Le Kenya refuse de dépénaliser l’homosexualité
Le Haut Cour de justice de Nairobi a rejeté une requête demandant l'abandon des textes hérités de la colonisation britannique, les jugeant conformes à la «culture traditionnelle» kényane.
La déception était immense, hier, parmi les LGBT kényans. La Haute Cour de ce pays a rejeté une requête demandant l’abrogation des lois criminalisant l’homosexualité. Dans sa lecture du verdict, la juge Aburili a estimé que les dispositions actuelles du Code pénal – héritées de l’Empire colonial britannique – étaient conformes à la «culture traditionnelle» du pays et à la Constitution. Elle a aussi rejeté l’idée selon laquelle les personnes n’ont pas le choix de l’orientation sexuelle, évoquant des «preuves scientifiques».
Des militants ont bruyamment fait entendre leur écœurement et leur incompréhension dans une salle d’audience pleine à craquer, raconte l’AFP. «Ces vielles lois coloniales mènent la communauté LGBT à subir violences, chantage, harcèlement et torture. Elles ravagent des vies et n’ont pas leur place dans une société kényane démocratique», a réagi la National Gay and Lesbian Human Rights Commission, principale organisation LGBT du pays. C’est elle qui avait porté l’affaire en justice en 2016, relevant le caractère discriminatoire des articles 162 et 165 du Code pénal, selon elle contraire à la Constitution de 2010.
Entre 2013 et 2017, 534 personnes ont été arrêtées au Kenya pour des relations homosexuelles. Elles risquent théoriquement jusqu’à 14 ans d’emprisonnement.
Définition de la famille
On attendait beaucoup de ce jugement, après la série de décisions historiques, en Inde, en Angola et au Mozambique ces derniers mois. Mais le panel de trois juges kényans a balayé tout rapprochement avec la situation dans ces pays. Selon la Haute Cour, la dépénalisation de l’homosexualité aurait entraîné une reconnaissance des mariages entre personne de même sexe, «contraire à la définition de la famille» dans la Constitution de 2010.
La Haut-Commissaire de l’ONU pour les droits de l’Homme, Michelle Bachelet, a également exprimé sa déception: «Criminaliser des actes visant certains individus sur la base de qui ils sont et qui ils aiment est intrinsèquement discriminatoire et encourage l’hostilité, voire la violence, contre les LGBT.»