Des prétendant·e·x·s queer à la palme à Cannes

Au Festival de Cannes, qui déroule son tapis rouge ce mardi, de grands noms sont en lice pour la Queer Palm, dont Julia Ducournau, Robin Campillo ou encore Hafsia Herzi. Petit tour des films les plus attendus sur la Croisette.
Créée en 2010, la Queer Palm fête ses quinze ans sur la Croisette. Succédant au Belge Lukas Dhont, c’est le réalisateur, scénariste, et dramaturge français Christophe Honoré (en compétition l’an dernier avec Marcello Mio) qui présidera le jury. Enthousiaste, il a souligné l’urgence de mettre l’accent sur les thématiques LGBTIQ+, la création contemporaine étant à nouveau attaquée par «l’Internationale réactionnaire»: «D’où l’importance de la Queer Palm au cœur du festival. Elle est à la fois un refuge et une tribune, un combat et une tendresse.»
Christophe Honoré et ses complices, les Françaises Léonie Pernet, compositrice, Timé Zoppé, journaliste, le réalisateur brésilien Marcelo Caetano (Baby), la programmatrice américaine Faridah Gbadamosi, devront choisir entre les seize prétendants, puisés dans les différentes sections cannoises: Compétition, Un certain regard, Quinzaine des cinéastes, Semaine de la critique. Notre sélection:
Alpha, de Julia Ducournau
Adepte du gore et des métamorphises du corps, la réalisatrice française palmée d’or en 2021 (Titane) revient en compétition avec Alpha. Adolescente agitée de 13 ans vivant seule avec sa mère, Alpha rentre un jour de l’école avec un tatouage sur le bras. Leur monde s’écroule et la tension monte. Julia Ducournau annonce elle-même ce troisième long métrage comme son œuvre la plus personnelle et la plus profonde.
Enzo, de Robin Campillo
Cinquième long métrage de l’auteur de 120 Battements par minute, ce film a été écrit en collaboration avec le cinéaste Laurent Cantet, décédé en avril 2024. Ce dernier avait prévu à l’origine de réaliser lui-même le projet évoquant Enzo, seize ans, apprenti maçon à La Ciotat. Alors que son père le voyait faire des études supérieures, le jeune homme cherche une alternative au confort bourgeois, au cadre étouffant de la villa familiale. C’est sur les chantiers, au contact de Vlad, un collègue ukrainien, qu’il va entrevoir un autre avenir.
La Petite dernière, de Hafsia Herzi
Questionnant l’identité, ce film s‘inspire d’un roman éponyme de Fatima Daas, paru en 2020. C’est l’histoire d’une jeune fille vivant avec sa mère et ses sœurs, tiraillée entre sa foi musulmane et son homosexualité. Mais c’est également le parcours d’une Française d’origine arabe, d’une banlieusarde qui prend le RER pour faire ses études et la fête à Paris. Elle est incarnée par Nadia Melliti, une inconnue repérée dans la rue.
Si ces trois films valent le détour – du moins sur le papier – la grand-messe de la pellicule réserve évidemment d’autres perles au sein d’une sélection officielle aussi riche qu’alléchante. Pêle-mêle, voici quelques titres parmi les plus en vue:
Dossier 137, de Dominik Moll
Après le gros succès de La nuit du douze, notamment récompensé par six Césars dont ceux du meilleur film et du meilleur réalisateur, le Français Dominik Moll reste dans le monde policier. Changeant de registre, il nous plonge ici dans une enquête interne sous haute tension pendant la fameuse crise des Gilets jaunes. Avec Léa Drucker.
Resurrection, de Bi Gan
Viendra, viendra pas, le suspense était à son comble. Finalement, le prodige chinois Bi Gan, sélectionné dans Un certain regard en 2018 avec Un grand voyage vers la nuit, traque cette fois la Palme d’or avec Resurrection, film policier de science-fiction. Après une intervention chirurgicale, une femme en quête de vérité, dont la conscience tombe dans le fuseau horaire éternel, fait de nombreux rêves. Excitant, non?
Nouvelle Vague, de Richard Linklater
Grand cinéphile, amoureux de la Nouvelle Vague pendant ses années de fac au Texas, l’Américain Richard Linklater a décidé de rendre hommage à Jean-Luc Godard et ses complices. Filmé en noir et blanc dans un Paris des années 1960, son film raconte le tournage d’À bout de souffle. De jeunes inconnus jouent Godard et Belmondo.
Eddington, d’Ari Aster
Pour l’instant, cela reste plutôt secret, mais la mission d’Ari Aster est de secouer le concours si jamais il s’endormait. En tout cas, le New-Yorkais, maître de l’horreur contemporaine, n’a pas lésiné sur le casting (Joaquin Phoenix, Emma Stone, Austin Butler, Pedro Pascal) pour ce western horrifique se déroulant en pleine pandémie de Covid 19.
À l’instar de Julia Ducournau et d’Hafsia Herzi, tous les cinéastes ci-dessus espèrent rafler la si convoitée Palme d’or. On évoquera aussi les Dardenne, qui en visent une troisième avec Jeunes mères. Les frères belges suivent cinq adolescentes hébergées dans la maison maternelle, espérant une meilleure vie pour elles-mêmes et leur enfant.
Mais on citera encore trois œuvres qui font parler dans les sections parallèles:
Eleanor the Great, de Scarlett Johansson
À l’affiche de The Phoenician Scheme, de Wes Anderson, présenté en compétition, la star américaine fait ses débuts de réalisatrice. Sélectionné à Un certain regard, Eleanor the Great met en scène une vieille dame qui quitte Miami pour New York après la mort de sa meilleure amie, une Juive polonaise rescapée des camps. Elle tente alors de reconstruire sa vie, se lie alors avec une étudiante et questionne la transmission de la Shoah.
À noter également le premier passage derrière la caméra de Kristen Stewart, pour The Chronology of Water, proposé dans Un Certain Regard, qui adapte les mémoires de l’écrivaine américaine Lidia Yuknavitch.
L’Intérêt d’Adam, de Laura Wandel
À signaler enfin, le premier long métrage de la réalisatrice belge Laura Wandel, présenté en ouverture de la Semaine de la critique. Il nous emmène dans un hôpital, où une infirmière en chef (Léa Drucker) prend en charge un enfant de 4 ans victime de malnutrition, tout en désirant aider sa mère en détresse (Anamaria Vartolomei).