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En être ou pas? Le double discours des stars de télé

Pour un acteur, jouer un personnage homo à la télé n’est plus rédhibitoire, bien au contraire. Mais entre celui qui en est vraiment et celui qui n’en est pas, le téléspectateur y perd son latin. D’autant que les vedettes savent manier à la perfection leur image selon à quel média ils accordent une interview.

En 2001, les télévisions françaises ont diffusé 570 programmes abordant le thème de l’homosexualité. Cela ne fait pas loin de deux émissions par jour, et c’est plutôt rassurant puisque toutes les chaînes s’y sont mises. Même la droitière TF1 décide d’exploiter le filon, en incluant dans la série Commissaire Moulin – ah, Yves Rénier jeune – une équipière homosexuelle. Dans une autre série policière sur la même chaîne, Brigade spéciale, la commandant Lauren Valmont sort du placard pendant l’un des épisodes. Oui mais voilà, il y a néanmoins un hic. L’actrice, Isabelle Renauld, s’empresse de dire dans une interview que si son personnage est une lesbienne, ce n’est pas son cas. Ajoutant «Je n’ai aucun tabou à ce sujet.» Evidemment.

Aujourd’hui, incarner un personnage homosexuel au cinéma ou à la télévision n’est plus rédhibitoire. C’est même plutôt chic. Malheureusement, cet encanaillement doit plaire à la désormais célèbre ménagère de plus de 50 ans, et les acteurs qui incarnent ces personnages exotiques doivent donc affirmer, dans leur magazine télé préféré, qu’ils sont peut-être homo-compatibles mais que dans l’intimité de l’alcôve, ils ne mangent pas de ce pain–là. Comme la ménagère.

Heureusement, toutes les celebs ne sont pas aussi timorées qu’Isabelle Renauld mais il reste que dans le milieu du spectacle, «image is everything». Parole d’Agassi. Dont l’ex, Brooke Shields, ne s’est jamais aventurée à jouer une lipstick lesbian. Amusons-nous donc à découvrir qui «en est» et n’hésite pas à le dire; qui «n’en est pas» et n’hésite pas à le dire; et ceux qui nagent en eau trouble et tiennent un double discours selon le média auquel ils accordent une interview. L’homosexualité à l’écran est un peu comme la bière: il faut que ça mousse, mais après y avoir trempé ses lèvres on ne désire pas en avoir sur la moustache.

It’s hot!
Dans l’émission de Mireille Dumas «Comme on s’aime», l’été passé sur France 2, une soirée entière était consacrée aux derniers tabous. Dont l’un était l’homosexualité. En prime time et en pôle position, à une époque où toute la France faisait des châteaux de sable, le très rigolard Laurent Ruquier, animateur sur la même chaîne de «On a tout essayé», affirme l’inimaginable. Qu’il peut envisager partager sa vie avec un homme beau et con, mais qu’il n’en sera jamais capable si le garçon est brillant, mais moche. Au-delà de l’observation typiquement gay, notons le courage de Laurent Ruquier qui se propulse ainsi, en quelques secondes, du placard à balais directement sur la table de la salle à manger. Cela, pour tout ceux qui auraient douté de la nationalité sexuelle de Ruquier.

Evidemment, étant donné les chroniques du personnage à la radio et la bande dont il s’entoure à la télévision, la provoc est le fond de commerce de Laurent Ruquier. Affirmer ainsi franchement ses préférences et même, bigre, ses valeurs, le sert. Bien plus subtil est le cas de Rupert Everett. Qui est très beau et ne s’en cache pas, et qui n’est pas con non plus, ce qui posera peut-être un problème pour Laurent Ruquier. Rupert Everett a affirmé son homosexualité en 1989, quatre ans après avoir tenu le premier rôle d’un homo dans Another Country. Depuis, l’acteur a incarné les hommes à femmes, notamment dans «The comfort of stranger» et «An ideal husband», mais il est probable que sa franchise est la cause d’un passage à vide jusqu’en 1995 et «Le mariage de ma meilleure amie». Où il vole la vedette à Julia Roberts en incarnant un… homo. En effet le 10 octobre 2002, Rupert Everett affirme sur le portail gay.com que, persuadé d’avoir tous les atouts pour devenir le prochain James Bond, il ne le sera jamais pour la simple raison qu’il est gay, qu’il le revendique et que cela a fini par se savoir. «Avez-vous déjà vu un producteur de Hollywood offrir le premier rôle d’un film d’aventure à un acteur gay? Non,» dit-il. C’est la raison pour laquelle Pierce Brosnan est à nouveau James Bond dans «Die another day», même si dans sa biographie celui-ci dit que lorsqu’il était adolescent, il était persuadé d’être gay. Cela s’appelle de l’authenticité.

