Everybody’s Perfect, «antidote au pessimisme»

Vingt-neuf longs métrages, docus ou fictions, et 22 courts sont à l'affiche du festival international du film queer de Genève. Table ronde, atelier, expositions et fêtes complètent le copieux menu à dévorer du 10 au 19 octobre. Petit tour d'horizon.
Liberté, création, réflexion, sensualité, diversité… un programme aussi éclectique qu’excitant. Everybody’s Perfect, dont l’écho ne cesse de s’amplifier, conforte son rôle d’acteur de l’évolution de la société, résume sa directrice artistique Sylvie Cachin. «La production du genre augmentant, il est par ailleurs aujourd’hui facile de trouver des films avec des propositions plus libérées, comme le prouve leur présence accrue dans les grands festivals.»
De retour pour dix jours dès vendredi 10 octobre, cette 12e édition propose 29 longs métrages, mêlant fiction et documentaire – dont 15 premiers films et 14 réalisés par des femmes – ainsi que 22 courts répartis en cinq séances. De tous genres, de tous styles, ils viennent de tous horizons et s’articulent autour de quatre chapitres: «Love Stories», «De mon point de vue», «Lignes de fantasme» et «Hors les lois». Dans ces œuvres majoritairement inédites en Suisse, dominent l’imagination créative, l’humour et l’autodérision. «Un antidote au pessimisme», selon Sylvie Cachin. Voici une petite sélection.
Cosmique et ludique
En ouverture, on découvrira Lesbian Space Princess des Australiennes Emma Hough Hobbs et Leela Varghese, une comédie d’animation en forme d’aventure cosmique et ludique, destinée à un public de tous âges. La princesse Saira est poussée dans une quête galactique pour sauver son ex-petite copine Kiki, kidnappée par les mecxtraterrestres blancs et hétéos. Rythme d’enfer pour un film à l’inventivité foisonnante.
Décolonial
En clôture, Rashaad Newsome et Johnny Simons proposent Assembly, un documentaire en forme de show grandiose, célébrant la culture, l’identité afro-américaine et queer, à travers des performances, de la danse, des hologrammes. Newsome, grand artiste multidisciplinaire qui a exposé dans les lieux les plus prestigieux, met en scène une intelligence artificielle nommée «Being» qui souligne l’importance de la décolonisation.
Tropical-punk
Entre les deux, Llueve Sobre Babel, un film colombien signé Gala del Sol. Cette comédie fantastique, adaptation moderne et audacieuse de L’Enfer de Dante, se déroule dans un bar de Cali nommé Babel. Il sert de purgatoire, où des personnages exubérants parient sur des jours de leur vie pour tenter de déjouer La Flaca, la mort. Mystique, tropical-punk et humoristique, ce portrait choral de jeunes Colombiens traite plusieurs thèmes comme l’homophobie, le machisme, l’intolérance, la haine de soi ou les dogmes religieux.
Libératoire
Avec Dreamers de la Britannique Joy Gharoro-Akpojotor, on suit Isio une jeune femme nigériane sans papiers, piégée et prisonnière dans le centre d’expulsion de Hatchworth. Face à plusieurs rejets de ses demandes d’asile, elle trouve une autre issue, avec la complicité de ses codétenues et le désir qu’elle éprouve pour l’une d’elles. Une émouvante histoire d’amour, d’évasion, de libération intime et politique.
Écologique
De son côté, le Colombien Santiago Posada propose Brigitte, Planeta B., dévoilant Brigitte Baptiste, célèbre figure écologique et icône trans. Elle propose une approche intégrée de la nature et de la société, à travers ses recherches dans la forêt, menant par exemple à la découverte d’espèces végétales et animales transgenres. Le documentaire explore ainsi la queer-écologie et la biodiversité en examinant les préjugés, les identités de genre non binaires dans la nature, et en cherchant des voies pour un avenir plus inclusif.
Urgent
On reste dans le documentaire avec The Librarians. La réalisatrice américaine Kym A. Snyder s’inscrit dans une actualité brûlante en suivant des bibliothécaires au Texas, en Floride et ailleurs aux États-Unis. Défenseurs de la démocratie et de la liberté intellectuelle face à une redoutable censure, ils s’unissent pour lutter contre les tentatives de bannir des livres abordant des thématiques LGBTQI+, d’éducation sexuelle ou encore sur la ségrégation. Une dénonciation indispensable d’un mouvement de grande ampleur, pouvant aller jusqu’à l’autodafé.
Magnétique
Queer Palm au dernier Festival de Cannes, La petite dernière de la réalisatrice et actrice française Hafsia Herzi brosse avec tendresse et sensibilité le portrait d’une jeune banlieusarde parisienne. Issue d’une famille d’immigrés algériens, musulmane pratiquante, elle s’éveille à l’homosexualité. On vous en dira plus lors de la sortie du film à Genève, avec une interview de son interprète principale, la lumineuse et magnétique Nadia Melliti, prix d’interprétation sur la Croisette.
Inclassable
A (re)voir enfin Dreams, Ours d’or à la Berlinale. Johanne, 17 ans, tombe follement amoureuse de sa professeure de français. Une première expérience faite d’émotion, de doute, de souffrance et de plaisir intense. Poursuivant son exploration de la sexualité queer dans ce volet de la passionnante trilogie d’Oslo, le réalisateur norvégien Dag Johan Haugerud sera l’un des invité·e·x·s du festival, aux côtés notamment de Joy Gharoro-Akpojotor, réalisatrice de Dreamers et des deux acteurs principaux de Llueve Sobre Babel.
Les masculinités dans le collimateur
L’an dernier, Sylvie Cachin avait décidé de braquer le projecteur sur la joie lesbienne. «Dans cette 12e édition, c’est le masculinisme, pesant de plus en plus sur les sociétés occidentales, qui est passé au crible. Il promeut des hommes cis virils, des femmes cis dominées, affirme que les gays ne sont pas des hommes, les lesbiennes de faux hommes et que les personnes trans n’existent pas. Ces valeurs de domination et d’exclusion sont parfois utilisées pour justifier la violence».
La question du «Trouble dans le masculin» fera ainsi l’objet d’une table ronde, d’une exposition et d’un atelier analyse de films. Des images de virilité, de masculinités féministes, trans ou autres, seront analysées à travers des personnages LGBTIQ+, dans des œuvres allant du western au drame en passant par la comédie». Pour en débattre, le festival reçoit l’activiste et créateur de contenu Léon Salin, l’historien Didier Roth-Bettoni et l’artiste Sylvain Clavero, alias Diamanda Callas, samedi 11 octobre à 16h45.
Everybody’s Perfect, du 10 au 19 octobre à la Maison des Arts du Grütli et dans d’autres lieux genevois, comprendra également comme toujours, des moments où l’on va beaucoup s’amuser, de l’ouverture à La Gravière à la fête de clôture à la Paillette, en passant par le Queeeraoké d’Amal Alpha et une fête lesbienne et féministe.
Plus d’informations et billetterie sur everybodysperfect.ch
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