Bars & Clubs

Bordello Easter

Lausanne, dim 31 mars, 23:00
Culture
#Histoire #Littérature

Vieille comme la rue? La prostitution hier et aujourd’hui

Genève, ven 19 avril, 17:30
Bars & Clubs

Springbreakers by Cousines & Friends

Lausanne, jeu 4 avril, 23:00

Trouble dans les rangs

Premier long-métrage de la jeune réalisatrice israélienne Hen Lasker, Seeds of Summer plonge au cœur d’un camp d’entraînement militaire féminin. Un zoom audacieux sur l’érotisme de l’autorité. Interview, en marge du festival Black Movie, à Genève.

Avez-vous obtenu facilement l’autorisation de filmer les dessous d’un camp d’entraînement militaire pour jeunes filles?
– J’ai eu beaucoup de chance car à l’époque – j’ai fait ma demande lorsque j’étais encore étudiante – les autorités militaires étaient beaucoup plus ouvertes qu’à présent. D’autant que par son sujet intimiste, mon film ne présentait pas de danger pour la sécurité de l’Etat. Mais je ne pense pas qu’aujourd’hui ce serait encore possible de filmer d’aussi près le quotidien d’une unité d’élite.

Comment avez-vous choisi vos personnages?
– J’ai choisi Yarden parce qu’elle incarnait mieux que les autres la transformation induite par l’armée. A leur arrivée, ce ne sont encore que des enfants. Malgré leurs peurs, leur isolement, elles doivent apprendre à se battre, crier, tirer… bref à devenir des soldats endurcis. Vu leur jeunesse et leur naïveté, elles ne peuvent y réfléchir à deux fois. Elles se conforment et se transforment. Lotem, je l’ai choisie pour mettre en évidence la confusion des sentiments provoquée par l’expérience. Face à l’inconnu et à la dureté du milieu, les supérieures prennent vite des allures de mamans, d’amies, de guides aux yeux des recrues qui en viennent à confondre fascination, pouvoir et sentiment amoureux. Pour les jeunes filles homosexuelles, c’est un moment propice pour se révéler, car ces sentiments sont légitimés par le contexte. Gay ou straight, beaucoup de filles les ressentent. J’en ai moi-même fait l’expérience. Mais je ne pense pas que l’armée ait pour autant une influence sur l’orientation sexuelle. C’est une part trop importante de la personnalité pour qu’un élément extérieur puisse l’influer.

Vous parlez de la fascination générée par la position hiérarchique. Derrière votre caméra, n’exercez-vous pas le même pouvoir sur la commandante Smadar, avec laquelle s’ébauche d’ailleurs une histoire d’amour?
– Même si certains rechignent à le reconnaître, tenir une caméra donne un pouvoir et on a forcément une influence sur le récit, sur les personnages… Si ce n’est déjà par ce que l’on décide de filmer ou non. Cette deuxième couche du récit, ma relation avec Smadar – nullement préméditée, je précise – agit de fait comme un miroir des jeux de rôles et des rapports de forces en présence. La raconter m’a permis de montrer leur complexité et d’interroger également la position du cinéaste. Ce ne sont pas les seuls moments où j’ai choisi de me mettre en scène. Car si les filles se dévoilent avec autant de confiance, c’est parce que j’ai vécu avec elles pendant deux mois, que j’ai noué un vrai lien d’amitié, que je leur ai posé certaines questions. Cela fait partie intégrante de la démarche documentaire, et l’occulter à l’écran ne donne pas plus d’objectivité.

Entre les entraînements au combat, les uniformes d’homme, la dureté de mise, ces jeunes filles ne subissent-elles pas une sorte de masculinisation, du moins dans le sens traditionnel du terme?
– Cette question de la construction de l’identité sexuelle est aussi un des thèmes de mon film. Ces jeunes filles sont amenées à adopter des comportements traditionnellement impartis aux hommes. Et cette masculinisation survient justement au moment de la construction de leur féminité, à un moment où elles découvrent et expérimentent pour la première fois leur corps de femme. D’ailleurs, la transformation progressive en tom-boy apparaît clairement. Pour celles qui, comme moi, ne s’étaient jamais senties à l’aise dans leurs habits de filles, c’est une libération. Pour les autres, c’est une grosse source d’inconfort. Comme pour l’orientation sexuelle, l’armée permet à celles qui ne sont pas très au clair sur leur identité de pouvoir se révéler.

On vous a reproché, notamment dans les milieux de gauche, de ne jamais remettre en question le bien-fondé de l’institution. Que répondez-vous à ces critiques?
– S’il faut une armée ou non en Israël est une question extrêmement complexe et ce n’est pas le propos de mon film. Je voulais seulement rendre attentif aux conséquences politiques et humaines. Pour ces jeunes filles arrachées à l’enfance, endoctrinées à leur insu, mais aussi pour ces jeunes hommes souvent meurtris à vie par des expériences très difficiles. Je voulais montrer à quel point l’armée, la guerre marque la société israélienne. Rachel Haller

» Projections de Seeds of Summer dans le cadre de Black Movie