Bi oui comme Bowie

David Bowie revient avec un album mystérieusement nostalgique des années 70, la décennie où il inventait le «bisexuel chic masculin». Que reste-il des amours bisexuelles du showbiz?

«Mâle au féminin, légèrement fêlé, un peu trop félin, tu sais que tu es… Beau oui comme Bowie». En 1983, Serge Gainsbourg rendait hommage à la beauté androgyne de David Bowie par l’intermédiaire de la voix exaltée d’Isabelle Adjani sur l’album qu’il lui avait concocté sur mesure. Coup de théâtre et ravissement pour les fans de la star anglaise : 30 ans plus tard, il est revenu, malgré la rumeur qui le disait à l’article de la mort. Sobrement, comme pour faire la nique à l’artillerie lourde généralement mise en place pour le lancement d’un nouvel album d’un artiste de son envergure. Le héros est de retour. Pourtant, il nous avait habitués à plus de tapage. A lui seul, son nom évoque le glam rock et la bisexualité flamboyante des années 70. Beau oui comme Bowie, un des seuls pour qui l’appellation d’icône n’est pas usurpée. Adulé en son pays et érigé en modèle absolu par les teenagers du monde entier pendant les seventies, son aura est unique. Mine de rien, Bowie est le seul qui a tout fait avant tout le monde.

«Voulez-vous du café?»
Les accoutrements sanglants et les perruques Marie-Antoinesques de Lady Gaga? David Bowie faisait pareil, le style en plus et le flair avant-gardiste plutôt qu’un plan de marketing. Madonna et Britney, pionnières de la galoche «bisexuelle chic» sur les écrans de MTV en 2003? Et quoi encore! Mr Bowie était passé par là. Par contre, plutôt que d’embrasser Mick Jagger à pleine bouche lors d’un show télévisé, il emmenait son amant voir des films porno gay. C’était la période glitter, au tout début des années 70, et tout le monde voulait faire partie de la révolution bisexuelle. La légende veut qu’un jour, Jerry Hall, l’ex-femme de Jagger et ancien mannequin texan, ait surpris son mari et Bowie au lit. Au lieu de s’offusquer, celle-ci leur aurait simplement demandé : «Voulez-vous du café?» La classe on l’a ou on ne l’a pas, Jerry, elle, elle l’a. La bisexualité présumée des stars a toujours fait rêver le showbiz.

Passage obligé
L’équation est simple : en s’affichant bi, un acteur ou un chanteur sexy doublera son capital fantasme. James Dean en savait quelque chose, Marlon Brando aussi. Et plus récemment, Angelina Jolie, James Franco ou encore Katy Perry, dont le premier hit «I Kissed A Girl» a lancé la carrière en 2008, n’ont pas hésité à user du bon filon. Ah ça c’est sûr, ça ratisse large et ça peut rapporter gros le marketing de la bisexualité! Ces dernières années, elle est carrément devenue un passage obligé à toute célébrité désireuse de corser sa réputation trop sage. A tel point que le concept n’a plus rien de sulfureux, il est tout simplement ringard.

Du coup, entendre Bowie revenir à pas feutrés sur le devant de la scène, sans aucune stratégie marketing ni scandale à l’horizon, mais juste avec un album nostalgique de ses années berlinoises, cela pourrait bien s’appeler le néo-subversif.

David Bowie, The Next Day, distr. Sony Music