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Jad, 23 ans, homo et Palestinien

L'homosexualité est un sujet très sensible en Cisjordanie. Jad le sait bien. Ce jeune homme de 23 ans est obligé de mener une double vie pour se protéger.

Parler de son homosexualité en Palestine n’est pas sans danger. Jad* a accepté mais à certaines conditions: changer son prénom et nous rencontrer dans un endroit où il pourra parler sans être entendu ni compris. Le rendez-vous est pris au beau milieu de la journée dans un café de Ramallah. Installé à la table la plus isolée, Jad se lance: «Mes parents ne sont ni trop ouverts, ni trop fermés.»

Son enfance, il la qualifie de normale même si elle n’a pas été facile. Tout petit, Jad préférait les jouets des filles à ceux des garçons, ce qui déjà ne faisait pas plaisir à ses parents. «Chaque fois, ils me disaient, «tu es une fille!» Je sais qu’ils voulaient me faire réagir pour que j’arrête de m’amuser avec, mais au final leurs réflexions m’ont beaucoup blessé», confie-t-il. A l’école non plus la vie n’était pas rose. Ce jeune homme barbu avec un léger crayon noir sous les yeux n’avait pas beaucoup d’amis à Ramallah. «Je sentais que j’étais différent mais je ne savais pas pourquoi. Alors je n’arrivais pas à me défendre quand on m’embêtait», raconte-t-il.

Jad s’est petit à petit renfermé et ses parents de leur côté, en ont rajouté. «Ils me disaient, j’ai vu le voisin. Il m’a demandé pourquoi tu étais comme ça?, se souvient-il. En clair, pourquoi je n’étais pas viril comme les autres garçons? Mes parents ne me défendaient même pas car pour eux, j’avais un problème sans me dire explicitement lequel.» 

Toujours sensible
Jusqu’à l’âge de 17 ans, il n’avait jamais entendu le mot «homosexuel». «La première fois, c’était dans une émission libanaise.» Le sujet est tabou en Palestine. La raison? «Le poids des traditions, de la religion», répond-il. Mais, paradoxalement, c’est dans sa foi que ce jeune musulman a trouvé une validation. Ainsi, selon lui: «Dieu m’a créé et savait d’avance qui j’allais être. Alors s’il en avait connaissance, il ne peut pas me rejeter, il m’a accepté comme je suis depuis le début.» Le territoire est à majorité musulman. Certaines villes sont conservatrices comme Hébron ou encore Naplouse. Être gay y est très dangereux. Alors beaucoup préfèrent sortir, voire habiter à Ramallah, la capitale économique de la Cisjordanie où l’homosexualité est plus tolérée si bien entendu, elle se passe loin des regards.

«Dieu m’a créé et savait d’avance qui j’allais être.» Jad

Jusqu’à aujourd’hui, aucun Palestinien n’a jamais été poursuivi pour son orientation sexuelle même s’il n’y a pas de loi claire l’interdisant. Une, existe pour punir tout acte censé heurter la morale. En clair, la religion. Jad ne peut donc pas revendiquer sa sexualité. Il ne peut pas la vivre à 100 % comme il le souhaiterait. Difficile pour ce jeune homme qui se sent solidaire de son peuple dans la lutte commune pour la reconnaissance d’un Etat. Mais l’image des homosexuels change. A force de regarder la télévision, de naviguer sur Internet ou encore de voyager à l’étranger, certains jeunes commencent à accepter l’idée. «J’ai décidé de le révéler à certains de mes amis, explique Jad, mais pour être sûr de leur réaction, j’ai discuté du sujet avec eux. Vous savez dans la société palestinienne, l’homosexualité est très mal vue. On nous voit comme des gens qui n’ont rien à faire dans la vie ou qui ne pensent qu’au sexe…» 

Deux Facettes
Faire des rencontres à Ramallah n’est pas simple. «Il y a seulement deux façons d’en faire», lâche Jad. «Avec le logiciel Grindr qui n’est dédié qu’aux homos. On se connecte et on nous indique quels sont les plus proches de nous.» Et l’autre? «L’association Al Qaws («arc-en-ciel») qui a un compte sur Facebook. Elle organise de temps en temps des réunions privées à Ramallah où l’on peut parler de tout: de nos difficultés, de nos peines, etc. Mais avant de l’intégrer, la présidente nous fait passer une sorte d’entretien pour être sûre qu’on est bien homo.»

