dernières années, où il s’est installé à son compte à la fin des années 2000.

Ruben est séropositif depuis sept ans mais il ne prend pas de médicaments, car il se méfie des effets secondaires et des potentiels effets à long terme. Une décision à contre-courant, qui suscite souvent incompréhension et méfiance, et peut facilement mettre ses interlocuteurs mal à l’aise. Le jeune homme n’est pourtant ni dans l’attente de la mort ni dans le déni. Bien au contraire: il fait des analyses sanguines très régulièrement. Avec un taux actuel moyen de 700 cellules CD4 par millimètre cube de sang, il est largement au-dessus du taux de 350 cellules CD4 par millimètre cube de sang en-deçà duquel il est recommandé de commencer une trithérapie.

Le pouvoir de contaminer
Les médecins lui avaient pourtant dit que son état de santé se dégraderait au plus tard au bout de cinq ans après la contamination s’il ne prenait pas de médicaments. Mais cela fait désormais sept ans que Ruben vit sans traitement et son état de santé est resté stable. Il se réjouit d’être en forme, mais n’oublie pas pour autant ce virus qui sommeille en lui, et se dit prêt à suivre une trithérapie le jour où il atteindra le seuil critique.

Lorsqu’il a été diagnostiqué séropositif, Ruben était déjà porteur du VIH depuis deux ans: «J’ai eu l’avantage d’avoir vécu deux ans avec le virus sans le savoir, explique- t-il. Jusqu’à présent, c’était les deux meilleures années et les plus saines de ma vie. C’est aussi pour cette raison que je ne voyais pas pourquoi j’aurais dû aller moins bien avec le virus dans les années à venir. […] C’est pourquoi en ce qui me concerne c’est moins une décision de ne pas suivre une thérapie que de faire en sorte de ne pas se retrouver dans la situation où l’on doit effectivement se décider à prendre des médicaments.»

C’est pour cela qu’il s’astreint à mener une vie saine en faisant attention à son alimentation, riche en fruits et en légumes, en faisant du sport et de la méditation. Le jeune homme n’a cependant pas renoncé à faire la fête, mais compense en consommant peu d’alcool et en ne prenant pas de drogues dures. L’annonce de sa séropositivité a bien évidement changé son rapport à la sexualité: «Au début c’était difficile, parce qu’en tant que séropositif on est encore souvent discriminé par des gens ignorants, y compris parmi les homos. C’était très difficile de le dire. Avec le temps, ça s’est arrangé, mais tu as toujours cette responsabilité. C’est pourquoi j’essaye la plupart du temps d’en parler avant. Beaucoup de gens prennent d’ailleurs aussi des médicaments parce qu’ils ne veulent plus avoir à porter le fardeau de pouvoir contaminer les autres.»

Changement de vie
Avec le temps, Ruben a appris à accepter sa séropositivité. Il s’est fait une raison. Mais au lieu de se résigner face à l’inexorable avancée de la maladie qui se terre pour l’instant en lui, il s’est résolu à vivre «positivement » plutôt que négativement la présence du virus dans son corps. Son optimisme acharné peut laisser pantois, tant sa façon d’envisager la maladie est aux antipodes de celle de la plupart des séropositifs: «Quand on est atteint d’une maladie chronique, quelle qu’elle soit, on peut décider si on se place dans un rôle de victime ou si on en fait une occasion pour un changement de vie. Je connais beaucoup de gens qui essayent automatiquement de ralentir, de s’alimenter différemment et de garder leur corps en forme en faisant du sport, c’est une décision lucide: oui, j’ai un virus mortel en moi et je peux vivre avec; non, le virus ne va pas m’achever, je peux vivre en harmonie avec lui, il fait partie de mon corps. C’est pour cela que je suis reconnaissant d’avoir ce virus en moi – sans lui je ne mènerais pas ma vie de façon si lucide. En définitive, je vais beaucoup mieux pour cette raison.»

Toute une histoire de timing

Quand faut-il commencer une thérapie anti-VIH? Eléments de réponse.

En Suisse comme en Europe, il est recommandé de suivre une trithérapie à partir du moment où apparaissent les premiers symptômes du sida – altération de l’état général, infections opportunistes, anomalies neurologiques, etc. – et chez les personnes séropositives qui ne présentent pas ces symptômes, à partir du moment où le taux de cellules CD4 est inférieur à 350 par millimètre cube de sang. Les médecins conseillent d’ailleurs en général à ces derniers de commencer le traitement dès qu’ils ont un taux inférieur à 500 cellules CD4.

«Sans trithérapie, le virus détruit le système immunitaire et peut donc causer de graves infections opportunistes tout comme différentes formes de cancers ou une pneumonie grave», prévient Harry Witzthum, chef Information et communication à l’Aide suisse contre le sida. «Dans le cas où le système immunitaire devient trop faible, le symptôme sida se développe. D’autre part sans trithérapie les risques de transmettre le VIH à son partenaire est élevé vu qu’une trithérapie efficace peut réduire ce risque à un minimum par une baisse de la charge virale. Dans aucun cas il n’est raisonnable d’attendre que son état de santé s’aggrave.»

La durée de la phase intermédiaire entre la contamination par le VIH et l’apparition du sida diffère selon chaque individu. Selon l’infectiologue allemande Christiane Cordes, qui compte parmi ses patients plusieurs personnes séropositives qui refusent de prendre un traitement, celle-ci peut durer entre quelques mois et quinze ans: «Dans des cas très rares, il y a des «elite controllers» comme on les appelle. Ce sont des patients chez qui la multiplication du virus est très basse, dont le taux de cellules CD4 reste stable pendant très longtemps et dont la charge virale est en partie indétectable. Ils peuvent contrôler le virus sans thérapie anti-HIV. C’est malheureusement une véritable minorité, qui représente moins d’1% des patients.»

Le plus tôt possible
Mais les professionnels de la santé estiment que commencer une trithérapie le plus tôt possible reste la meilleure solution, d’autant plus que comme le rappelle Harry Witzthum, «les effets secondaires des trithérapies modernes sont aujourd’hui bien meilleurs que celles dans le passé, cela ne pose plus une telle barrière pour commencer un traitement». Les nouvelles générations de médicaments sont en effet plutôt bien supportées par les patients, car elles ne présentent plus d’effets secondaires lourds tels que diarrhées et perte de poids. Christiane Cordes est elle aussi convaincue de la nécessité de débuter un traitement sans tarder: «Nous estimons que les patients qui peuvent commencer aujourd’hui leur thérapie anti-HIV dans un bon état général et la prendre régulièrement, c’est aussi une question de discipline, ont certainement une espérance de vie presque normale, à condition qu’il n’y ait pas d’autres facteurs de risque comme le tabac, une consommation excessive d’alcool, la drogue, le diabète. Plus on commence tard une thérapie anti-HIV, plus c’est compliqué pour le système immunitaire de se reconstituer.»