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Girls: sans contrefaçon, du rock aux cheveux longs

Christopher Owens et son androgynie délicatement évaporée émoustillent la scène folk-rock.

Une histoire d’harmonica et de jeunesse sur le trottoir, revenue d’un rêve américain frelaté par l’odeur du latex et du crack. Un duo californien porté au pinacle par la West Coast de la marge, dont l’auteur-compositeur-interprète, Christopher Owens (à droite sur la photo), cultive une désinvolture élevée au rang de posture poétique.
San Francisco côté gueule de bois tient son petit prince. Et puisque Girls est un groupe de garçons, Owens mise sur l’ambiguité: jean hippie et grosse cylindrée, mèche angélique et sourire jauni par les nuits blanches, Maculay Culkin viré junkie. Les filles? Les mecs? Il dit ne pas choisir, quelle question! Ce deuxième album confirme un vrai talent d’illusionniste, quelque part entre folk solaire et distorsions nocturnes. Les 11 titres de «Father, Son, Holy Ghost» naviguent de spleen en idéal, nausées et apesanteurs, flashes et descentes. Bouffées mélancoliques, bonheurs doucement hallucinés, Girls fait rimer acoustique avec substance chimique. Guitare, batterie, clavier et voix sont la plupart du temps sublimés dans leur plus simple appareil.

Drogue et rébellion
Pas besoin d’artifices lorsqu’on met en chansons une vie cabossée comme un roman. C’est qu’Owens garde les stigmates d’une enfance rescapée, entre une communauté ultra-religieuse (les Children of God) et une mère célibataire hantée par la prostitution. Son adolescence est une fuite, un aller simple pour Tenessee, Texas, où sa longue toison d’or fait tourner la tête au richissime Stanley Marsh ; un magnat du pétrole expert en jeunes garçons rebelles et drogués, qui décrira Chris comme «un diamant brut».

La poussière de cette Amérique profonde fait un peu la signature de Girls. Il y a cette fille dont Chris tombe amoureux, avec qui il fondera un premier groupe baptisé Curls. Et puis ce garçon, Skippy, un meilleur ami dont Owens se demande s’il n’était pas son amant, certains soirs qu’ils partaient s’évaporer en pleine nature avec d’autres fils de mauvaise vie, pour «chasser le bison».
La petite amie finira par prendre le large, et le groupe adopte son nom définitif, s’adjoignant à l’occasion les services du producteur Chet White. Leur songwriting délicat et désabusé sillonne la FM par la bande d’urgence. Entre la caresse des grandes plaines et la brûlure du bitume, comme un petit air de liberté.

Girls, «Father, Son and Holy Ghost»
En concert le 22 novembre, au Mascotte de Zurich