Dans le groupe, on trouve même des Palestiniens mariés. Sous la pression de leur famille, certains cèdent et épousent une femme. D’autres l’acceptent pour éviter tout soupçon. «Moi, je ne le ferai jamais!» assure le jeune homme. Son avenir, Jad ne le voit pas ici. Toutefois, depuis que son père est décédé il y a deux ans, il est l’aîné de la maison et doit donc rester avec les siens. Mais il prévient: «Le jour où mon frère qui vit aux Etats-Unis revient, moi, je pars à l’étranger, dans le pays où il y a le plus d’homosexuels.»

*Prénom d’emprunt

5 thoughts on “Jad, 23 ans, homo et Palestinien

  1. 1. A quoi bon protéger le prénom de votre interlocuteur si vous ne jugez pas utile de rendre également anonyme l’endroit de la rencontre ? Une personne connaissant bien Ramallah connaît les rumeurs pesant sur ce café qui commence à être lui-même stigmatisé. Doit-on, en tant qu’étranger, alimenter la pression connue sur ces endroits « safe » (le mot n’est pas tout à fait approprié bien sûr), si vite socialement stigmatisés ?
    2. Rejouer l’opposition classique entre homosexualité et religion ? Ne peut-on pas faire un peu plus intelligent ? J’imagine que les lecteurs occidentaux seront ravis du sensationnalisme : « Mais, paradoxalement, c’est dans sa foi que ce jeune musulman a trouvé une validation. » Sans étonnement, des religions présentes dans les Territoires Palestiniens, il fallait bien entendu insister sur l’islam.
    3. Si vous voulez de l’émotion : hé bien si, des Palestiniens ont été poursuivis pour leur orientation sexuelle.
    4. Ne pourrait-on pas une bonne foi pour toute sortir de notre ethnocentrisme et arrêter de poser le modèle OCCIDENTAL de l’émancipation homosexuelle comme universel ? « Il ne peut pas la vivre à 100%. », comme si c’était une fin en soi. Et tiens donc, il y a seulement en Palestine que des hommes mariés ont des pratiques homosexuelles ? Mais finalement tout va bien, merci la mondialisation, les jeunes Palestiniens voyagent, peuvent aller sur internet, et découvrir des pays où vraiment – vraiment ? – la liberté est exemplaire. D’ailleurs, à la Gay Pride de Jérusalem cet été – dans le pays d’à côté ? – tout s’est bien passé.
    S., en recherches de terrain sur le sujet.

  2. @ S.B.
    Votre commentaire montre que vous n’avez pas lu l’article et vous répondez avec le discours en vouge en ce moment contre l »impérialisme gay »
    D’abord ce n’est pas nous les « occidentaux » à poser ce le modèle d’émancipation mais ce jeune homme qui veut vivre à 100% son homosexualité, mais apparemment pour vous il n’en aurait pas le droit parce cela va à l’encontre de vos théories selon lesquelles le modèle d’émancipation occidentale n’intéresserait pas les gays palestiniens. Ensuite ici on ne parle pas d’hommes mariés qui ont des pratiques homosexuels. Mais d’homosexuels qui se sont marié face à la pression et qui apparemment ont besoin de parler de leur situation. Bien sûr qu’il y a des homosexuels mariés partout, cela contredit votre discours sur le modèle occidentale. Il ne s’agit nullement d’imposer un modèle parce que ce modèle n’existe pas en occident. La différence c’est qu’en occident on peut s’assumer comme homosexuels si l’on veut et pourquoi vous voudriez vous que en Palestine il n’y ait pas le même désir ? Nous sommes des êtres humains pareils pas des être figés dans une culture. Par ailleurs en Palestine il reste pas bcp ce chrétiens. Si non moi lecteur « occidental » je ne vois rien de sensationnaliste dans cet article, par contre je connait bien l’idéologie qui se cache derrière votre message. Des jeunes palestiniens veulent vivre leur homosexualité pleinement ? Vivre avec une personne de même sexe plutôt que se cacher ? Non ils en ont pas le droit parce que « c’est le modèle occidental ». Par ailleurs c’est curieux en France la manif pour tous tiens exactement le même discours que vous. Finalement haro sur l’homosexuel revendicatif. Quand à la gay pride de Jérusalem bien sûr que l’homophobie existe partout mais vous voulez dire quoi par là qu’il faut rentrer tous dans le placards pour ne pas froisser les homophobes ?

