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VIH-Sida: A quoi jouent les homos?

Résonnant comme un signal d’alarme à la veille de la dernière Journée mondiale du sida, les projections de l’OFSP pour 2005 font état d’une hausse de 37% des nouveaux cas d’infection VIH chez les homosexuels masculins. Entre goût du risque, inconscience et démobilisation communautaire, quel diagnostic tirer d’une situation préoccupante? Bilans contrastés.

Il n’est pas coutume à l’Office fédéral de la santé (OFSP) de communiquer sur la base de projections statistiques. C’est pourtant ce qu’a choisi de faire l’Office à la veille de la dernière journée mondiale de lutte contre le sida, en mettant en exergue la forte augmentation prévue des nouveaux cas de VIH chez les homos (ou plutôt, dans le jargon de la santé publique, les «hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes») en 2005. Une hausse impressionnante, qui intervient alors même que l’épidémie est en légère décrue dans le reste de la population. Même dans le langage statistique confédéral, on entend comme un signal d’alarme en direction des milieux homos. A Genève, l’association Dialogai dispose depuis un an avec «Checkpoint» d’un centre de dépistage et de conseil sur le VIH et les IST, Vincent Jobin, responsable santé sexuelle, y considère que l’augmentation des nouvelles infections dans les zones urbaines comme Genève est bien plus forte que l’estimation nationale: «37% c’est beaucoup, mais à Genève on arrivera sans doute à 100% de plus de nouvelles infections.»
A tort, on pourrait croire que cette augmentation est inéluctable. En effet, les séropositifs n’ont jamais été aussi nombreux. Ils y représenteraient jusqu’à 15% des individus fréquentant la scène gay – ceci depuis que la mortalité liée au VIH/sida a été fortement réduite (même si elle n’a pas disparu: 84 morts en Suisse en 2004, huit fois moins qu’en 1994). Du coup, il n’est pas rare d’entendre comparer la prévalence VIH dans la communauté gay lémanique à celle d’Afrique subsaharienne. Et encore, explique Vincent Jobin, «chez les gens qui disent pratiquer le SM, par exemple, on estime que presque la moitié sont séropositifs. Et selon les lieux que l’on fréquente il peut y avoir une prévalence énorme.»
Dans ce contexte, le véritable problème, c’est l’abandon de la capote par un nombre croissant de gays. Ce relâchement de la protection, ou «relapse», est attesté de manière de plus en plus nette par les réponses volontaires aux questionnaires «GaySurvey» diffusés dans la presse gay suisse. En 2004, 20% des homos ayant répondu à cette enquête admettaient avoir eu des rapports non protégés avec des partenaires occasionnels. Ils n’étaient que 9% en 1994. En outre, GaySurvey signale une augmentation régulière du nombre de partenaires occasionnels et de la fréquence des rapports anaux.

Relapse, mon amour
Rien n’est moins simple que de dessiner un profil-type des nouveaux infectés. Les chiffres de l’OFSP indiquent que leur âge médian est de 37 ans, que plus de la moitié ont été infectés dans les six mois avant le test et que la part des personnes d’origine latino-américaine y est en augmentation … mais difficile d’en tirer plus d’éléments, notamment sur les conditions de contamination. Pour Vincent Jobin, l’homme gay a peut-être d’emblée une relation particulière au risque: «Dès l’adolescence, il faut qu’il se positionne: il prend le risque d’être identifié, rejeté, et il se construit aussi autour de cette notion de risque.» Une hypothèse que confirmerait, en matière sexuelle, la prolifération des sex clubs, l’utilisation de drogues et substances lors de rapports, l’engouement pour les pratiques hard, voire la fascination pour le bareback (voir page 11). Toutefois, d’autres facteurs plus inattendus sont mis en évidence: la confiance et… l’amour. C’est ainsi que des risques majeurs sont pris dans le cadre du couple: «Par exemple, beaucoup d’hommes ont un partenaire stable et des partenaires occasionnels avec qui ils veulent aussi privilégier une sexualité épanouie. « Deux ou trois rapports protégés, je te fais confiance… puis j’engage un rapport non protégé. »» A l’ère du partenariat enregistré et du mariage gay, l’idéal d’engagement, de fidélité et de conjugalité, impliquant dans l’esprit de beaucoup l’abandon de la capote, serait ainsi l’un des «nœuds du problème».
Ce qui rend le «relapse» particulièrement insaisissable, c’est qu’il ne concerne pas un quelconque manque d’information. Au contraire, les acteurs de la prévention constatent que ceux qui prennent le plus de risques sont souvent très au fait des modes de transmission du virus. Il s’agit souvent des trentenaires qui ont vécu l’époque la plus noire de l’épidémie. «On est souvent confrontés à des gens qui disent leur ras-le-bol de la capote, explique Vincent Jobin. Et cela, ils l’expriment comme un besoin, comme une exigence. Alors on aura beau leur répéter dix fois de mettre des capotes, quand ils sortiront d’ici, ils feront ce qu’ils veulent.»
Pour répondre à cette lassitude, des messages de «réduction des risques» ont été expérimentés ces dernières années. Ils proposent aux hommes des moyens de réduire les risques d’infection encourus lors de rapports délibérément non protégés: pas de sperme dans la bouche, du gel pour des rapports anaux sans capote, etc. Une piste intéressante pour Vincent Jobin, même s’il ajoute qu’il est «difficile de véhiculer des informations « tout-public » de ce genre, même au sein de la communauté gay. En revanche, on peut le faire individuellement dans un entretien, en cernant les besoins et les limites de la personne en face de soi.»

