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«Il faut laisser aux gens le temps d’évoluer»

Dans un Jura bernois réputé austère, et qui avait réservé un accueil glacial à la LPart, les nouveaux partenariés font changer les esprits et les attitudes au quotidien. Rencontre avec trois couples heureux.

Tramelan, un peu plus de 4 000 habitants, dans une vallée verdoyante à 900m d’altitude. Pas moins de deux changements de train pour y parvenir depuis Bienne, et l’impression d’être loin de tout. «C’est un peu la région oubliée de Suisse romande. Il n’y a qu’à voir les cartes à la TSR, ou les pages cinéma dans les quotidiens romands: nous sommes les premiers qu’ils coupent quand il n’y a pas la place…», constate Mathieu, conseiller communal et actuellement vice-maire de Tramelan. Aux visiteurs qui font un détour par cette petite ville industrielle, Mathieu et son copain Régis [photo ci-dessous] (également secrétaire de Juragai* et coordinateur de la Pride‘08) ont coutume de montrer avec amusement «la rue des Temples», où sont alignés les temples protestant, catholique, baptiste, mennonite, évangélique, sans oublier le temple laïc (l’hôtel de ville) et consumériste (la Migros). Influence des Eglises, ruralité, isolement… Tramelan et ses clichés auraient tout pour décourager un couple gay…? En tout cas pas Régis et Mathieu, qui défendent l’esprit de solidarité et le dynamisme de leur ville.
Il y a quelques mois, la fête organisée pour leur partenariat a accueilli non seulement politiques de tout bord, mais aussi représentants des communautés religieuses. «On a visé large dans un but un peu politique, avec la volonté de dire: Oui, ça peut marcher.», explique Mathieu. Depuis, quand le conseil communal est en déplacement «avec les épouses», Régis fait partie du voyage. «On nous fait défiler derrière la fanfare et personne ne fait la moindre remarque», observe Mathieu, «…il faut dire que Régis est aussi quelqu’un qui discute volontiers avec les gens… bref, quelqu’un d’éminemment sympa.» Piquant un léger fard, l’intéressé précise: «On a tellement banalisé la chose! Pour dire qu’on habite dans une région rurale, on est tout à fait acceptés.»

Provocations
Retour en plaine, direction La Neuveville. C’est sur la place de cette bourgade médiévale bernoise, tout près du lac, que Karine et Nathalie [photo] ont ouvert il y a quatre ans «L’école est finie»**, un vieux café rénové avec soin, auquel elles ont apporté des touches ludiques et nostalgiques: pupitre, boulier, photos de classes (amenées par les clients eux-mêmes)… autant de clins d’œil croisés à l’école de papa et aux années yé-yé. Et une terrasse baignée de soleil sur laquelle touristes et habitants viennent se prélasser.
regismathieu_web.jpgMême si Nathalie est originaire d’ici, la reprise de la pinte du village, «La croix blanche», par un couple de femmes a d’abord provoqué quelques réactions hostiles. «C’est comme si on leur avait enlevé quelque chose. Des gens ont commencé à dire que ce serait un ‘bar à gouines’. Ils sont venus demander: ‘C’est qui ton mari?’ J’ai dû un peu taper sur la table.» Heureusement, après quatre ans, l’Ecole est finie a gagné le respect de tous, entre autres en tissant des liens avec les pêcheurs, éleveurs et agriculteurs du coin. Mais rien n’est jamais acquis, souligne Nathalie: «Il arrive encore parfois que des clients me ‘cherchent’ en posant des questions. Je les sens venir. Souvent, ils savent déjà, mais ils vous testent, ils veulent voir si vous êtes bien avec vous-même. Eh bien, ça se dit. Et avec le sourire: C’est comme ça, point barre!»

En fanfare
Mais les pacsés les plus célèbres de la région, c’est sans doute Cédric, pasteur, et Yvan. Il y a un an, leur union avait reçu un écho considérable. Pas seulement parce que la fanfare de Malleray, village d’origine de Cédric, était présente, mais aussi parce que c’était le premier partenariat de la région célébré dans une église. «Il y a des gens qui ont vécu là des choses assez uniques et qui l’ont complètement assumé», se souvient Cédric. Une semaine après la célébration, Le Matin y consacrait sa une. «Au village, les débats n’ont pas porté sur la célébration du partenariat, mais plutôt sur la médiatisation. On n’aime pas tellement parler de ces choses.» Yvan et Cédric se défendent d’avoir voulu médiatiser l’événement: «La démarche est née d’une conviction personnelle. Quand on s’engage avec quelqu’un, je trouve évident que cela se fasse devant Dieu», précise Cédric. Quant aux courriers vouant aux gémonies le couple et la pasteure qui les a unis, Yvan relativise: «Par rapport à toutes les lettres de félicitations que l’on a reçues, c’est rien… même si l’on ne peut pas oublier les mots qui ont été utilisés.» En revanche, Cédric reçoit encore des félicitations – un an après. Dimanche dernier, d’une paroissienne octogénaire. «…et ça s’est répété des dizaines de fois, y compris avec des gens dont on se disait qu’ils allaient faire la tête. On n’a que des surprises positives… Il faut laisser aux gens le temps d’évoluer. A partir du moment où il y a quelque chose qui explose à la une du journal, les personnes ont le droit d’avoir un peu de temps pour faire du chemin.»

* www.juragai.ch
** 6, Grand-Rue à La Neuveville – www.lecole-estfinie.ch