  3. Et bien ma vie au fond, (sauf pour la réligion) ressemble bcp à celle de ce jeune homme en tout cas en rapport à l’homosexualité. Il paraît qu’aujourd’hui dans certains milieux soit disant progressistes « vivre à 100% son homosexualité » c’est pas un but acceptable quand on est pas « occidental ». Cela doit faire plaisir à ce jeune homme d’être jugé par un inconnu qui peut se permettre de vivre dans une société, certes pas parfaite, mais assez libre pour vivre ce rêve et quand bien même il se rendrait compte que ce n’est pas le but principal de la vie pourquoi le décider d’avance pour lui ? Les homos palestiniens ça fait des dizaines et dizaines d’années qui vont en occident pour pourvoir vivre librement et donc ? Il y pas q’eux encore aujourd’hui des homos de pays de l’est ou du sud de l’Europe font pareil. Le déracinement est une pratique malheureusement obligé pour bcp d’homo, j’ai juste changé de ville dans la même région mais c’était un choix obligé plus au moins pourquoi vouloir toujours rentrer dans des polémiques culturelles quand elle n’ont pas lieux d’être. Il y a des gens qui voudraient que l’homosexualité dans certains endroits de la planète reste uniquement une pratique discrète dénoués de sentiments, que faire alors ? Bloquer internet ? Pour que les jeunes palestiniens ne voient pas ce qui se passe en occident ? Les empêcher de voyager alors que leur conditions de mobilité sont très dures déjà ? Bref un palestinien aux yeux de certains restera toujours un élément au service de la lutte contre Israël c’est le seul but accepté. Pas de place pour l’individualité.

  4. Merci de votre commentaire. Nous sommes d’accord sur quelques points et cela me permet de réaliser que mon propos n’était peut-être pas forcément clair.
    Je me suis surtout agacé du ton de l’article, à première lecture. Me

  5. mea culpa pour ma mauvaise lecture des propos sur les hommes mariés. Je voulais surtout rappeler la diversité des homosexualités. En parlant de « modèle occidental » je voulais parler de l’homosexualité vécue comme identitaire (se définir par son orientation sexuelle) et rattachée à des pratiques vues comme occidentales (vie de couple entre homme, vie gay…). En Palestine comme ailleurs, les cas sont divers. Je ne voudrais pas que l’on oublie les hommes palestiniens qui ne se définissent pas nécessairement comme « homo » (et ont donc occasionnellement des pratiques homosexuelles non identitaires) ; tout comme je ne voudrais pas qu’on oublie ceux qui n’ont pas nécessairement voyagé et ne veulent pas quitter la Palestine, et donc se tournent vers le changement de leur société.
    Pour ce qui est du regard porté vers l’ « occident », je voulais donc rappeler que ce n’est pas seulement dans cette zone du monde que les jeunes Palestinien.ne.s puisent leurs ressources pour la réflexion et la mobilisation. A part cette mise en garde – un peu emportée c’est vrai – pour le reste vous me faites dire des choses que je n’ai jamais dit. Je n’ai aucun jugement moral sur les projets de vie de quiconque et m’en garderai bien. Vous avez bien fait de rappeler les enjeux moraux qui pèsent sur les Palestinien.ne.s qui songent à l’exil – la pression sur celles et ceux qui « déserteraient » la lutte contre Israël -, et je vous rejoins sur ce point. Mes critiques allaient vers la manière de rédiger l’article.

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