Ayatollahs du tout-capote?
Accompagner les gays dans leurs prises de risques, l’idée s’est imposée dans les campagnes de prévention communautaires en Europe du Nord – avec des résultats qui restent à mesurer. En France, l’association Aides a testé dès 2001 sur ses flyers des slogans tels que «Sans capote, mieux vaut se retirer avant d’éjaculer.» Un message qu’Emmanuel Château, vice-président d’Act Up Paris dénonce sans détours comme mensonger. Et pour cause: «J’ai été contaminé avec un rapport non protégé sans éjaculation: je rentrerais donc dans le cadre de la « réduction des risques »! C’est un discours débile, abstrait, mais qui contribue largement à brouiller les messages de prévention.» De fait, Act Up Paris souligne l’absence de certitude quant à certains modes de contamination, notamment la fellation… «Beaucoup d’associations nient ou minimisent le risque. De fait, il y a une seule manière de se protéger du sida et jusqu’à preuve du contraire, c’est le préservatif. La question, c’est pas d’être des ayatollahs du tout-capote, c’est la réalité des modes de protection qui sont disponibles actuellement.»
Act Up Paris a dénoncé, cet automne, une «régression» dans la lutte contre le sida en France, soulevant l’insuffisance de données fiables sur l’incidence du VIH, l’indigence des campagnes de prévention actuelles et l’absence de messages ciblés en direction des homos maghrébins et blacks, des séropos, ou encore à l’intention de «ces mecs de 40 ans qui se disent qu’être contaminé c’est pas très grave, car ils s’imaginent mal à 70 ans dans le milieu gay.» Pour l’association parisienne, le relâchement des pratiques de protection individuelles et l’absence de renouvellement des messages de prévention seraient liés. «Historiquement en France, la prévention a largement reposé sur la mobilisation associative et communautaire, explique Emmanuel Château. Or dès la fin des années 90, il y a eu de moins en moins de militants et d’acteurs de prévention sur le terrain, ce qui n’a pas été compensé par un renouvellement des publications ou des créations d’emplois en matière de prévention…» Dès lors que le sida ne fait plus la une des journaux et que la question du VIH est désertée par les associations, pas étonnant que les jeunes et «nouveaux entrants» dans la communauté gay restent sur le carreau: «Quand tu rencontres des jeunes mecs et que tu leur dis que tu es séropo, tu es vraiment surpris de voir que leurs connaissances sur ce sujet sont très insuffisantes …Moi, quand j’étais gamin on me tapait sur l’épaule en me disant « Protège-toi! » quand je sortais. Aujourd’hui non seulement on a plus ça, mais en plus si jamais tu flanches sur la capote, tu auras en face de toi un mec qui ne la mettra pas.»

Act Up Paris
www.actupparis.org

Dialogai Checkpoint
Sur rendez-vous, tél. 022 906 40 40
www.dialogai.org

Epidémiologiquement (in)correct

Un discours offensif et souvent culpabilisateur souligné par des images-choc: les campagnes politiques et actions d’Act Up Paris en matière de VIH/sida ne craignent pas d’aborder les thèmes (redevenus) tabous: mortalité liée au sida, contraintes et effets secondaires des trithérapies, liberté et éthique sexuelle.
A Dialogai, on considère ces initiatives avec circonspection: «La peur n’est plus un élément pertinent. A l’époque de la crise, ça marchait. Mais aujourd’hui, on doit se demander s’il est souhaitable, par exemple, de montrer les problèmes parfois très violents et visibles que produisent les trithérapies. Ici, personne n’est prêt à le faire, car ce serait aussi stigmatiser les personnes séropositives.» A.G.

Avoir du PEP

La prophylaxie post-exposition du VIH (PEP-VIH) est un traitement mis en place dans les 48 heures qui suivent un éventuel contact avec le VIH, lors d’un rapport sexuel non protégé qu’il soit anal, vaginal ou oral avec éjaculation, avec une personne infectée par le VIH. Aux urgences, après évaluation de la situation, la PEP est prescrite par un médecin et assortie d’un premier test de dépistage. Elle consiste en une prise de médicaments
antirétroviraux (trithérapie) toutes les 12 heures pendant 4 semaines. Elle doit en principe prévenir l’infection cellulaire initiale et limiter la propagation locale du VIH.
En fonction de son état de santé, le patient supporte plus ou moins bien la PEP. Les effets secondaires sont handicapants: douleurs sur tout l’appareil digestif, nausées, selles liquides, fatigue généralisée, manque de concentration et d’autres effets parfois. Après 15 jours, la résistance du foie et des reins est testée (risque d’hépatite médicamenteuse). Dans le cadre de la PEP en milieu médical, jusqu’à 1/3 des personnes ont cessé le traitement avant les 4 semaines en raison d’effets indésirables. Rappelons encore qu’il ne s’agit nullement d’une «pilule du lendemain» et que de nombreux doutes subsistent sur l’efficacité de la PEP. E.C.