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Berlin perd son mythique club queer, le SchwuZ

Berlin perd son mythique club queer, le SchwuZ
©SchwuZ

Berlin perd un morceau de son âme queer. Le SchwuZ, club emblématique de la capitale allemande et refuge LGBTIQA+ depuis près d’un demi-siècle, a fermé ses portes pour de bon ce week-end. Entre larmes, paillettes et playlists nostalgiques, retour sur une dernière nuit de fête — et d’adieux.

« Toute sortie est définitive ». Cette banale mention scotchée sur les lourdes portes du SchwuZ brûle les yeux ce soir. Après 48 ans de fête, de nuits blanches, de changements d’adresse et de renaissances successives, le SchwuZ tire sa révérence ce samedi 1er novembre avec une magistrale soirée d’adieu.

Jamais on n’a vu l’immense club, installé depuis 2013 dans une ancienne brasserie au épais murs de béton brut, plein à ras bord comme ce soir. Un mix d’habitué·e·x·s des lieux, de gueules d’autres « époques » du SchwuZ, de newcomers et même d’afficionado·a·s du club venus exprès de l’étranger pour y danser une dernière fois se pressent dans les allées, autour des bars des trois dancefloors.

Briquets, magnets, chaussettes et petits canards de bain

Dans le hall d’entrée, l’équipe du club a disposé ce qu’il reste du merchandising dans un coin. Tout le monde s’y presse. Briquets, magnets, chaussettes, petits canards de bain: chacun·e·x veut ramener un petit bout du SchwuZ chez soi. Un des vendeurs de la braderie s’amuse de la situation: le club plein, les souvenirs qui partent comme des petits pains. Si un tel engouement avait pu se manifester plus tôt, on aurait peut-être pu sauver le club, qui avait déclaré faillite cet été. Désormais, il est trop tard.

Le SchwuZ ferme parce qu’il n’était plus rentable depuis des années. Frappé de plein fouet par la pandémie, comme les autres clubs berlinois, il ne s’était jamais vraiment remis de ces deux années de fermeture imposée. Les locaux, immenses – 1.500 mètres carrés – étaient rarement remplis à pleine capacité. La communauté LGBTIQA+ entretenait un rapport doux-amer au vieux club: vénéré pour son aura mythique, son statut unique dans le paysage nocturne berlinois, mais aussi moqué pour ses playlists ringardes, avec toujours les mêmes rengaines, et ses fêtes qui se ressemblaient les unes aux autres.

Il a aussi été beaucoup reproché au SchwuZ d’être trop gay, ou de ne pas avoir réussi à séduire la Gen Z, qui restait minoritaire parmi les clubbeu·r·ses·x. Très engagée, l’équipe du SchwuZ avait pourtant multiplié les nouveaux formats à destination des lesbiennes, des personnes queers et des plus jeunes ces dernières années. Mais cela n’aura pas suffit à sauver le club de son naufrage.

Presque toutes les dragqueens – et les quelques dragkings – qui ont façonné l’image du club sont là. C’est un déluge de paillettes et de make-up. Iels ont mis sur pied un dragshow grandiose de près de deux heures sur la scène de la « cathédrale », comme on appelle ici le plus grand des dancefloors du club – une sorte de mini-Berghain. Faste et nostalgique, le spectacle s’achève sur le final du « Lac des Cygnes » – sompteux et tragique, une manière très drag de dire adieu au SchwuZ.

Le dancefloor se transforme en mer de lumières

Quant au clubbing, cette soirée ne fera pas exception dans l’histoire du club: on aura entendu jusqu’à trois fois les mêmes chansons en quelques heures: la ritournelle des « Free From Desire », « Toxic », « Lady Marmalade », « It’s Raining Men », « Mamma Mia » revient encore et toujours sur les trois pistes de danse. « I will survive » a un succès fou ce soir-là, les habitué·e·s·x ne veulent pas perdre leur « salon ».Un représentant de l’association qui est derrière le SchwuZ a d’ailleurs annoncé quelques heures plus tôt au micro que « si il y a la possibilité de continuer à écrire l’histoire du SchwuZ, nous l’écrirons ». Il flotte comme un vague espoir sur le dancefloor.

« Le club va rouvrir un jour, sinon c’est trop horrible »

Vers 5 heures, une dragqueen finit son set avec « My Heart Will Go On » et ôte dramatiquement sa perruque. Tête nue, elle pleure et sourit en même temps. Le dancefloor se transforme en mer de lumières, tout le monde a le smartphone en mode lampe de poche braqué en l’air. Un mec pleure, le visage enfoncé sur le biceps de son copain. La dame pipi du club, là depuis une éternité, explique se dire « que ce n’est qu’une pause, que le club va rouvrir un jour, sinon c’est trop horrible ». Beaucoup de clubbeur·es·x·s veulent rester jusqu’au bout de la nuit, jusqu’à ce que les lumières s’allument.

À 7 heures du matin, quand nous quittons les lieux, le club est encore à moitié plein, les frigos derrière les différents comptoirs sont de plus en plus vides. « Free From Desire » résonne une fois de plus, jusqu’à l’écoeurement. Dehors, sous le matin blème, des gens ont déposé des bougies et des fleurs. Sur un bout de carton, quelqu’un a écrit: « À la fin, tout ira bien, et si ça n’est pas bien, alors c’est que ce n’est pas la fin. À bientôt, SchwuZ ».