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L’inconnu que tout le monde connaît

Pendant treize ans, Pen s’est travesti la nuit pour faire la drama-clown et amuser les clients. Aujourd’hui, il a ouvert son restaurant à Annecy.

«Je me suis arrêté chez des clients, je n’avais plus de réseau.» Il sirote sa bière. Ainsi débutait l’entretien que j’avais agendé avec celui qu’on connaît sous le nom de Pénélope, ou Pen. Chez des clients? «Oui, ce sont des gens que je connais bien.» Rien de surprenant manifestement, tous ses clients lui sont comme des amis qu’il chérit. Lui, c’est le patron du restaurant Chez Pen. Son patronyme intégral ne sera pas révélé dans ces lignes, même pas son prénom: «C’est la seule chose qui me rattache à ma vie. Cela me permet de me réfugier et prendre du recul.» Quand on dort quatre heures par nuit, il faut bien au moins ça.

Celui qui a fait un diplôme de comptabilité s’est une nuit retrouvé à se travestir pour devenir Pénélope Jolicoeur pendant treize années: «Les autres travestis m’ont appelé comme ça parce que je n’arrêtais pas de me remettre du rouge à lèvres, j’avais toujours peur qu’il n’y en ait plus.» L’art du détail.

La pieuvre tatouée dont un tentacule dépasse sur son cou désigne magnifiquement ce touche-à-tout. Après les folies de la nuit en discothèque, l’homme de 39 ans paraissant fichtrement moins (merci la jovialité) a ouvert avec son ancien patron en 2010 son restaurant: «Maintenant je fais un métier de bouche», rigole-t-il l’œil malicieux. Un lieu qui marche bien grâce à lui et à son équipe au caractère sympathique. «J’essaie toujours d’être différent, de changer un peu dans mon contact avec les clients, car c’est presque comme une relation dans un vieux couple: on peut se lasser.» Et il se donne tant à son travail, qu’il s’oublie parfois un peu dedans. Sans que cela ne le dérange vraiment, car il en tire un grand plaisir: «Les clients, tu les aimes. Tout le monde a la chance de pouvoir être aimé», assène-t-il sans broncher, «ma force c’est ma naïveté, de croire encore en l’humanité.»

Au service des clients
Mais cette relation dépassant le simple «bon appétit» a son revers. Seul îlot officiel gay-friendly, il n’aurait pas apprécié ouvrir un bar gay: «C’est un milieu ingrat. Ils viennent souvent quand ils sont célibataires, et une fois en couple, ils disparaissent de la circulation. Je n’ai pas envie de travailler pour des gens qui pourraient te renier.» Donc, messieurs-dames, la prochaine fois que vous allez vous acoquiner dans un lieu LGBT, ne la jouez pas «Je t’aime, moi non plus», mais ayez à l’idée que le serveur ou le patron vous apprécie sûrement, et il faut bien le lui rendre.

Chez Pen, 11 Avenue Berthollet, Annecy www.facebook.com/ChezPen

Sortie incognito

Lui qui a si peu de temps pour se libérer et se retrouver un peu, lui qui connaît tout le monde et que tout le monde connaît, ne donnera aucune adresse précise. Non pas qu’il ne veut pas croiser ses clients, mais bien pour pouvoir sortir sans penser au travail, comme tout le monde. Mais il vous aime, juré craché.
Le mieux pour lui est d’abord une virée dans la nature, «le meilleur endroit pour s’isoler. j’adore profiter de ces instants calmes, sans bruits.» Toujours côté nature, il ne se refuse jamais une petite partie sur le green d’un golf. et n’importe lequel lui va.
Quand il sort avec ses amis, c’est vers des restaurants «paumés mais adorables» qu’il se tourne : «j’aime quand c’est calme pour pouvoir discuter avec eux.» Le grand plus dans les bars et autres bouis-bouis est la petitesse de l’espace: «Plus c’est confiné, plus j’aime. On peut faire des rencontres sympathiques plus facilement qu’ailleurs.»
Parfois, il se rend à Lausanne, en passant dire bonjour au Pink Beach et au Saxo : «Les trois patrons ont un rapport humain avec les clients, à l’ancienne, et ils aiment que les choses soient bien faites.»