Le 1er coming out d'Albanie accueilli dans la haine

Candidat du «Big Brother» d’une télévision albanaise, Klodian Çela a déclenché une véritable onde de choc dans son pays en révélant, le mois dernier, son homosexualité devant la caméra.

Ce coming out, l’émigré de 35 ans, qui travaille dans une disco de Milan, l’avait fait en lisant une lettre à sa mère au début du mois de mars. En direct. La réaction ne s’est pas fait attendre. Dans sa ville natale de Lezhë (au nord du pays), une manifestation spontanée s’est déclenchée. Une centaine d’hommes, en majorité des ados, ont défilé dans les rues de la ville du nord du pays, scandant le slogan «Lezhë est propre – nous n’avons pas d’homosexuels» et décrivant Klodian Çela comme la «honte de la ville».

De quel côté est la honte, a rétorqué l’association LGBT albanaise Aleanca, quand «beaucoup de ces jeunes qui ont manifesté se verront obligés de vivre dans la peur dans les rues d’Italie ou de Grèce, marginalisés, discriminés, sans argent et sans dignité»? Dans la presse, l’éditorialiste Fatos Lubonja abondait dans le même sens: «Pourquoi ces jeunes ne protestent-ils pas plutôt contre la pauvreté et le désastre écologique dans leur région? Peut-être précisément parce qu’ils me savent pas comment. Alors ils protestent contre Klodi, l’homosexuel.»

Large débat
Ce tout premier coming out public dans le pays le plus pauvre d’Europe et l’explosion de haine qui l’a suivi ont toutefois eu le mérite de lancer un large débat. Pour la première fois, des reportages et interviews sur la vie des gays dans le pays, notamment durant la dictature communiste, ont été publiés. Ironie du sort, l’événement coïncide aussi avec l’entrée en vigueur d’une loi antidiscrimination, rédigée et adoptée sous pression de l’UE. Il y a peu de doute que son application aux gays rencontre l’hostilité d’une vaste majorité d’Albanais.