Sauvez Bâtard: amour et apocalypse au TPR
Les 22 et 23 mai prochains à La Chaux-de-Fonds, le Théâtre Populaire Romand accueillera Sauvez Bâtard, une pièce explosive signée Thymios Fountas, dans le cadre de la deuxième édition du festival Bang! Entretien avec un·e·x dramaturge qui manie les mots comme des armes sensibles, et fait de la poésie une échappée vers des mondes décalés, tendres et profondément queer.
Plongé·e·x dans un décor post-apocalyptique, le public rencontre Bâtard, personnage principal accusé de meurtre. Face à un tribunal de fortune — composé de Clébard, Clochard et Cafard — Bâtard tente de plaider son innocence, malgré une mémoire trouble. Heureusement, iel est poète. Et dans ses incantations, le temps se plie, les souvenirs affluent, et surgit la figure d’Ekart, une idole du passé. Grand, beau, prometteur, Ekart incarne le désir, la perte et la fascination.
Un anti-héros à la marge de la marge
Thymios Fountas s’inspire de Baal de Brecht pour construire un personnage à la fois minable et lumineux. «Bâtard est l’exclu au sein même d’une micro-société déjà ostracisée», explique-t-iel. Le texte brouille les repères, joue des genres et des temporalités, et porte en creux une critique du monde contemporain.
L’odeur des aisselles après l’amour
Dans cet univers post-apocalyptique où la nature a disparu, où «le ciel normalement sublime et vaste» s’est effacé, les allusions à la nature à travers le langage poétique fusent. Thymios parle des oiseaux pour évoquer “la sensation de désir qu’on a dans le ventre, les fleurs, l’odeur des aisselles après l’amour’. Iel confie que cette poésie organique fait écho à une mélancolie collective face à l’effondrement écologique.
Une écriture qui déborde les cases
L’écriture de Thymios Fountas refuse les règles établies. Elle s’épanouit dans l’éclectisme et la fluidité. Ce jeu avec les codes n’a rien d’un geste gratuit: «Je suis persuadé que cela participe à une expérience enrichie du monde. Et, à vrai dire, c’est à peu près pareil avec la question d’identité de genre. » Pour ellui, identité et création suivent le même mouvement: celui de la transformation constante.
Un monde en soi, à vivre plus qu’à comprendre
Dans Sauvez Bâtard, les mots ne sont pas faits pour rester sur le papier. «Je voulais surtout qu’ils soient incarnés, vécus dans le corps des acteur·ice·x·s », nous dit Thymios Fountas. D’autant plus que cette pièce évoque des émotions qui ont pu traverser la·e dramaturge mais également la communauté queer : “honte, troubles, désir, éveil de soi”. Le spectacle propose un langage propre, articulé par des corps singuliers. Le monde mis en scène a sa propre logique interne qui nous déplace. Pas besoin de tout comprendre, l’important est d’«expérimenter ce monde, comme lorsqu’on débarque dans un pays étranger ou dans un temps futur».
Entrez donc avec nous dans cette fable étrange. Laissez-vous porter par l’humour décalé, l’univers sci-fi et les figures marginales tendres et excentriques qui peuplent cette œuvre. Oubliez le réel, le temps d’un soir.
