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Juliette comme on l’aime

La truculente Juliette nous revient avec un nouvel album haut en couleurs, «Bijoux et Babioles», et dévoilera sa malle aux trésors sur les scènes romandes au mois d’avril. Rencontre.

360: Après le succès de «Mutatis Mutandis» et votre Victoire de la musique, ce nouvel album était très attendu. C’est une pression supplémentaire?
Un petit peu quand même. Il faut faire les choses le mieux possible pour ne pas décevoir les fans. Les nouveaux surtout, les anciens, eux, me suivent depuis assez longtemps. En même temps, j’ai quand même assez de liberté avec ça. Je fais avant tout ce qui me fait plaisir et, comme j’ai l’impression, en tout cas j’espère que c’est le cas, de ne pas tricher, je me dis toujours que ça suffit presque pour être tranquille pour un nouvel album, pour ne pas avoir trop de pression. Je suis quand même assez sereine.

Vous êtes contente de l’accueil qu’il reçoit?
Très contente, biensûr. Il y a un très bel accueil de la presse. J’ai toujours un petit problème avec la télé et la radio, mais je pense que ça sera comme ça jusqu’à la fin de mes jours (rires). Je crois que je ne suis pas dans les bonnes cases. Mais bon, on commence à peine la tournée et les salles sont remplies à peu près partout. Je ne me fais pas trop de soucis, je sais que le public sera au rendez-vous. Je suis plutôt une artiste de scène moi, alors si je ne passe pas à la radio, ben, c’est pas super grave…

C’est, comme le précédent, un album très éclectique, qui mélange véritables petits opéras et chansons plus légères, grands drames et franches rigolades. C’est ça le style Juliette ?
Je crois que ça va finir par devenir le style Juliette, oui (rires). Je n’ai pas envie de trucs répétitifs, vous savez. Je trouve que c’est bien plus intéressant quand on passe comme ça d’une émotion à une autre. Et puis c’est ce qui me ressemble. Finalement, je ne me pose pas trop de questions, je fais le disque que j’ai envie d’entendre, je fais le spectacle que j’ai envie de voir.

On vous sait fan de jeux vidéo, est-ce que cela nourrit votre imaginaire d’auteur ou ça n’a rien à voir?
Oh, si beaucoup en fait, même si je regrette que le jeu vidéo soit encore un peu immature. Le problème, c’est que c’est devenu un enjeu commercial énorme. Il faut gagner de l’argent vite, alors on applique des recettes. Il y a finalement assez peu de création artistique et d’innovation dans ce domaine. Il y a bien quelques types qui essayent de faire avancer ça, ce qui me réjouit complètement, mais encore pas assez à mon goût.

Vous allez peut-être inciter à la création de nouveaux jeux ?
Pourquoi pas ? Ça m’amuserait assez. Ce qui me plairait surtout, c’est faire de la musique de jeux vidéo, évidemment.

Vous avez déjà eu des propositions ?
Non, non, pas encore, mais on sait jamais.

C’est un appel lancé ?
C’est un appel lancé, on peut dire ça comme ça.

Dans votre album, la chanson «Aller sans retour» me fait beaucoup penser à votre «Berceuse pour Carlitos», qui est la chanson qui m’a fait vous découvrir. C’est volontaire ?
C’est marrant, vous êtes le premier à m’en parler. Je n’y avais pas pensé, mais c’est vrai que la «Berceuse» parlait déjà de l’exil. Je crois que j’ai des sujets comme ça qui reviennent. Même si la «Berceuse», c’est pas moi qui l’ai écrite alors que «Aller sans retour» oui, il y a une espèce de fil conducteur, quand même, dans les chansons que je chante depuis le début. Elles tournent souvent autour des mêmes thèmes.

Dans la même idée, «Casserole et fausset» rappelle un peu «la petite fille au piano».
Oui c’est ça, sur les gens qui font de la musique un petit peu «contraints et forcés» (rires). D’une certaine manière oui, il y a toujours une suite dans les chansons que je chante.

Forcément, elles vous ressemblent.
Voilà. De toute façon ça m’ennuierait de chanter des choses qui ne me ressemblent pas, ou avec lesquelles je ne serais pas à 100% en adéquation, tout simplement.