On peut répéter l’exercice avec d’autres personnalités comme Ellen De Generes, qui s’est outée en 1997 en sortant de la série éponyme, où elle incarnait d’ailleurs une lesbienne. Ou Ian McKellen, dont l’âge fait que sa carrière est hors de danger, puisqu’elle est faite. On obtient toujours le même résultat, soit que l’honnêteté, pour des raisons d’image, doit être manipulée avec beaucoup de doigté.

C’est tiède
De la finesse, l’acteur de la série télé «Will & Grace» n’en manque pas lorsqu’il s’agit de faire planer le doute. Eric McCormack est très brun, très viril, et très poseur aussi. Il y a quelques mois, il a fait la couverture du magazine américain Out, avec le titre «When Will he», soit quand le fera-t-il. Jeu de mot sur le prénom de son personnage dans la série, où il incarne un avocat homo cohabitant avec une femme hétéro, la question est tendancieuse. Quand Will embrassera-t-il donc enfin un partenaire à l’écran? Sur cette couverture, Eric McCormack est presque lascif, le regard de braise, la chemise entrouverte sur un torse poilu, mais rasé. Exactement comme certains les aiment, masculins et ripolinés à la fois. L’acteur de 39 ans est un habitué de Out, car il incarne ce que l’Amérique appelle un «role model»: un exemple à suivre, une source d’inspiration. Pourtant, lorsqu’on lit l’article à l’intérieur, on se demande s’il faut bien suivre cet exemple en chair et en os ou s’il ne vaut pas mieux tirer des leçons de la série télé. En effet dans Out, Eric McCormack passe comme chat sur braises sur le fait qu’il n’est pas gay. Cela pour une bonne raison, pourquoi tuer la poule aux œufs d’or? – sans mauvais jeu de mots. Will & Grace rassemble aux Etats-Unis plus de 16 millions de téléspectateurs, plaçant la série en troisième position derrière Friends. En France, sur TF1 le samedi après-midi, elle faisait 40% d’audience en 2001. Comme la communauté gay a particulièrement bien accepté cette série, affirme le quotidien australien The Courier-Mail, et cela malgré le fait que Eric McCormack n’en soit pas, il ne faut pas pour autant décevoir une frange de la population grande consommatrice de média. Dans l’article de ce quotidien, le journaliste annonce la couleur en commençant son article par «Marié, heureux et maintenant père…», suivi d’une véritable armada de détails sur sa femme – donc sur son hétérosexualité – et le fait que, malgré cela, Eric McCormack doit être un bon acteur puisqu’il est capable de faire des plaisanteries typiquement gay, sans attirer l’attention. Le titre d’un quotidien canadien, le National Post, ne laisse pas planer le doute non plus: «Confessions of a straight gay straight man», les confessions d’un homme hétéro qui-joue-les-homos-réglos. Bien. Au moins l’acteur de la série pour ados Dawson, James Van der Beek, a-t-il le courage de dire, dans Out toujours, que le baiser qu’il échange avec Paul, un partenaire dans son dernier film «The rules of attraction», n’a mis aucune langue en mouvement. Sauf celle des centaines de milliers de spectateurs gay, qui se demanderont peut-être si Van der Beek en est, ou pas.

C’est froid, mais on peut toujours rêver
Pour terminer, retournons en France et intéressons-nous à Marc Olivier Fogiel, le juvénile animateur de l’émission «On ne peut pas plaire à tout le monde» sur France 3. Si rien n’indique qu’il en est, rien n’indique non plus qu’il n’en est pas. Le doute peut donc planer au-dessus de ses épaules, et même la lecture entre les lignes de son interview, par le site gay.com, ne permet pas de tirer la moindre conclusion. En effet, si le journaliste d’un site gay lui demande son regard d’expert à propos de l’image des homos véhiculée par la télévision, c’est que Marco doit avoir une opinion forgée par l’expérience. «Ma vie personnelle n’intéresse personne», rétorque-t-il. Au contraire Marco, elle intéresse tout le monde. Mais au fait, en quoi êtes-vous expert Marco?