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Indonésie: une BD pour les droits LGBT

Kamilia Manaf, une militante lesbienne indonésienne, propose le recours à la bande-dessinée pour sensibiliser la jeunesse aux droits humains. Une initiative intéressante que nous fait découvrir Patricia Curzi de l'ILGA.

Kamilia est une jeune militante lesbienne et féministe d’une vingtaine d’années. En 2006, elle a fondé l’Institut Pelangi Perempuan (Centre indonésien pour les jeunes lesbiennes) et elle est actuellement la directrice exécutive de cette organisation. En janvier 2008, elle a été élue membre du conseil d’administration de ILGA Asie pour représenter la jeunesse LGBTIQ en Asie. Elle a été élue « Personnalité LGBT- phare de l’année 2010 » par FRIDAE.COM, le plus grand site LGBTIQ en Asie. Le 29 octobre 2010, l’Institut Pelangi Perempuan a lancé la bande dessinée sur les principes de YOGYAKARTA à Jakarta.

Patricia Curzi: Comment toi et ton organisation avez-vous eu cette idée d’utiliser la BD pour faire connaître les principes de Yogyakarta ?

Kamilia: Dans notre organisation, on travaille beaucoup avec des jeunes LGBTIQ et nous pensons que c’est important pour eux de connaître leurs droits, de comprendre et d’appliquer les principes de Yogyakarta. Nous avons demandé à quelques uns parmi ces jeunes s’ils connaissaient ces principes et s’ils étaient faciles à comprendre. La plupart ont répondu que les principes étaient trop difficiles et rédigés dans un langage juridique et inaccessible et que le langage des droits humains c’était trop compliqué pour eux. Comme pour nous c’est primordial que l’information soit diffusée, nous avons commencé à réfléchir pour trouver un moyen de rendre ces principes plus accessibles pour la jeunesse en Indonésie. Nous savons par expérience que peu de jeunes sont intéressés par les droits humains et c’est sans doute dû au fait que ces droits utilisent un langage technique et difficile. Nous avons commencé par faire une BD de récits de vie qui seraient plus facile à comprendre pour elles et pour eux. On a utilisé l’image et le dessin comme outils pédagogiques. C’est important d’utiliser un mode de communication adapté au groupe que l’on veut cibler et atteindre.

Parmi les principes, lesquels ont-ils été les plus difficiles à illustrer et pourquoi?

Nous n’avons pas illustré les 29 principes, on a fait une sélection de quelques uns qui sont directement reliés à la vie des jeunes LGBTIQ. Nous avons notamment choisi le droit à l’éducation, le droit à l’égalité et à la non-discrimination, le droit à la liberté d’opinion et d’expression. Peut-être que prochainement nous allons élargir ce projet et illustrer les 29 principes.

Tu ne penses pas qu’utiliser un moyen de communication qui est normalement utilisé pour le loisir, la détente, risque de réduire ou d’appauvrir le message très fort qui est contenu dans ces 29 principes ?

Pas du tout ! Notre maître-mot c’est l’ “EDUFUNTAIMENT” : Education, Fun, Entertainment soit Eduquer, s’amuser et se détendre. La plupart du temps, on utilise les loisirs et l’amusement dans notre travail. On crée en même temps des espaces pour s’amuser comme des clubs de sport (badminton et boxe) et des groupes de soutien. On utilise la musique pop; le théâtre, des shows de drag kings et de drag queens, on fait de la danse moderne ou classique mais on n’oublie jamais le message que l’on veut faire passer. On passe par le loisir, le plaisir, cela nous aide beaucoup à envoyer le message au groupe que l’on vise. On voudrait expérimenter encore davantage de stratégies « pop » pour renforcer les jeunes LGBTIQ. C’est génial d’essayer de changer l’activisme et les stratégies traditionnelles. Nous sommes en majorité des jeunes et nous savons que c’est difficile d’assister à des longues réunions, à des séminaires. C’est important de faire campagne pour les droits des personnes LGBTIQ, c’est pour cela que « L’EDUFUNTAINMENT » est un outil pédagogique génial. Jusqu’ici ça marche bien. Nous avons aussi un club Anak Pelangi. Ce club, c’est une sorte de club artistique et culturel pour les personnes LGBTIQ dans lequel on leur propose de la formation pour mettre en place des campagnes pour les droits des personnes LGBTIQ.

Jusqu’ici qu’avez-vous fait de cette BD sur les principes de YOGYAKARTA ?

On a présenté la BD dans différentes villes d’Indonésie et le lancement proprement dit a été mis en place à Jakarta, Bandung, et Yogyakarta. Dans la programmation du lancement de la BD, on a de nouveau utilisé l’art et les spectacles: la danse, le pop, le théâtre, les shows de drag queens et de drag kings. Un fait remarquable : il y a une jeune communauté lesbienne dans la ville de Bandung qui veut maintenant créer des organisations pour les jeunes femmes LBT. C’est la preuve que nous avons réussi à construire la confiance auprès des jeunes. Nous avons aussi diffusé la BD auprès d’autres militant-e-s des droits humains et auprès de groupes religieux progressistes et modérés qui soutiennent les groupes LGBTIQ. Lors du lancement de la BD dans beaucoup de villes, nous avons collaboré avec des groupes locaux qui défendent les droits humains. C’était aussi une manière de mobiliser à l’avance leur soutien contre les menaces et les attaques des groupes fondamentalistes. Nous avons aussi découvert que peu de militant-e-s des droits humains étaient au courant des principes de YOGYAKARTA. En fait cette collaboration a aussi été un moyen de leur faire connaître les principes de YOGYAKARTA. A notre surprise, nous avons reçu diverses propositions émanant du réseau international. L’objectif serait de faire des traductions pour pouvoir utiliser cette BD ailleurs pour organiser le travail avec les jeunes LGBTIQ dans différents pays. Nous avons reçu des demandes de militant-e-s au Brésil, en Argentine, en Chine, en Thaïlande, en Turquie, au Japon et au Pakistan. Au niveau des Nations Unies nous avons aussi fait la promotion de la BD lors de la 55ème session de la Commission des Femmes dans le panel d’ILGA portant sur la thématique d’améliorer l’accès à l’éducation et au travail pour les personnes LGBTIQ.

Maintenant que vous voila branché-e-s sur la créativité et les plans artistiques ; est ce qu’il y a des projets pour faire un film basé sur cette BD ?

En fait oui ! C’est notre grand rêve du moment : pourquoi ne pas utiliser encore d’autres méthodes éducatives pour promouvoir les droits des personnes LGBTIQ ? Pourquoi pas une campagne vidéo ? Nous vivons dans un mode Tech ! (ICT Information, Communication, Technologie). On pourrait charger un film sur Youtube, le diffuser via Internet et atteindre les militant-e-s partout dans le monde. Oui c’est très clair. Il faudrait utiliser encore plus d’outils Tech ! pour atteindre nos objectifs.

Traduction à partir de l’anglais : Isabelle JACQUET