Dans «Tyrolienne haineuse», une reprise de Pierre Dac, vous juxtaposez le yodle suisse et l’hymne européen, il y a un message pour nos lecteurs?
Oh, non, ça n’a rien à voir! C’est simplement que le refrain de cette chanson appelle à la tyrolienne, c’est une caricature. Vous savez il faut se remettre dans le contexte. Pierre Dac écrit ça en 1942 et à l’époque, la musique allemande, quand on laisse de côté Wagner, c’est la tyrolienne. J’ai gardé ça parce que j’ai trouvé que c’était amusant musicalement mais il est bien évident que je ne fais aucun amalgame, les Tyroliens ne sont pas des Nazis. Et donc il n’y a pas non plus d’allusion au fait que la Suisse refuse d’intégrer l’Europe. Mais vous savez, je ne suis pas une grande convaincue de l’Europe, en tout cas telle qu’elle est construite actuellement, c’est-à-dire juste des accords commerciaux et des règles pour que tout le monde marche au pas. Moi je trouve que c’est une idée formidable d’être en Europe, mais pas quand c’est au détriment de tout le reste.

C’est ce qui rend cette reprise tout à fait actuelle dans un contexte européen où les rapports entre les gens ne sont pas toujours aussi simples qu’on voudrait laisser croire?
Oui, on voudrait bien que ce soit plus simple. Et puis vous savez cette «Tyrolienne haineuse» c’est aussi pour dénoncer l’imbécillité des propos haineux. Si le monde va mal, c’est toujours la faute des autres. Il me semble qu’il faut d’abord commencer par se regarder le nombril, de ce point de vue là.

Vous ne faites pas mystère de vos préférences sentimentales, pourtant ce thème n’est jamais explicitement abordé dans vos chansons, c’est volontaire? Ça ne vous parait pas approprié ?
Ni volontaire, ni pas approprié. C’est surtout parce que je n’ai pas encore écrit la chanson qui me convient là-dessus. Je pense que ça viendra naturellement quand j’aurai quelquechose de pertinent à dire. Pour l’instant ce n’est pas le cas, mais ce n’est pas un sujet tabou, en tout cas, bien entendu.

C’est plus une question d’opportunité donc ?
Exactement. Pour moi il n’y a pas de secret, vous le savez.

Vous débutez votre tournée. Vous êtes heureuse de retrouver le public ?
Je suis contente de retrouver le public, je suis contente de retrouver mes musiciens, je suis contente de retrouver le plateau. C’est vrai que quand je ne suis pas sur scène, ça me manque. C’est même ce qui me manque le plus.

Avec vos musiciens, c’est une vraie histoire de famille.
Oui, pour les plus anciens on travaille depuis 15 ans ensemble. On a fini par créer, non pas un groupe, mais plutôt une troupe, comme une troupe de théâtre. On est très liés. Je ne peux pas imaginer de faire ça sans eux.

Comment est ce nouveau spectacle, très axé sur le dernier album, il y aura des chansons plus anciennes?
Comme d’habitude, très axé sur mon nouveau disque. J’ai envie de neuf moi, je ne veux pas refaire toujours les mêmes choses. Alors évidemment il y a quelques chansons d’avant, mais pas tant que ça. Et puis je garde toujours un petit passage un peu libre où je fais comme je veux, selon l’humeur du moment. Je pense qu’il n’a pas fini d’évoluer ce spectacle. On n’en est qu’à trois représentations pour l’instant, on n’a pas encore tout décidé.

C’est sur scène que l’album prend toute son ampleur ?
Ah oui ça, ça ne fait pas de doute.

Est-ce qu’il y aura le fameux titre manquant* ?
Absolument. C’est uniquement une question de droit de reproduction sur le disque, donc sur scène on peut le faire.

C’est une petite revanche par rapport à l’album ?
(rires) Voilà! Non, mais c’est vrai que c’est bête. Je ne sais même pas pourquoi on n’a pas eu le droit de l’enregistrer. On a reçu un «non» ferme et définitif de la part des avocats des héritiers, sans aucune explication.

On sent que vous le regrettez un petit peu.
Ah ben c’est toujours un peu regrettable. On a construit un album en se disant qu’on mettait des choses particulières, donc c’est toujours un peu dommage de se dire que cette chanson-là n’y sera pas. En même temps, c’est pas elle qui faisait l’album, hein…

Vous n’avez pas voulu la remplacer?
C’était trop tard, en fait. Malheureusement, les démarches ont été faites un peu tardivement et le disque était prêt à partir sous presse. C’est dommage, mais bon, comme ça, ça fait un petit évènement sur scène.

Une dernière question Juliette, en clin d’oeil à l’une des chansons du disque, vous avez appris à jouer de l’hélicon ?
(Elle prend l’accent toulousain) Ah, la fameuse «Chanson, con !» Non, je ne sais toujours pas en jouer, mais un de mes garçons s’y est mis, par contre, et il y en a sur scène. Il y a pas mal de choses qui se passent dans ce spectacle, c’est assez marrant vous verrez.

* Une adaptation de «Aguas de Março» de Tom Jobim.

Juliette en tournée, le 19 avril à Genève (Forum Meyrin), le 20 avril à Morges (Théâtre de Beausobre) et le 22 avril à Neuchâtel (Théâtre du Passage).